02/02/2021

Les parlementaires s'inquiètent de la préservation du patrimoine hydraulique, le ministère de l'écologie les égare

La destruction du patrimoine hydraulique des moulins, des étangs et des barrages continue de susciter l'indignation ou l'inquiétude des élus des citoyens, qui ne comprennent pas pourquoi l'argent public est dépensé à cette fin. Le sénateur Darnaud s'en alarmait l'été dernier après bien d'autres, face notamment à des rivières à sec qui n'ont plus aucune continuité. La réponse faite par le ministère de l'écologie est hélas à nouveau dilatoire. Nous appelons donc plus que jamais nos parlementaires à clarifier le statut de protection des ouvrages hydrauliques et de leurs milieux à l'occasion de la prochaine loi Climat et résilience, mais surtout à mobiliser ces ouvrages au service de la transition écologique. 


Question écrite n° 17475 de Mathieu Darnaud (Ardèche - Les Républicains), publiée dans le JO Sénat du 30/07/2020 - page 3369 :

"M. Mathieu Darnaud attire l’attention de Mme la ministre de la transition écologique au sujet des inquiétudes exprimées sur la menace planant sur le patrimoine hydraulique de la France.

Il rappelle que l’article L. 214-17 du code de l’environnement dispose que l’entretien des ouvrages hydrauliques se fait en concertation avec les propriétaires ou exploitants.

Malgré cela on constate aujourd’hui de nombreuses destructions d’ouvrages tels moulins, barrages ou canaux. Ces dernières sont effectuées sans réelle réflexion sur l’importance patrimoniale de ces ouvrages, leur utilité économique et le rôle qu’ils jouent dans le maintien de la biodiversité, leur disparition provoquant dans certains territoires un assèchement des milieux aquatiques et humides.

Il demande donc si le Gouvernement entend prendre des mesures comme un moratoire sur la destruction de ces ouvrages, et s’il entend s’engager sur une politique générale de valorisation du patrimoine hydraulique de la France, aujourd’hui menacé."

Voici nos commentaires sur la réponse du ministère
"Face au double défi de l’effondrement de la biodiversité et d’un maintien de la qualité de l’eau, la restauration de la continuité écologique est une politique importante pour l’atteinte du bon état des cours d’eau et pour respecter nos engagements à préserver la biodiversité d’eau douce."
Il n'existe à ce jour aucune démonstration claire d'un lien entre d'une part la présence d'ouvrages sur une rivière, en particulier les ouvrages anciens majoritaires (moulins, forges, etc.), d'autre part le bon état écologique et chimique au sens de la directive cadre européenne sur l'eau. De nombreuses rivières de têtes de bassin ont des moulins et des étangs, pourtant elles sont aussi classées en bon état ou très bon état au titre de la DCE. De nombreux poissons migrateurs étaient encore présents sur un large linéaire de cours d'eau en 1850, pourtant quasiment tous les ouvrages de moulins et beaucoup d'ouvrages d'étangs en lit mineur étaient déjà là (voir Merg et al 2020). Les causes du déclin du vivant ne sont donc pas là. D'autres rivières ont vu leurs ouvrages disparaître, pourtant elles sont toujours déclassées en état mauvais ou moyen au titre de la DCE, pour d'autres raisons (souvent les pollutions, parfois les altérations hydrologiques). Des travaux de recherche ont par ailleurs montré que des hydrosystèmes artificiels car nés d'ouvrages humains peuvent abriter des espèces menacées d'extinction : le vivant ne se demande pas si une retenue et un bras en eau sont d'origine humaine ou naturelle dès lors qu'il peut s'y installer. La notion de continuité écologique est donc ici avancée comme un principe général de bon état écologique alors que dans la réalité, il convient d'évaluer au cas par cas les fonctionnalités et les biodiversités des cours d'eau et des plans d'eau, mais aussi de se demander quel type de nature nous voulons comme cadre de vie (voir ce dossier complet sur le sujet).

Ce que ne dit pas non plus le ministère : la continuité écologique en long concerne avant tout, depuis 150 ans de législation, quelques espèces de poissons migrateurs. L'intérêt très soutenu pour ces poissons, loin d'être les seules espèces menacées ou les seules espèces d'intérêt pour la société et pour les milieux, s'explique davantage par l'existence d'un public de pêcheurs que par un raisonnement de priorisation écologique. Les demandes sociales sont toutes légitimes, mais le législateur doit comprendre pourquoi on fait beaucoup de choses sur certains sujets et s'interroger sur la proportionnalité de cet engagement. Les budgets de l'écologie ne sont pas extensibles à l'infini, des phénomènes comme la disparition de 80% des zones humides depuis un siècle sont eux aussi très alarmants pour la diversité des milieux et des espèces, ainsi que pour le cycle de l'eau et la recharge locale des nappes. De plus, au sein des poissons migrateurs, certains sont réellement menacés d'extinction et demandent des efforts conséquents de sauvegarde, d'autres sont plus communs et ne devraient pas faire l'objet de mesures disproportionnées (on pense à de nombreux chantiers se justifiant par la truite fario, souvent sans que ce soit autre chose qu'une volonté de maximiser son abondance locale de frayères, en vue de la pêcher in fine, et sans démonstration que la truite a localement reculé du fait des ouvrages que l'on détruit). 
"L’importance de cette politique de restauration de la continuité écologique des cours d’eau a été réaffirmée en France par les Assises de l’eau en juin 2019 et le plan biodiversité qui prévoit de restaurer la continuité sur 50 000 km de cours d’eau d’ici à 2030. La stratégie biodiversité 2020 de la Commission européenne en fait également un enjeu majeur, elle inclut un objectif de restauration de 25 000 km de cours d’eau d’ici 2030."
Nous avons ici un cas flagrant de surtransposition française des choix européens: l'Union s'engage à assurer la continuité de 25.000 km en 10 ans sur l'ensemble du territoire européen, la France seule entend le faire sur 50.000 km et sur son seul territoire, en 5 ans (le délai de la loi). C'est un manque de réalisme : l'action publique française est incapable d'avoir les ambitions de ses moyens. Il en résulte la confusion observée, de grandes promesses, de fortes contraintes, mais pas assez de moyens financiers et humains pour les réaliser et les accompagner.
"La mise en œuvre de cette politique sur le terrain est toutefois délicate car elle doit être conciliée avec le déploiement des énergies renouvelables dont fait partie l’hydroélectricité, la préservation du patrimoine culturel et historique, ou encore le maintien d’activités sportives en eaux vives participant au développement de nos territoires."
Le problème de la mise en oeuvre "délicate" de la continuité écologique est très simple : depuis dix ans, la direction eau et biodiversité du ministère de l'écologie a indiqué à son administration (agence de l'eau, DREAL de bassin, DDT-M, office de la biodiversité ex Onema) que la solution privilégiée devait être la destruction des ouvrages. Ce choix, allant très au-delà de ce que dit la loi, vise la "renaturation" (en fait l'idéal de retour de la rivière "sauvage") et il n'est donc pas compatible avec les autres enjeux : hydro-électricité, patrimoine bâti et paysager, maintien de la ressource en eau (effet de retenue et diffusion de l'eau en sol et nappe), maintien des habitats aquatiques et humides d'origine humaine (retenues, biefs) qui forment de nouveaux biotopes depuis longtemps. 

Il existe d'autres solutions que la destruction : gestion des vannes, passes à poisson rustiques ou techniques, rivières de contournement. Mais ces solutions, conformes à la loi et conformes aux autres enjeux de l'eau, n'ont pas fait l'objet d'un financement public préférentiel ni d'une instruction administrative favorable. Tant que ce blocage-là persistera, la continuité ne sera pas apaisée. Dès que ce blocage sera levé, dès que l'administration sera donc au service de la préservation des ouvrages dans une logique de modernisation écologique et énergétique, les blocages disparaîtront.
"Par ailleurs, des difficultés persistent, par exemple en terme de financement de certaines solutions techniques d’intervention sur les ouvrages, points sur lesquels le ministère continue de travailler."
Le ministère n'a pas besoin de "travailler" beaucoup : il suffit que ses représentants au sein des agences de bassin, qui sont les primo-rédacteurs des SDAGE, engagent  les financements publics à 80-100% dans les solutions douces et non destructrices de continuité. Ce n'est toujours pas le cas aujourd'hui dans les plus grands bassins (voir cet article), les associations y sont en contentieux contre la "prime à la casse" mise en avant par des fonctionnaires (et quelques lobbies) poursuivant leur propre programme de renaturation non prévue dans la loi. 
"Répondant aux objectifs du Gouvernement de simplification administrative, et demandée par les collectivités gestionnaires des cours d’eau et milieux humides, la rubrique 3.3.5.0 relative aux travaux de restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques exclusivement soumise à déclaration au titre de la loi sur l’eau, créée par le décret n° 2020-828 du 30 juin 2020, vise principalement à faciliter la réalisation de travaux qui vont dans le sens d’un meilleur fonctionnement des écosystèmes naturels et de l’atteinte des objectifs de la directive cadre sur l’eau. Cette simplification ne met pas en péril le patrimoine et ne remet pas en cause le droit de propriété des riverains (droit à valeur constitutionnelle, qui n’est en rien modifié par les textes précités et demeure préservé par les mêmes dispositions qu’auparavant)."
Le ministère de l'écologie atteint ici un niveau orwellien de manipulation du langage. Le décret scélérat du 30 juin 2020 a pour but explicite de simplifier la destruction du patrimoine hydraulique en en faisant une simple déclaration sans enquête publique ni étude d'impact approfondie. Comment peut-on dire que cela ne "met pas en péril" un patrimoine quand le but affiché est d'accélérer sa disparition? 

Des associations dont Hydrauxois ont demandé l'annulation de ce décret au conseil d'Etat, mais aussi de plusieurs autres textes du ministère de l'écologie  depuis 2019 qui indiquent tout le contraire de la volonté d'apaisement affichée dans la novlangue ministérielle. Le gouvernement et son administration doivent arrêter de tordre les faits et de travestir les réalités : les citoyens sont désormais bien informés et pointent immédiatement ces manoeuvres.
"Dans la grande majorité des cas, la solution technique trouvée a consisté à aménager l’ouvrage (mise en place d’une passe à poisson, d’une rivière de contournement, abaissement du seuil…), sans qu’il n’y ait suppression du barrage ou du seuil."
En l'état de nos connaissances, cette assertion est mensongère. La seule source publique ayant essayé d'estimer la nature des chantiers de continuité écologique est le rapport d'audit du CGEDD 2016. Dans ce document, les rapporteurs indiquent que les bassins ayant le plus classé de cours d'eau sont aussi ceux où l'on observe le plus grand taux de destruction : 75% en Seine-Normandie, 74% en Artois-Picardie, 58% en Loire-Bretagne, 52% en Rhin-Meuse. Cela ne correspond nullement à la "grande majorité" des chantiers respectant les ouvrages, c'est exactement l'inverse.

Conclusion : les parlementaires sont de nouveaux égarés par la réponse de la ministre de l'écologie préparée par la direction eau et biodiversité. Une administration qui tient de tels discours est une administration dont l'action ne sera pas respectée, ce qui malheureusement n'est pas propre à l'eau en France. Nous appelons les parlementaires à restaurer la rigueur et la sincérité dans l'expression de l'Etat, à jouer pleinement leur rôle de contrôle de l'action publique et à supprimer dans la loi toute ambiguïté sur le désir de préserver le patrimoine hydraulique français. La continuité en long doit désormais être conforme à la diversité des attentes des citoyens et adaptée à tous les besoins de la transition écologique en cours.

29/01/2021

Les écrevisses signal changent rapidement les écosystèmes d'eau douce (Galib et al 2021)

En étudiant 18 cours d'eau du nord de l'Angleterre avec des données de long terme, trois chercheurs observent que l'écrevisse signal est associée à des variations significatives des poissons benthiques, des salmonidés et des invertébrés. Une espèce de chabot semble avoir totalement disparu des rivières concernées par l'invasion. L'étude menée avec des cas contrôles montre que ni les variations d'habitat ni les évolutions de pollution n'expliquent les effets observés, qui sont donc rapportés à la présence ou à l'absence de l'espèce invasive. Les premières années d'invasion touchent les invertébrés, surtout les moins mobiles, puis un effet sur les poissons est observé après 7-8 ans. Les espèces invasives ne sont pourtant pas intégrées dans la mise en oeuvre de la directive cadre sur l'eau comme facteur causal d'évolution des marqueurs biologiques des cours d'eau. 


L'écrevisse signal, dite aussi écrevisse de Californie ou écrevisse du Pacifique. Photo par  Astacoides, CC BY-SA 3.0.

Parmi les causes du déclin de la biodiversité endémique dans le monde, l'invasion biologique joue un rôle notable. Les espèces non indigènes entraînent une modification de la structure et du fonctionnement de l'écosystème récepteur. Les écrevisses sont considérées de ce point de vue comme une menace majeure pour les communautés endémique dans les habitats d'eau douce du monde entier: elles sont de grande taille, plutôt à longue durée de vie, omnivores (invertébrés, macrophytes, périphytes, détritus, poissons, autres écrevisses). Les écrevisses sont mêmes considérées par certains chercheurs comme des ingénieurs des écosystèmes, du fait de leur rôle dans la modification des taux de traitement détritique et des densités de certaines plantes.

L'écrevisse signal (Pacifastacus leniusculus, Dana) est l'une de ces écrevisses envahissantes les plus répandues. Elle présente toutes les qualités requises pour un grand succès de colonisation: large tolérance physiologique et écologique, forte propension à la dispersion, croissance rapide, maturation précoce et  grande fécondité. Leur effet exact reste mal connu. Par exemple, à ce jour, aucune étude n'avait mesuré la relation entre les salmonidés jeunes de l'année (YoY) et l'écrevisse signal à l'état sauvage. 

Shams M. Galib et ses collègues ont mené une étude à la méthodologie soigneuse sur le rôle de l'écrevisse signal dans l'écosystème de tête de bassin (zone à truite) d'un fleuve côtier du nord de l'Angleterre, la Tees (située dans la chaîne montagneuse des Pennines). 

Voici la synthèse de leurs observations : 

"1. Les impacts de l'écrevisse signal invasive Pacifastacus leniusculus sur les espèces et les écosystèmes locaux sont largement reconnus, mais principalement à travers des études à petite échelle et des expériences en laboratoire qui ne reflètent pas toujours les impacts dans la nature. Les effets enregistrés de l'écrevisse signal sur les populations de poissons sont équivoques. Dans cette étude, utilisant les approches avant–après/contrôle–impact et contrôle-impact, les effets de l'invasion de l'écrevisse signal sur les poissons endémiques, en particulier les poissons benthiques et les salmonidés jeunes de l'année, et les communautés de macro-invertébrés, ont été déterminé à plusieurs échelles spatiales et temporelles au moyen de trois éléments d'étude corrélés (S1 – S3), dans les cours d'eau des têtes du bassin de la rivière Tees, en Angleterre.

2. En S1, nous avons échantillonné les poissons et les macro-invertébrés benthiques de 18 cours d'eau de la même manière en 2011 et 2018. Ces cours d'eau ont été classés en deux groupes: (1) non envahis (sans écrevisses signal dans les deux années d'échantillonnage; n = 7); et (2) les cours d'eau envahis (avec l'écrevisse signal), comprenant des cours d'eau pré-envahis (envahis avant 2011; n = 8) et nouvellement envahis (envahis entre 2011 et 2018, n = 3). Malgré des conditions d'habitat similaires les deux années (toutes les variables p> 0,05), les communautés de poissons et de macroinvertébrés ont changé au fil du temps dans les cours d'eau pré-envahis et par comparaison avec les cours d'eau non envahis. Un déclin de l'abondance des poissons benthiques et des salmonidés jeunes a été observé dans les cours d'eau pré-envahis et nouvellement envahis. La disparition complète du chabot fluviatile Cottus perifretum suite à l'invasion de l'écrevisse signal a été enregistrée dans deux cours d'eau pré-envahis.

3. Dans la deuxième étude, S2, nous avons évalué les différences intra-cours d'eau chez les poissons et les macroinvertébrés dans deux cours d'eau Tees en comparant des sections avec des écrevisses signal (envahies) et sans (non envahies). Par rapport aux sections non envahies, la richesse taxonomique et l'abondance des poissons et des macroinvertébrés étaient significativement plus faibles dans les sections envahies, et l'ensemble des communautés différaient également de manière significative.

4. En S3, des données à long terme (depuis 1990) de la qualité de l'eau et des macro-invertébrés de six cours d'eau Tees comprenant ceux envahis par les écrevisses signal (n = 3) et non envahies (n = 3) ont été analysées. La qualité de l'eau a montré peu de changement, ou une amélioration, au fil du temps, mais des changements importants dans la richesse taxinomique des macro-invertébrés et la structure de la communauté se sont produits après l'invasion des écrevisses. Les changements à long terme dans les communautés de macro-invertébrés dans les cours d'eau envahis étaient généralement dus au déclin des taxons plus sédentaires tels que les mollusques et les trichoptères à fourreau.

5. Une perturbation écologique généralisée et à long terme se produit en raison de l'invasion d'écrevisses signal dans les cours d'eau des hautes terres du bassin versant de Tees qui peut conduire à une disparition complète de certaines espèces de poissons benthiques, ainsi qu'à une réduction des densités de salmonidés jeunes et à un déplacement vers communautés de macro-invertébrés moins diversifiées, dominées par des taxons plus mobiles et résistants aux écrevisses."

Discussion
Plus les données de terrain s'accumulent, plus il est manifeste que les écosystèmes aquatiques peuvent changer sur des périodes de temps assez courtes, et pour des causes diverses. L'idée qu'il existe une stabilité de ces écosystèmes à l'équilibre était le paradigme encore dominant de l'écologie dans la seconde moitié du 20e siècle. Mais l'accumulation des preuves suggère qu'il faut plutôt y voir un manque de données de qualité à l'époque, ayant mené à des modèles qui sous-estimaient la dynamique des milieux. De surcroît, les pressions de l'Anthropocène se sont accélérées à partir des années 1940-1950 (voir Steffen et al 2015), donc le rythme d'évolution du vivant se modifie également.

Cette étude sur l'écrevisse signal souligne un point intéressant : des critères biologiques (invertébrés, poisons) peuvent changer sans que les paramètres pris en compte par la directive cadre européenne sur l'eau (habitat, pollution) soient concernés. Or, cette directive forme l'outil règlementaire à la base des métriques de qualité des rivières et plans d'eau, des analyses pression-impact et des choix d'action des gestionnaires. Il n'existe par exemple aucune mesure standardisée du taux de colonisation et invasion biologique des cours d'eau par des espèces non endémiques — non seulement pour les écrevisses, mais pour les nombreuses espèces qui circulent désormais, des microbes aux mammifères en passant par les plantes. On voit la difficulté de faire coïncider des approches technocratiques qui figent la connaissance à un instant donné avec la réalité du progrès rapide des observations et des connaissances.

Référence : Galib SM et l (2021), Strong impacts of signal crayfish invasion on upland stream fish and invertebrate communities, Freshwater Biology, 66, 2, 223-240

26/01/2021

La destruction des ouvrages et l'écologie du sauvage, un hold-up démocratique sur les rivières

L'écologie est à la mode... mais de quelle écologie parle-t-on au juste? Dans une tribune publiée sur le site The Conversation, le chercheur Raphaël Mathevet souligne qu'il existe aujourd'hui des représentations différentes de la nature, donc des aspirations et des horizons différents pour l'écologie. Il discerne 4 écologies possibles pour l'Anthropocène. Son analyse permet de comprendre que la destruction des ouvrages hydrauliques avec idéal de libre écoulement de la rivière non entravée par les humains répond à une "écologie du sauvage". Petit problème : jamais les élus des citoyens au parlement n'ont validé une telle définition de l'écologie comme inspiration de la politique publique de la nature. Et ce sont des instances non élues qui ont instillé ces idées dans des textes normatifs opposables aux citoyens. Non sans attirer une réaction immédiate de la société, les riverains ne partageant pas tous ces vues, loin de là. Quand va-t-on avoir des débats démocratiques de fond sur les politiques de la nature? 


Si tout le monde parle aujourd'hui d'écologie, cela ne signifie pas que cette notion est bien comprise, encore moins qu'elle est problématisée avec une certaine distance critique. Cela ne signifie pas non plus que cette notion renvoie aux mêmes idées de la nature ni aux mêmes préférences. On le voit couramment dans les débats entre citoyens. Pour certains, il est écologique d'édifier des éoliennes et des barrages car cela aide à prévenir le réchauffement climatique, premier problème de ce siècle pour l'environnement et la société. Pour d'autres, ces dispositifs nuisent aux oiseaux, aux chauve-souris et aux poissons, donc malgré leur bilan carbone, ils ne sont pas écologiques. Dans un cas, on s'inquiète de l'altération des conditions thermiques et hydrologiques de la planète, dans l'autre des artificialisations des milieux locaux et des pressions sur les espèces. 

Même si l'on en reste à la "protection de la nature" qui est le sens premier de l'écologie politique et philosophique, les choses ne sont pas évidentes. Les espèces d'un lac artificiel de barrage ont-elles plus ou moins de valeur que celles de la rivière au même emplacement si le lac n'existait pas? Un bief ou un étang créé pour un usage humain doit-il être vu comme milieu aquatique à part entière? Ne pas altérer la nature cela signifie-t-il confiner l'humain dans des espaces restreints et laisser le reste à la vie sauvage? Raphaël Mathevet (CNRS CEFE, Université de Montpellier) vient de rappeler cette complexité dans une tribune du site The Conversation. 

Le chercheur discerne des "lignes de partage" permettant de comprendre les différentes formes d'écologie. La première est de savoir s'il faut intégrer ou non l'humain dans la nature, "entre d’un côté les approches de la conservation qui s’inscrivent dans l’opposition entre nature et culture et celles qui cherchent à dépasser ce dualisme". La seconde ligne de partage s'intéresse au modèle économique moderne, que l'on peut qualifier de productiviste ou extractiviste, dans ses différentes variantes, avec "d’une part les approches qui s’inscrivent dans le modèle économique dominant ou dans sa réforme et celles qui cherchent à le transformer radicalement". Il en résulte notamment que la politique du vivant ne sera pas la même dans ses orientations, entre ceux qui veulent avant tout laisser la nature à elle-même et ceux qui veulent orienter la nature selon des états désirables  : "les régimes de gestion des espèces et des écosystèmes qui découlent de cette grille de lecture se développent le long d’un axe dont les deux pôles sont la libre évolution contre le contrôle de la nature".

Les 4 écologies de l'Anthropocène
Au final, Raphaël Mathevet propose quatre écologies de l'Anthropocène.

L’écologie de l’obstination : "L’écologie de l’obstination s’est entêtée depuis longtemps à préserver des écosystèmes et paysages à forte naturalité ainsi que des espèces sauvages emblématiques. Elle repose souvent sur une gestion qui cherche à protéger une nature généralement idéalisée, quitte à intervenir fortement par des réintroductions et des régulations d’espèces ou le contrôle de processus comme les feux ou les inondations. (...) Cette écologie cherche à défendre une nature sauvage en excluant autant que possible les activités humaines extractives et ne remet pas en cause le modèle économique dominant."

L’écologie de la réconciliation : "Courant devenu majoritaire dans les années 1990, l’écologie de la (ré)conciliation milite pour des aires protégées où les humains sont impliqués dans des approches participatives de conservation intégrée aux actions d’exploitation des ressources naturelles et de développement. Si elle se résout à accepter le modèle économique dominant, elle porte des modes de gestion adaptés au contexte local ainsi que des politiques réformistes et contractuelles qui invitent à prendre soin ou du moins faire bon usage de la nature."

L’écologie du renoncement : "l’écologie que nous qualifions d’écologie du renoncement – parce qu’elle a renoncé au dualisme entre nature et culture et à l’autonomie du vivant –, considère que les humains ont définitivement bouleversé le fonctionnement des écosystèmes. Selon cette posture, la biosphère est désormais une mosaïque de jardins plus ou moins ensauvagés et riches en promesses évolutives. Les humains peuvent aménager ces natures hybrides pour les rendre désirables et/ou plus productives."

L’écologie du sauvage : "Enfin, plus récente, l’écologie du sauvage cherche au contraire à promouvoir l’idée que la nature n’a pas besoin des humains. Les activités humaines doivent protéger ou coopérer avec le monde vivant, en laissant s’exprimer les forces autonomes et évolutives qui l’animent. Elle promeut l’idée que les processus devraient être en libre évolution sur les plus vastes espaces possible, peu importe leur naturalité initiale. Cette écologie transformative rejette souvent la structure de base du productivisme extractif au profit de systèmes collaboratifs et sobres."

L'écologie sauvage inspire la logique de destruction des ouvrages des rivières
Cette typologie est intéressante et permet de comprendre que sous le label "écologie" co-existent en réalité des représentations très diverses de la nature, du rapport de l'humain à la nature ou de l'évolution désirable de la nature.

On constate que l'idéologie de continuité écologique des rivières telle qu'elle est défendue en France par une partie de l'administration, des écologistes et des pêcheurs s'inscrit plutôt dans l'écologie du sauvage. En affirmant que la prime doit être accordée à la destruction des sites, cette idéologie révèle ses convictions profondes. Son horizon est de supprimer tous les obstacles à l'évolution autonome d'une rivière et de ses espèces, mais aussi de condamner toute intervention corrective ou extractive sur la rivière. Le cours d'eau idéal de ce point de vue serait le cours d'eau qui a été séparé des humains, qui disposerait d'un "espace de liberté" où la priorité doit être accordée au non-humain. L'idée que le cours d'eau transformé au fil de l'histoire par les ouvrages humains forme une nouvelle réalité biophysique, un nouvel écosystème, est aux antipodes de cette représentation écologique particulière. Pourtant, c'est une idée défendable par d'autres visions de l'écologie. 

Cette écologie du sauvage appliquée aux rivières ne vient pas de manière spontanée. Elle est inscrite dans des textes règlementaires, dans des méthodes d'instruction administrative, dans des métriques reconnues comme valides par l'Etat et dans des choix de subvention publique permettant d'orienter les acteurs vers certaines issues. Elle est donc politique ou idéologique: ce n'est pas "la science" ou "la nature" qui s'exprime en soi, c'est un certain choix de certains humains sur ce que doit être la rivière. 

Cela pose évidemment des questions démocratiques : comment se fait-il que cette représentation particulière de l'écologie du sauvage a pris un tel poids, sans aucun débat au parlement à ce sujet — et même, dans le cas des ouvrages hydrauliques, avec des débats au parlement ayant clairement indiqué que les élus des citoyens ne sont pas du tout sur cette ligne assez radicale? D'où vient que des personnels non élus d'administrations ont une capacité à instiller des choix normatifs lourds dans des textes règlementaires opposables, en échappant largement au contrôle démocratique? Pourquoi les représentants élus des citoyens, au lieu de simplement ajouter une touche "verte" à leur discours, ne proposent-ils pas davantage de réflexions de fond sur ces sujets, mais aussi des alternatives politiques?

A lire : Raphaël Mathevet, Les 4 écologies de l'Anthropocène, The Conversation, 13 janvier 2021 

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24/01/2021

Mobilisez vos députés et sénateurs pour inscrire les moulins et barrages dans la loi Climat et résilience

Après les travaux de la Convention citoyenne pour le climat, les parlementaires vont examiner dès le mois prochain une loi "Climat et résilience". Or, dans le même temps, l'administration de l'eau en plein dérive manipule les élus sur la continuité soi-disant "apaisée", détruit des ouvrages hydro-électriques, entrave le ré-équipement des moulins,  assèche des retenues et des biefs. Cette bureaucratie ne sert plus l'avenir du pays, mais une idéologie folle de la nature sauvage, en décalage complet de nos urgences et de nos attentes. Particuliers, associations, syndicats : nous demandons à tout le mouvement des ouvrages hydrauliques et de leurs patrimoines de saisir le député et le sénateur de leur circonscription afin de les sensibiliser à la nécessité d'inscrire dans la loi la promotion des moulins, étangs, lacs et canaux au service de la transition écologique.

Le Canard enchaîné a de nouveau révélé dans son édition de la semaine dernière les dérives de l'administration française de l'eau, engagée dans la destruction massive du patrimoine hydraulique et du potentiel hydro-électrique français. Parmi les innombrables scandales que notre site dénonce depuis 10 ans, le Canard rappelle la dernière prouesse en date de l'agence de l'eau Seine-Normandie : achat pour 1,25 million € de la centrale de Pont-Audemer en vue de la détruire et d'araser son barrage pour 4,7 millions € supplémentaires. L'argent public dilapidé, la production locale d'énergie propre démantelée...


En pleine transition énergétique, les fonctionnaires de l'eau font pression sur les élus pour détruire des outils de production bas-carbone parfaitement intégrés depuis des décennies et souvent des siècles. C'est révoltant. D'autant que ce cas n'en est qu'un parmi mille autres: partout on décourage à relancer l'électricité des moulins, partout on fait disparaître les ouvrages hydrauliques.

Dans le même temps, l'Etat français est assigné en justice par des associations en raison de sa carence fautive dans l'action climatique (Affaire du siècle). La presse nous apprend qu'en ce début d'année, le rapporteur public du tribunal de Paris a demandé de reconnaître la responsabilité de l'Etat dans cette carence. Et nous le savons bien sur la cause qui nous préoccupe: des centaines de millions € sont dépensés chaque année à empêcher l'équipement bas-carbone voire à détruire le patrimoine des rivières françaises! On marche sur la tête.

L'indignation ne suffit pas : il faut maintenant agir pour stopper la dérive bureaucratique d'une pseudo-écologie sectaire et pour engager la France dans les vrais enjeux écologiques de ce siècle.

Il se trouve que le gouvernement vient de présenter le projet de loi "Climat et résilience", issu des travaux de la convention citoyenne pour le climat. 

Chaque association, chaque syndicat, chaque riverain doit saisir directement son député et son sénateur, avec ses mots, pour le sensibiliser au scandale de la destruction des moulins et barrages, en exigeant au contraire des évolutions du droit pour les protéger des casseurs et pour les équiper au service de la transition énergétique. 

Nous rappelons les grands principes à défendre qui devraient être inscrits dans le droit:
  • les retenues, plans d’eau, lacs, étangs, canaux biefs, apportent des services écosystémiques aujourd’hui indispensables. Les ouvrages assurent préservation de l’eau à l’étiage, régulation de crue, dépollution locale par épuration, réservoir de biodiversité, puits carbone, agrément paysager, énergie bas-carbone, alimentation des nappes et zones humides. Il en résulte que les hydrosystèmes d'origine humaine doivent être protégés par le droit de l'environnement, en particulier au vu de leur menace de destruction et assèchement.
  • l'équipement hydro-électrique de moulins présents sur les cours d'eau jouit d'une forte popularité en particulier dans les communes rurales qui comportent souvent plusieurs sites potentiels et chez des particuliers pouvant développer de l’autoconsommation ou des contrats de petites injections à moins de 36 KVA. La recherche scientifique a montré l'existence de plusieurs dizaines de milliers de sites équipables en France, représentant l'équivalent d'une tranche nucléaire, ou de tout l'éclairage public du pays. Cette énergie bas-carbone et locale apporte une contribution non négligeable à la transition énergétique : elle doit être simplifiée, accélérée et encouragée par les pouvoirs publics, au lieu d'être freinée voire combattue comme aujourd'hui. 
Le projet de loi va être examiné par le parlement à compter de février. Nous demandons à tout le mouvement des ouvrages hydrauliques de faire entendre auprès de leur député et de leur sénateur la voix des riverains et l'urgence à mobiliser par la loi les moulins, étangs, barrages dans la transition écologique. 

L'avenir de nos rivières et de leurs patrimoines passe par la mobilisation de chacun. C'est à vous de jouer pour que la loi protège notre avenir commun.

Des dossiers pour affiner vos argumentaires et diffuser aux élus

19/01/2021

Controverse sur le déclin des insectes aquatiques

Une publication dans la revue Science analysant 166 travaux dans le monde trouve que les insectes aquatiques, loin de décliner, sont plutôt en augmentation. Mais cette méta-analyse est contestée dans sa méthode par d'autres chercheurs. En France, des travaux avaient aussi montré une hausse de la diversité des invertébrés des rivières depuis 25 ans. Ces querelles de chiffres montrent que les experts ne sont pas encore d'accord entre eux, donc que l'écologie comme science doit stabiliser certaines de ses méthodes et certains de ses résultats. Au-delà, il s'agit aussi de savoir ce que l'on mesure. Si l'on pose qu'il y a des bons et des mauvais milieux selon qu'ils sont naturels ou artificiels, qu'il y a de bonnes et mauvaises espèces selon qu'elles sont endémiques ou exotiques, alors on tend à mélanger un peu la science de la nature et l'opinion sur la nature, les jugements de fait et les jugements de valeur. Et on oublie que les citoyens sont attachés à des expériences personnelles et sociales de la nature qui ne sont pas forcément une "naturalité" idéale ou originelle telle qu'elle est vue par certains scientifiques.  

Ephémère Rhithrogena germanica, photographie par Richard Bartz, Creative Commons.

Le journal Le Monde (édition en ligne du 18/01/2021) signale une controverse entre chercheurs sur le taux de déclin des insectes. 

Dans une méta-analyse publiée dans la revue de référence Science, Roel van Klink et Jonathan Chase (Centre allemand pour la recherche intégrative sur la biodiversité, à Leipzig) ont repris 166 études sur l'évolution des invertébrés dans le monde, à travers 1676 sites (Van Klink et al 2020). Ils concluent qu'il existe un déclin d'environ 9% par décennie des insectes terrestres, mais une augmentation des insectes aquatiques d'environ 11% par décennie.

Ces chiffres sont très en deçà des baisses d'insectes terrestres de 80% rapportées dans les médias à l'occasion de certaines études locales. Mais surtout, ils surprennent pour les insectes aquatiques, montrant une hausse.

Dans l'article du Monde, d'autres chercheurs expriment leur scepticisme. Marion Desquilbet (Inrae) fait observer : "Un problème fondamental est qu’un tiers des 166 études vise en réalité à évaluer l’effet d’une perturbation spécifique sur un milieu donné. Par exemple, lorsque vous créez des mares artificielles et que vous observez leur colonisation par des libellules, vous obtenez mécaniquement une tendance à la hausse de leur abondance. C’est la même chose lorsque vous commencez à compter les insectes après un feu de forêt, vous allez observer leur retour, du fait de la fin d’une perturbation ponctuelle. Ou encore, si vous commencez à dénombrer des moustiques après la fin de l’utilisation d’insecticide… Tout cela ne dit rien de l’évolution de l’abondance générale des insectes dans l’environnement !".

Ce point nous paraît discutable, du moins tel qu'il est formulé dans la restitution du journaliste. Si les humains créent des milieux artificiels comme des mares, des réservoirs, des lacs, des canaux, et si les chercheurs observent que ces milieux font l'objet d'une colonisation par des invertébrés aquatiques, il n'y a aucune raison de considérer que ces réalités ne font pas partie de "l'abondance générale des insectes dans l'environnement". Sauf à redéfinir l'écologie comme science des écosystèmes non impactés par l'humain, et non pas science des écosystèmes tout court (allant de milieux très peu impactés par l'Homme à des milieux créés par l'Homme). 

En revanche, l'écologie étant par nature contingente (toujours liée à des milieux différents dans leurs propriétés et leurs histoires), on peut légitimement douter de la valeur très informative d'une synthèse par méta-analyse de lieux très différents. Cela signifie aussi qu'il ne faut pas faire de généralités, mais d'abord constituer de nombreuses bases de données sur les espèces et les milieux, ensuite observer au sein de ces bases ce qui baisse et ce qui augmente, en essayant de comprendre pourquoi, en agissant s'il y a une demande sociale pour agir. 

En France, les invertébrés aquatiques ont aussi fait l'objet d'une analyse à long terme menée par l'équipe de Yves Souchon, que nous avions recensée (Van Looy et al 2016). Les données d'entrée étaient de bonne qualité, avec des méthodologies constantes sur des points de mesure constants. Les scientifiques y montraient que la richesse taxonomique des macro-invertébrés (comme les insectes) a augmenté de 42% entre 1987 et 2012, sur 91 sites étudiés par des séries longues et homogènes. Une première tendance est liée à la hausse progressive des espèces polluosensibles, ce qui est encourageant. Mais un tournant a eu lieu dans la période 1997-2003, et cette seconde tendance superposée paraît d'origine climatique, avec une hausse de la productivité primaire des rivières et une intensification de la chaîne trophique. 

Pour conclure, ces controverses dans les milieux scientifiques indiquent le besoin de clarifier les attendus, les méthodes et les objectifs quand on analyse la biodiversité. C'est d'autant plus nécessaire que les décideurs entendent accélérer les politiques dédiées à cette biodiversité (cf One Planet Summit de janvier 2021), mais ils ne peuvent le faire que sur des connaissances assez robustes et des orientations dont l'issue est approuvée par les populations. Le cas des milieux aquatiques l'a montré depuis plus de 10 ans : si l'écologie consiste à promouvoir une rivière sauvage sans humain pour retrouver des espèces de jadis tout en niant la présence des espèces installées autour des ouvrages humains, elle rencontre vite l'hostilité des riverains et des usagers, qui ne partagent pas les présupposés sur ce que serait un "bon" milieu aquatique ni sur la hiérarchie des espèces qu'il s'agirait de valoriser ou de dévaloriser.