17/11/2020

Leur nature et la nôtre, les nouveaux débats de l'écologie

L'écologie doit-elle devenir un culte du retour à la nature sauvage sans l'homme ou rester une appréciation critique des écosystèmes tels qu'ils évoluent dans l'histoire, y compris sous l'influence de l'homme? L'hydrobiologiste Christian Lévêque publie dans le forum de la revue Water Alternatives un éditorial sur les deux visions qui s'affrontent en Europe concernant la restauration des rivières. Nous en proposons une traduction et un commentaire.


Que signifie "restaurer" les rivières? 
Restauration "écocentrique" vs "centrée sur l'humain"

"Depuis des siècles, nous adaptons nos cours d'eau pour utiliser les terres fertiles des grands lits fluviaux pour l'agriculture, pour faciliter la navigation et promouvoir le commerce, pour produire de l'énergie à l'aide de moulins à eau et de barrages et, plus récemment, pour des activités de loisirs. Dans le même temps, pour se protéger des inondations, des digues ont été construites à tel point que les fleuves européens ont perdu 90% de leurs plaines inondables. Et, bien sûr, les rivières ont trop souvent servi d'exutoire à nos déchets!

Le concept de «restauration écologique» cherche à corriger ces impacts et suggère qu'un écosystème peut être restauré dans son état "d'origine" ou "équilibré". On comprend que la restauration d'un château consiste à le ramener à son état d'origine car il y a un point de référence, à partir de la date de sa création. Mais quand on a affaire à un système écologique qui a évolué et changé au cours de milliers d'années, la question est plus complexe: il n'y a pas de date de création et on ne sait pas où placer le marqueur sur la chronologie! Une autre approche consiste à assimiler les écosystèmes aux organismes et à rechercher un «état sain», une notion assez floue proche de celle de restaurer un état fonctionnel avant le "stress". Dans les deux cas, les «écosystèmes naturels» sont considérés comme non-artificialisés / humanisés. Mais pour les socio-écosystèmes qui ont co-évolué pendant des siècles, cette référence n'est pas très significative car de nombreuses espèces ont depuis disparu ou se sont adaptées aux nouvelles conditions. Lorsque l'objectif est de supprimer des états esthétiques, écologiques, sanitaires ou économiques indésirables, on parle de réhabilitation ou de ré-affectation. Mais alors, la "référence" n'existe pas et doit être définie: quels sont les critères à utiliser et quelles natures voulons-nous atteindre?

Les actions humaines sont le plus souvent décrites par les écologues comme des "dégradations" et l'utilisation par l'homme d'un système comme une "pression". En effet, selon le paradigme dominant de certains défenseurs de l'environnement, la nature est parfaite lorsqu'elle est exempte d'artefacts humains. Ainsi, ils cherchent à "supprimer" les infrastructures qui ont été construites sur les cours d'eau pour révéler des rivières "sauvages" ou "naturelles"... Mais cela remet en question de nombreux autres enjeux, comme la sécurité des riverains, les écosystèmes aquatiques qui se sont développés au fil des siècles et l'avenir du patrimoine bâti. Ainsi, certains écologues (non écologistes) différencient des niveaux de systèmes adaptés, dont beaucoup sont fonctionnels et devraient être étudiés comme tels plutôt que systématiquement considérés comme "dégradés". Ce que certains ont appelé les "nouveaux écosystèmes", par opposition aux systèmes non humanisés, contribuent à notre cadre de vie et constituent également un patrimoine écologique. Cela ne veut pas dire, bien entendu, que tous les écosystèmes modifiés sont identiques ou également légitimes; en effet, des évaluations au cas par cas sont nécessaires. La priorité en termes de restauration devient alors claire: limiter la pollution et maintenir une forte hétérogénéité environnementale, tout en tenant compte d'une réduction attendue des débits d'eau due au changement climatique.

Les grands barrages construits pour produire de l'hydroélectricité et/ou stocker de l'eau pour se protéger des inondations, ou pour alimenter les réseaux d'irrigation, ainsi que des prélèvements massifs, ont fortement affecté le fonctionnement des rivières: perturbant la continuité amont-aval, notamment en ce qui concerne le transport des sédiments, affectant fortement des plaines alluviales et des "annexes fluviales". Alors que dans l'imaginaire populaire une rivière est constituée d'eau courante, pour les écologues, un système fluvial est avant tout un ensemble hétérogène de sous-systèmes plus ou moins coulants ou stagnants. Un hydrosystème est la rivière avec sa plaine d'inondation et ses annexes fluviales, telles que les bras morts, les étangs résiduels, les zones humides connectées, etc.

La reconquête de ces zones désormais largement urbanisées pour les réintégrer dans le fonctionnement de la rivière tend à être impossible pour des raisons d'occupation des sols et de sécurité. Les infrastructures ont un rôle dans le contexte actuel et, en règle générale, il n'est pas prévu de les supprimer dans un proche avenir. Il n'est pas non plus question de supprimer les installations de navigation ou les digues qui protègent les villes, comme les réservoirs de la Seine qui protègent Paris. Enfin, ces débats ne doivent pas nous permettre d'oublier la question de la qualité de l'eau et, malgré de gros efforts d'assainissement de nos cours d'eau, la lutte contre la pollution doit rester la priorité.

Par conséquent, les infrastructures évoquées ci-dessus sont toutes en place depuis longtemps et, à quelques exceptions près, la redécouverte de cours d'eau "vierges" n'est possible que dans notre imagination. Ainsi, particulièrement en France, l'attention s'est portée sur les petits déversoirs et leurs annexes, qu'ils soient inactifs / abandonnés ou encore en service, qui seraient considérés comme un obstacle à la "continuité écologique" (c'est-à-dire le mouvement des poissons et des sédiments). L'un des objectifs est le retour des poissons migrateurs (considérés à la hâte comme incarnant la biodiversité aquatique) et le déplacement des truites, bien qu'elles puissent traverser la plupart des déversoirs (naturellement ou à l'aide de passes à poissons). Cependant, toutes les espèces aquatiques ne vivent pas dans l'eau courante. Les amphibiens, par exemple, préfèrent les environnements stagnants et ne se mélangent pas bien avec les poissons. C'est également le cas de nombreux invertébrés qui disparaîtraient avec le retrait des déversoirs et des zones humides associées, qui sont connus pour être riches en espèces, y compris celles en péril. La suppression de ces derniers refuges n'est en tout cas qu'une maigre compensation pour les annexes fluviales de la plaine alluviale que nous avons gommées, et elle condamne une partie de la biodiversité aquatique qui ne vit pas dans l'eau courante. Bien qu'aucune évaluation n'ait été faite de ce qu'il y a à gagner ou à perdre en termes d'espèces aquatiques et de fonctions écologiques, le gouvernement français a mis en place une politique centralisée de suppression des seuils.

Les partisans de la continuité écologique semblent également ne pas bien apprécier les processus en cours de changement climatique qui, d'après les prévisions, entraîneront à la fois des inondations plus graves et des périodes de sécheresse plus longues. De ce point de vue, est-il préférable d'avoir une rivière asséchée "naturelle" ou une rivière dans laquelle il reste quelques petits plans d'eau, qui, malgré leurs inconvénients, peuvent servir de refuge lors d'une sécheresse? Mon expérience avec d'autres systèmes fluviaux intermittents m'a appris l'importance de tels refuges pour la recolonisation du ruisseau par dérive, lorsque l'eau remonte.

En conclusion, tout le débat tourne autour de deux visions écologiques opposées. L'une peut être vue comme écocentrique, où la "vraie nature" n'est pas humanisée dans la mesure où tout développement est considéré comme portant atteinte à l'intégrité du système. Le paradigme de la nature sans humains est l'idéal dans les cercles écologistes et il est communiqué à travers le concept de "rivières sauvages". La restauration signifie alors effacer toute empreinte humaine. Cette vision longtemps dominante a été remise en question par ceux qui croient que les humains sont des acteurs de leur environnement et que les systèmes fluviaux sont co-construits par des processus naturels et des actions humaines."

Discussion
Christian Lévêque exprime de manière très claire les enjeux des milieux aquatiques que sont les rivières, les plans d'eau, les estuaires et les zones humides, d'origine naturelle comme artificielle (voir ses livres récents Lévêque et al 2020, Lévêque 2019, Lévêque 2013). 

L'écologie au sens de protection de l'environnement est devenue une politique publique de plus en plus affirmée depuis la seconde moitié du 20e siècle, en raison de certains effets du développement industriel perçus comme négatifs par les populations. Mais plus ces politiques écologiques se déploient, plus il apparaît qu'elles répondent à des motivations diverses, voire contradictoires. Nous pouvons être d'accord sur la nécessité de corriger des choses perçues par la plupart des citoyens comme des nuisances (par exemple, des pollutions qui tuent le vivant aquatique et mettent en danger la santé humaine) sans pour autant être d'accord sur des choses perçues comme secondaires ou donnant lieu à des appréciations opposées (par exemple, savoir si la biologie et la morphologie d'une retenue représentent un problème en soi par rapport à une eau courante).

Il existe au moins quatre dimensions de débat.
  • Dimension ontologique : au nom de quelle vision de la nature organisons-nous notre représentation de la réalité? Pour les uns, la nature doit se représenter idéalement comme une entité indépendante de l'observateur-acteur humain, pour d'autres la nature ne peut qu'intégrer l'observateur-acteur humain qui en est partie prenante. 
  • Dimension scientifique : par quelles disciplines l'objet "rivière" ou l'objet "bassin versant" doivent-ils être étudiés? Pour les uns, cela ne relève que des sciences naturelles, pour d'autres cela doit inclure les sciences humaines et sociales ainsi que les humanités.
  • Dimension politique : qui décide, et comment, de la mobilisation des savoirs (donc la collecte de données et la création de modèles) visant à alimenter la conception des normes d'action publique? Cette question concerne l'évolution technocratique de nos régimes, où beaucoup de sujets sont traités par des experts mais sans règle transparente dans la sélection des expertises jugées pertinentes.
  • Dimension démocratique : comment les citoyens, leurs associations, leurs syndicats, leurs partis, leurs élus ont-ils capacité à exprimer leur perception et leur volonté sur ces questions?  Ce sujet est le contrepoint du précédent, plus les choix semblent imposés par des experts sans débat réel dans la société qui subit les conséquences de ces choix, plus on voit se lever des oppositions citoyennes. 
En tant qu'association, nous souhaitons que ces dimensions deviennent le sujet de discussions plus ouvertes et plus informées. Nous en sommes encore loin en France, et même hélas en Europe.

Source : Lévêque C (2020), What does ‘restoring’ rivers mean? 'eco-centric' vs 'human-centric' restoration, The Water Dissensus, Water Alterntives Forum

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13/11/2020

Libellules et demoiselles apprécient les plans d'eau d'origine artificielle (Vilenica et al 2020)

Artificielle ou naturelle? Le vivant aquatique ou amphibie ne fait pas toujours de différence quand il cherche une masse d'eau pour accomplir son cycle de vie. Une équipe de chercheurs croates montre qu'une vingtaine d'espèces d'odonates fréquente les retenues d'eau artificielles de deux éco-régions balkaniques, dont une espèce protégée car menacée d'extinction. Les scientifiques soulignent que les masses d'eau d'origine humaine ou fortement anthropisées ne peuvent être négligées dans la gestion de la biodiversité des bassins versants.  La directive cadre européenne avait prévu de classer des masses d'eau selon leur niveau de modification par l'homme, mais les autorités administratives françaises n'y ont quasiment pas eu recours dans les années 2000. Résultat: nous n'étudions pas dans notre pays la biodiversité de ces milieux et nous menons à la place des politiques coûteuses de "renaturation" sans même faire l'inventaire sérieux des biodiversités et fonctionnalités en place. Cela doit évoluer, car un nombre croissant de travaux scientifiques raconte une autre histoire. 

Lindenia tetraphylla par Par Dûrzan Cîrano (CC BY-SA 3.0)

Les odonates (libellules et demoiselles) font partie des groupes d'invertébrés aquatiques les plus populaires chez les entomologistes professionnels comme pour le grand public en raison de leur grande taille, de leur coloration distinctive et de leur comportement remarquable de vol. Ces insectes sont aussi largement utilisés comme indicateurs écologiques de la qualité de l'habitat et de l'intégrité des écosystèmes d'eau douce du fait de leur diversité, de leur cycle biologique amphibie, de leur temps de génération relativement court, de leur position trophique élevée et de leur sensibilité aux changements anthropiques à petite échelle dans l'environnement.

Marina Vilenica et ses collègues de l'université de Zagreb (Croatie) ont analysé la présence des libellules et demoiselles dans les plans d'eau artificiels des Balkans, formant l'essentiel des lacs des régions étudiées : "Nous avons étudié 36 plans d'eau artificiels, dont 21 sont situés dans l'écorégion dinarique des Balkans occidentaux (ER 5) et 15 dans l'écorégion des basses terres pannoniennes (ER 11) en Croatie (Illies, 1978). La majorité de ces plans d'eau sont des réservoirs construits sur des rivières petites ou grandes utilisées pour l'approvisionnement en eau, l'irrigation ou la production d'électricité, tandis que plusieurs sont des plans d'eau naturels mais anthropisés (par exemple Prolosko Blato, Sakadas, Njivice) ou des plans d'eau artificiels et des gravières ( par exemple Ponikve, Šoderica Koprivnica, Rakitje, Novo Čiče), utilisés principalement pour les loisirs. "

Voici le résumé de leur recherche:

"Dans quelle mesure les lacs artificiels sont-ils adaptés à l’habitat d’Odonates ? De nombreuses études ont fait état d’un impact négatif des modifications des habitats d’eau douce sur leur biote. Néanmoins, certains lacs artificiels se sont révélés précieux pour la conservation de la biodiversité car ils peuvent abriter de nombreuses espèces. C’est pourquoi nous avons étudié 36 lacs artificiels afin de déterminer dans quelle mesure ils peuvent représenter des habitats appropriés pour les Odonates. Les larves ont été échantillonnées pendant les mois d’été 2016 et 2017. Sur chaque site d’échantillonnage, un total de dix échantillons a été collecté à l’aide d’un filet à main pour le benthos. Un total de 21 espèces d’Odonates a été enregistré. Les assemblages d’Odonates étaient principalement constitués d’espèces communes largement répandues. Cependant, sur le site de réservoir Vlačine, situé dans l’écorégion des Balkans occidentaux dinariques, nous avons également enregistré une des espèces méditerranéennes rares et menacées, Lindenia tetraphylla (Vander Linden, 1825). La végétation aquatique et rivulaire, la fluctuation du niveau d’eau et la concentration d’oxygène dissous ont eu la plus grande influence sur les Odonates, montrant que les lacs artificiels avec une végétation aquatique et une zone rivulaire bien développées, et avec de faibles fluctuations du niveau d’eau, peuvent fournir des habitats appropriés pour diverses espèces d’Odonates. Les Odonates font partie des insectes d’eau douce sensibles largement utilisés comme indicateurs écologiques et comme espèces parapluie. Nos résultats concernant leurs assemblages dans des habitats fortement modifiés et artificiels pourraient donc contribuer aux futures activités de conservation du biote et des habitats d’eau douce."

Les auteurs concluent : "bien que ces plans d'eau artificiels abritent pour la plupart des espèces répandues et communes, dans certains cas, ils fournissent également un habitat convenable à certaines espèces rares et menacées. Les résultats de cette étude pourraient contribuer au développement d'un système de surveillance des masses d'eau artificielles conformément aux exigences de la directive-cadre européenne sur l'eau."

Discussion
Ce travail rejoint des dizaines d'autres recherches en France et en Europe montrant que des habitats aquatiques artificiels — fossés, canaux, biefs, mares, étangs, plans d'eau, lacs — sont colonisés par le vivant et deviennent des enjeux pour préserver le faune et la flore, en particulier en période de changement hydrologique et climatique (voir la recension de 100 travaux récents in CNERH 2020, voir le livre de Lévêque et Bravard dir 2020 sur ce sujet).

Notre association a sollicité voici plus de 2 ans l'Office français de la biodiversité pour une prise en compte de ces enjeux et la mise au point de protocoles de diagnostic avant intervention sur ouvrages hydrauliques. Hélas, l'administration publique française est pour le moment acquise à l'angle fermé de la naturalité et de l'endémisme, ne montrant pas d'intérêt pour les nouveaux écosystèmes créés par l'humain ni pour l'évolution des assemblages du vivant à l'Anthropocène. Les associations de protection de ces sites doivent organiser eux-mêmes des premiers inventaires à fin de sauvegarde et insister auprès des autorités en charge de l'environnement pour que les diagnostics complets des écosystèmes aquatiques humains soient réalisés sans préjugé. 

Référence : Vilenica M et al (2020), How suitable are man-made water bodies as habitats for Odonata?, Knowl Manag Aquat Ecosyst, 421, 13

10/11/2020

Les fédérations de moulins et riverains expliquent les conditions déplorables de concertation avec les hauts fonctionnaires eau et biodiversité

Suite des aventures du soviet suprême "comité national de l'eau". Il ressort de la lettre co-signée par les deux fédérations de moulins (FFAM, FDMF) et la fédération de riverains (ARF) que la haute administration avait convoqué une réunion en 48 h sur la base d'un document sorti du chapeau à valider en un temps record. La vision de la concertation par la direction de l'eau et de la biodiversité consiste désormais à transmettre ses ordres aux propriétaires par le biais des associations. La gouvernance jacobine et autoritaire de ce pays est décidément incurable, malgré son rejet partout, surtout en écologie où les citoyens protègent leur cadre de vie contre les projets inutiles décidés fort loin du terrain. La lettre des 3 fédérations rappelle que la première étape de la priorisation a été faite sans base scientifique transparente ni proposition aux associations de débattre des opportunités de classer chaque rivière ou chaque ouvrage. Bref, rien ne change, demain les préfectures et syndicats feront encore des pressions pour casser les ouvrages comme ils le font depuis 2010, le soviet suprême de l'eau se plaindra encore que les mêmes causes produisent les mêmes effets.  C'est pourtant très simple de tout débloquer et tout apaiser: il suffit de proposer et financer publiquement les seules solutions conformes à la loi, celles qui respectent les ouvrages autorisés des bassins versants, leur consistance légale, leurs usages et leurs milieux. 

Le courrier des fédérations moulins et riverains expliquant pourquoi il leur est impossible de travailler dans des conditions déplorables de concertation :

"Plusieurs raisons motivent ce choix qu’il nous a été difficile de prendre, alors que nos trois fédérations – ARF, FFAM, FDMF – ont toujours favorisé le dialogue constructif :

Les délais : il nous est techniquement difficile d'analyser sérieusement des documents de travail envoyés 2 jours avant la réunion. Ce délai est aussi trop court pour une confrontation d'idées des trois fédérations soucieuses de privilégier une analyse collective pertinente, alors que la « co-construction » et la « concertation », qui sont théoriquement les principes directeurs du GT Continuité Ecologique et de ses sous-groupes, supposeraient notamment que chaque partie prenante puisse bénéficier d’un temps de réflexion suffisant.

Au fond par ailleurs, la lecture rapide du projet de fiche nous laisse perplexes et inquiets tant nous constatons que les Fédérations sont sollicitées essentiellement comme réceptacles d'informations à transmettre aux adhérents. Ce rôle, qui serait cantonné à celui d’une « courroie de transmission » de mesures adoptées sans réelle concertation préalable, est incohérent et contraire au souhait que nous formulons depuis longtemps de tenir un rôle dans la concertation et dans des consultations préalables : le projet de bilan de la mise en œuvre du programme de priorisation ne mentionne nulle part la place des usagers (nous ne sommes toujours pas invités dans les comités de bassin). De même nous attendons toujours la liste des ouvrages prioritaires avec les critères afférents du préfet coordonnateur de bassin.

Il parait pour le moins cavalier d'écrire (page 1): " En pratique il existe 6 listes d'ouvrages prioritaires (appelées aussi programmes de priorisation) en métropole, un par bassin hydrographique, chacune ayant été définie et arbitrée à l'échelle du bassin". Pour mémoire, sauf exception, la phase de « concertation » n'a en réalité fait l'objet d'aucune information, concertation, ni consultation réelle des Fédérations de moulins et de riverains au niveau de la majorité des 6 bassins, ainsi que cela a d’ailleurs été signalé à l’occasion de la réunion du GT Continuité écologique du mois de mars dernier, mais aussi signalé par plusieurs écrits de fédérations et syndicats adressés aux services en charge de la mise en œuvre de la priorisation.

Au final d’ailleurs, il est souligné que la méthodologie tout à fait contestée observée à l’occasion de l’envoi des projets de listes de priorisation à l’échelle des bassins perdure, en dépit des remarques formulées à ce sujet, puisque les projets de documents de travail du sous-groupe Priorisation ne nous ont là encore été transmis que 2 jours avant la réunion... ce qui n’est pas respectueux du principe notamment de concertation.

Enfin, suite à la réunion des 3 Fédérations avec le Directeur de la DEB le 16 octobre dernier, à ce jour aucune suite n’a été donnée aux demandes que nous avons formulées pour construire une démarche plus apaisée du nouveau plan d'actions. Il est dommageable qu'aucune discussion ne soit engagée sur le problème notamment du financement déséquilibré suivant le type de travaux engagés (aménagement, arasement, etc.). C'est pour nos Fédérations un élément incontournable qui établirait la volonté réelle de respecter les articles 211-1 et 214-17 du code de l'environnement et l’usage équilibré de la ressource en eau. L'autre demande concernant la représentation institutionnelle des Fédérations dans les différents lieux de concertation n'est toujours pas pris en compte, ce qui continue de témoigner d'un traitement différencié des usagers en fonction de critères que nous ignorons. L'absence de réponses formelles nous fait penser que la volonté d'apaisement n'est que partielle et circonscrite à un seul échelon.

En conséquence, dans l'état actuel de préparation et du rôle que nous ressentons comme accessoire dans le projet présenté, il ne nous est donc pas possible de participer à la réunion prévue cet après-midi.

Nous restons toutefois favorables à un véritable travail de co-construction et de concertation, à condition que ces principes trouvent effectivement une expression concrète dans les moyens mis en œuvre ainsi que les décisions adoptées".

07/11/2020

De la continuité apaisée à la continuité énervée

D'après nos informations, le soviet suprême rebaptisé comité national de l'eau du 5 novembre a été l'occasion d'un coup de colère contre les "ultras" qui osent dire en public que la continuité écologique des rivières se passe toujours mal. Pour le quarteron de hauts fonctionnaires essayant de faire survivre en réanimation cette réforme frappée du virus du dogmatisme idéologique et de la gabegie financière, le citoyen ne comprend tout simplement rien et l'Etat fait tout pour son bien. Manque de chance, nous ne croyons plus un mot de ce refrain. Les citoyens français en ont surtout ras le bol d'être pris pour des idiots. Au bord des rivières comme ailleurs. 

Le groupe de travail "continuité écologique" du comité national de l'eau a été lancé voici deux ans pour mettre en oeuvre le plan de politique apaisée de continuité écologique — un texte promulgué à la va-vite en 2018 par un Nicolas Hulot qui n'avait manifestement aucun intérêt au dossier, vu que les principaux lobbies courtisant son ministère trempent depuis longtemps dans cette sombre affaire. Nicolas Hulot est celui qui n'a même pas daigné recevoir les représentants des 20 000 riverains de la Sélune protestant contre la destruction des barrages et des lacs au profit du lobby des pêcheurs de saumon, un scandale antidémocratique de la pseudo-écologie sectaire et punitive — alors que plusieurs actions en justice sont en cours quand les pelleteuses font le sale boulot de démolition d'ouvrages d'intérêt général. Ce mépris est répugnant, surtout venant de ceux qui luttent partout en France contre des grands projets inutiles nuisant à la qualité de vie des riverains. 

Les fédérations de moulins (FFAM, FDMF) et riverains (ARF) n'ayant pas pu faire reconnaître à ce comité national de l'eau une seule de leurs exigences fondamentales depuis 2 ans, elles n'ont même pas assisté à la dernière réunion, se contentant d'une représentation par leur avocat. 

Voilà un message assez clair.

C'est en effet par avocat que chaque association, chaque collectif riverain et chaque maître d'ouvrage devront désormais porter plainte (à l'administratif et dans certains cas au pénal) contre tout fonctionnaire territorial ou central qui essaie de:

  • harceler des propriétaires isolés et fragiles,
  • désinformer un propriétaire sur ses droits afin de vicier son consentement à signer des contrats ou courriers,
  • casser indûment un droit d'eau, 
  • imposer une solution de destruction d'ouvrage, 
  • prétendre que les passes à poissons n'ont pas à être indemnisées,
  • refuser de reconnaître la préservation du patrimoine classé et l'exemption des sites producteurs inscrites dans la loi,
  • ralentir la transition bas-carbone par des demandes abusives sur la relance énergétique des sites, 
  • mettre à sec des milieux aquatiques et humides, réduire la ressource en eau à l'étiage, altérer la faune et la flore des biotopes de retenues, étangs, canaux.

C'est-à-dire tout ce que l'on observe depuis 10 ans. 

Nous rappelons qu'au cours du seul été 2020 et en pleine désinformation de "continuité apaisée", l'administration a :

  • publié le décret scélérat du 30 juin 2020 qui permet de détruire des sites et mettre à sec des milieux sur simple déclaration confidentielle, sans enquête publique ni étude d'impact,
  • publié le décret scandaleux du 18 août 2020 qui entérine l'exclusion des comités de bassin des agences de l'eau de tous les représentants des ouvrages particuliers, familiaux, patrimoniaux (moulins, étangs, canaux, patrimoine riverain de la ruralité), c'est-à-dire interdisant que la politique publique des ouvrages soit co-construite avec les premiers concernés, non imposée par des bureaucraties et des lobbies non élus, 
  • engagé dans plusieurs SDAGE 2022-2027 la poursuite de la prime financière à la destruction pour encore 7 ans, soit la reconduite des blocages par impossibilité de financer les modes doux de continuité. 

A M. Claude Miqueu — co-animateur du groupe de travail du comité national de l'eau — qui répète dans le vide "du concret, du concret", voilà du tout à fait concret. 

Voilà des décisions normatives et financières de l'Etat et des administrations qui indiquent très clairement la volonté de persister dans le premier motif de colère des citoyens, à savoir la préférence publique pour la destruction des patrimoines bâtis et paysagers de l'eau, le harcèlement permanent des propriétaires et des riverains. 

On attend donc que l'Etat et les représentants de l'Etat dans les agences de l'eau reformulent ces textes qui contredisent le soi-disant apaisement.  Du concret, du concret, M. Miqueu.

La continuité sera apaisée quand les hauts fonctionnaires de l'eau et de la biodiversité cesseront de tromper et de manipuler leur monde pour reconnaître les 3 bases d'un apaisement, et instruire les services en ce sens:

  • les ouvrages autorisés doivent être respectés et il n'est plus question de les détruire sauf dans les cas où ils posent des dangers de salubrité publique,
  • les rivières sont des phénomènes socio-naturels, la part humaine de leur histoire, de leur peuplement, de leur fonctionnement et de leurs usages n'a pas à être niée ou diabolisée, le retour de la "rivière sauvage" et l'idéal de "nature sans humain" relèvent d'idéologies militantes mais ne sont pas le contenu de nos lois, donc ne doivent pas être la politique publique de l'administration de l'eau,
  • les dispositifs de continuité écologique se justifient pour protéger des espèces migratrices là où elles sont menacées et ces dispositifs doivent faire l'objet d'un financement public intégral vu leur coût inaccessible et vu que la charge d'entretien est déjà aux frais du maître d'ouvrage. 

Le reste est littérature. Du concret, du concret, M. Miqueu. 

Post scriptum : visiblement, les différents articles parus dans la presse nationale (non seulement locale) cet été et critiquant la mise en oeuvre brutale de la continuité écologique ont beaucoup énervé nos technocrates, dont la zone de confort est dérangée par la lumière faite sur leurs agissements. On s'en doute, l'opacité est l'alliée de l'arbitraire. Tous nos lecteurs qui ont des moyens de contacter des journalistes nationaux de presse, radio ou télévision doivent donc le faire. Les médias seront sûrement ravis de raconter qu'en pleine transition énergétique on détruit des ouvrages hydrauliques pouvant produire de l'électricité verte, qu'en plein changement hydro-climatique on détruit des ouvrages aidant à réguler des crues et des sécheresses, qu'en pleine interrogation sur l'avenir de l'eau dans nombre de vallées françaises on fait disparaître des moyens de stocker et diffuser l'eau toute l'année ainsi que de diversifier des milieux d'accueil du vivant aquatique, qu'en plein débat sur les circuits-courts, l'économie locale et la revitalisation des territoires ruraux on anéantit un patrimoine multiséculaire au lieu de le restaurer et de le valoriser. Beaucoup de citoyens commencent à douter que l'Etat central soit capable de prendre des décisions avisées pour l'avenir du pays, des décisions représentatives de ce que pensent réellement les citoyens et des décisions dont les conséquences fâcheuses sont payées par ceux qui les ont prises, pas par ceux qui les subissent. Dans le cas des ouvrages des rivières, ce doute est permis...

02/11/2020

Le ré-ensauvagement doit-il être la nouvelle idéologie publique de gestion de la nature?

Gilbert Cochet et Béatrice Kremer-Cochet défendent l'idée d'une politique de ré-ensauvagement de la France et de l'Europe. Nous livrons ici diverses critiques de cette perspective, en rappelant qu'elle est une vision idéologique plus que scientifique de la nature, dont certaines contradictions surgissent vite si l'on passe de quelques réserves de protection naturelle à une expansion plus ambitieuse du retour de cette nature réputée sauvage. Cette vision anime en France sous d'autres noms les tenants de la continuité écologique des rivières, une réforme dont la conflictualité sociale rappelle que l'idéal de "nature sans humain" promu par certains se réalise au détriment des humains premiers concernés.  D'où la nécessité d'un débat démocratique élargi sur ces sujets, actuellement gérés par des spécialistes en lien à des technocraties, mais non réellement appropriés, réfléchis et débattus par les citoyens et leurs représentants élus. 


L'agence française de développement publie sur son blog un entretien avec Gilbert Cochet et Béatrice Kremer-Cochet. Ces spécialistes du ré-ensauvagement sont naturalistes, experts au Conseil scientifique du patrimoine naturel (et auprès du Conseil de l’Europe pour Gilbert Cochet), attachés au Muséum national d’histoire naturelle. Ils viennent de publier L’Europe réensauvagée, vers un autre monde (Actes Sud)

Cette définition est donnée du ré-ensauvagement (Béatrice Kremer-Cochet) : "Le réensauvagement est la traduction littérale du terme rewilding, un concept développé par les Nord-Américains. Pour nous, il signifie : protéger un endroit pour lui permettre de retrouver son fonctionnement naturel. Cette protection peut inclure des actions pour favoriser le retour spontané d’espèces disparues ou, s’il n’est pas possible, les réintroduire. À terme, le ré-ensauvagement aboutit à la libre évolution : l’homme ne gère plus rien et la nature évolue sans contrainte anthropique. L’être humain s’interdit d’intervenir dans les équilibres naturels… mais pas de les contempler, ni de les observer, pour s’en inspirer."

On observe que cette doctrine est en réalité la même que celle proposée par une fraction de l'administration française sur les rivières. On parlera de "renaturation" ou de "restauration écologique" pour ne pas employer un terme un peu effrayant et faisant référence au "sauvage", mais l'objectif ultime est bien le même : supprimer peu à peu toute contrainte humaine à la nature (par exemple, les obstacles à la continuité), limiter peu à peu tous les usages humains de l'eau (irrigation, énergie, etc.) afin que la nature tende vers une naturalité idéale définie comme absence de toute perturbation venant des humains.

On doit d'abord noter que cette vue relève de l'idéologie (ou si l'on veut de la morale) et non de la science.  

L'approche scientifique n'énonce pas par elle-même s'il existe une "bonne" ou une "mauvaise" nature (voir Lévêque 2013), elle se contente de décrire des faits (dans le cas de l'écologie: comment les milieux et les espèces évoluent), des causes (quels facteurs font évoluer milieux et espèces) et des conséquences (quelles observations peut-on tenter de prédire quand on change des facteurs, à supposer que le système décrit soit prédictible).  Savoir si des faits ou des conséquences sont bons ou mauvais, beaux ou laids, utiles ou nuisibles, désirables ou indésirables, c'est le problème de la société humaine et de ses normes, pas le problème de la science en soi : une "bonne nature" est toujours en dernier ressort celle que des humains choisissent de désigner comme telle, avec une part d'arbitraire tenant à des goûts, des valeurs, des désirs, des pratiques, pas selon des démonstrations de ce qui serait vrai ou faux sans contestation possible. 

Cet objectif de ré-envaugement pose par ailleurs de nombreuses questions sur ce qui semble des contradictions ou des incertitudes:

  • pourquoi l'humain n'y est-il pas considéré comme partie intégrante de l'évolution du vivant, alors qu'il modifie cette évolution depuis qu'il est humain (les premières extinctions de méga-faune étant documentées depuis le paléolithique)?
  • somme-nous encore dans le cadre d'une possible naturalité sans humain quand des modifications globales (réchauffement climatique, circulation d'espèces exotiques) concernent désormais tous les milieux, sans perspective de changement rapide de cet état de fait?
  • est-il réellement démontré que des grands espaces contigus ré-ensauvagés ont un effet différent sur la biodiversité que la même quantité d'espace mais répartis en patch discontinus, ce qu'une partie de la recherche ne parvient pas à trouver dans les données (voir Watling et al 2020)?
  • ce ré-ensauvagement ou renaturation est-il le souhait réel des riverains de ces milieux ou le souhait d'experts qui ont l'oreille de pouvoirs technocratiques non élus?
  • comment concilie-t-on le discours de relocalisation de l'économie, du circuit-court et de la transition bas-carbone, impliquant notamment l'exploitation locale des ressources naturelles (organiques, minérales, énergétiques), avec l'idée d'une nature-écrin que les humains se contentent de contempler sans jamais la transformer?

Les auteurs répondent à certaines objections (économiques et sociales) en citant le tourisme comme nouvelle source de valorisation du sauvage respecté dans son état sauvage: "le retour d’une faune exceptionnelle possède un fort potentiel pour l’écotourisme. Nous savons aujourd’hui très bien gérer l’afflux de visiteurs afin que les retombées de l’écotourisme soient durables."

Mais cette option ne paraît pas généralisable, notamment dans la cas des rivières et milieux aquatiques continentaux qui nous intéresse. 

D'abord, comme indiqué, ce sont les faunes exceptionnelles et les sites remarquables (la nature scénique) qui attirent du monde, en raison de leur rareté. Or ce discours ne dit rien de la biodiversité ordinaire en nature ordinaire, formant l'essentiel des milieux. Quand on a renaturé ou ré-ensaauvagé une rivière dans une campagne peu sujette à l'afflux touristique, avec à l'arrivée quelques variations locales de poissons ou d'insectes pas spécialement "populaires", va-t-on attirer des flux de ressources par des masses de touristes? C'est fort peu probable.

Ensuite, les afflux touristiques ne sont pas toujours si bien gérés. Si l'on pratique une restauration de rivière ou de plan d'eau en vue d'y favoriser la venue du public, cela pose souvent problème du point de vue de l'idéal de naturalité. Par exemple, les fortes densités de baigneurs en été créent diverses perturbations, l'aménagement des berges pour des pêcheurs et promeneurs implique de ne pas laisser réellement faire leur renaturation (proliférations de végétations, d'embâcles, etc.).

Enfin, le principe du "laisser-faire" de la nature n'aboutit pas toujours à des choses réellement appréciées par les humains. Il suppose par exemple que les populations riveraines doivent accepter en divers endroits des lits quasiment sans eau ou à sec en été, des expansions de crues et reformation de marécages en hiver, toutes choses qui ne sont pas assimilables à de belles promenades dans un parc naturel vaste et balisé. 

Que certaines zones témoins (pour la science) et refuges (pour le vivant) fassent l'objet de préservation dans un état assez sauvage, pourquoi pas. Dans le cas des rivières françaises, une étude a estimé à 8% le linéaire des cours d'eau en situation de naturalité forte. Mais sur les zones qui sont anthropisées de très longue date, la réflexion ne peut pas être de simplement se référer à une nature sauvage passée ou idéalisée comme objectif de l'action publique. Il faut plutôt y accepter la cohabitation de plusieurs natures, parfois celle modifiée par un usage auquel les humains expriment de l'attachement ou du besoin, parfois celle plus spontanée des forces biophysiques laissées à elles-mêmes là où il y a peu d'usages et peu d'humains. Les critères de décision n'y sont pas un seul état de naturalité  posé comme la seule norme possible, mais plutôt l'équilibre (changeant) entre attentes sociales et réalités naturelles, avec nécessairement des priorités à définir du coté de l'écologie — par exemple, préserver assez d'eau pour le vivant aquatique, viser la protection d'espèces rares et endémiques si elles sont encore présentes. 

Poser que la nature sauvage sans humain est le seul idéal de nature et que l'écart à cette situation est forcément à lire comme un échec a peu de chance de réunir un consensus très large chez des citoyens correctement informés et de mener à des réactions pacifiques chez les humains appelés à être exclus de la belle vitrine sauvage voulue par ses concepteurs. L'histoire de la conservation de biodiversté par création de zones d'exclusion sauvages a d'ailleurs été parsemée de conflits et de négation des droits humains (voir Blanc 2020). Nous devrions discuter démocratiquement de ces sujets, au lieu de juxtaposer des vues contradictoires et des arguments d'autorité, sans aller au fond des réflexions, des désaccords et des contradictions. L'écologie étant désormais une politique publique, elle doit nourrir des débats publics sur les différentes manières de l'envisager.

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