Des mouvements écologistes locaux protestent contre la construction de cabanons au bord du lac de Montbel en Ariège. Leur argument : cette masse d'eau artificielle née d'un barrage mis en eau en 1984 est le lieu d'une riche biodiversité d'oiseaux et de chauves-souris, de mammifères et d'amphibiens. Cette réalité contredit évidemment le dogme de la nature sauvage selon lequel tout milieu créé par les humains est dégradé, sans intérêt écologique et doit être "renaturé" au plus vite par destruction progressive de tous les "obstacles à l'écoulement". A quand une étude systématique de la faune, de la flore et des services écosystémiques attachés aux ouvrages humains dans les bassins versants?
Le Monde, 6 juin 2021.
Mise en eau en décembre 1984, la retenue de Montbel en Ariège est un lac artificiel, d’une superficie totale de 550 hectares et d'un volume de 60 millions de mètres cubes d’eau. Elle est destinée à l’irrigation agricole et au soutien d’étiage du fleuve Ariège, de son affluent l’Hers et de la Garonne. Cet ouvrage est aussi équipé d’une usine hydroélectrique et d’une base de loisirs.
Si l'on en croit le discours officiel de l'écologie d'Etat ou de celle de certaines ONG, c'est donc une catastrophe : on intercepte et dérive l'eau d'une rivière naturelle, on crée une masse d'eau qui se réchauffe et s'évapore en été, on a dénaturé et dégradé la vie sauvage...
Or, le journal le Monde révèle que la réalité paraît assez loin de cette caricature : les groupes écologistes locaux, loin de demander la destruction du barrage et du lac, sont en conflit avec un promoteur qui propose de construire des cabanons sur ses rives. Le motif du conflit? Cela pourrait déranger la faune qui profite de l'écosystème artificiel.
Voilà ce que dit le journal :
"Les associations de défense de l’environnement sont vent debout contre ce concept touristique présenté comme un « éco-domaine » par Coucoo, l’entreprise porteuse du projet. Laurence Bourgeois, membre du collectif de riverains « A pas de loutre », ouvre les hostilités : « Il y a des zones à protéger. Et ce projet ne correspond pas à l’urgence climatique ni à la protection de la biodiversité. » Gilbert Chaubet, porte-parole du comité écologique ariégeois, enfonce le clou. « Ce projet est de la pure urbanisation. Les cabanes dont disséminées sur 2,5 kilomètres et créent de la nuisance par leur fonctionnement », affirme cet Ariégeois pure souche, qui craint que la lumière et le bruit perturbent les animaux.Car aigrettes garzettes, grandes aigrettes, foulques, grèbes huppés, hérons cendrés et 155 autres espèces viennent se nourrir dans cette zone, se reposer et y nicher en période de nidification. Et, parmi elles, quarante-cinq figurent sur la liste rouge nationale des espèces menacées. La loutre, le triton marbré et la chauve-souris en font partie."
Le journal précise que les entrepreneurs porteurs du projets de cabanons ne sont pas d'accord avec cette lecture:
"«Nous sommes considérés comme des envahisseurs assoiffés d’argent et des bétonniers. C’est dommage, et c’est faux », rétorque Gaspard de Moustier, codirigeant de la société avec Emmanuel de La Bédoyère. L’entrepreneur trentenaire préfère opposer à ses détracteurs des «arguments écologiques et scientifiques», en s’appuyant sur les observations menées par le bureau d’études en écologie Nymphalis. Dans ses conclusions, ce rapport de 150 pages indique que «le projet n’est pas de nature à porter atteinte à l’état de conservation des habitants et des espèces».
Il reste au moins une question à trancher, la présence de la loutre dans la retenue:
"« Existe-t-il, oui ou non, une loutre d’Europe sédentaire [dans cette zone] ? », s’interroge Sylvie Feucher, la préfète de l’Ariège. La société dispose de quatre mois pour faire de nouvelles investigations à l’aide de pièges photographiques."
Une chose est sûre : la diabolisation des ouvrages hydrauliques au prétexte qu'ils créent des milieux artificiels forcément dégradés par rapport aux milieux naturels n'a aucun sens. D'une part, les milieux de ces ouvrages sont progressivement colonisés par le vivant aquatique qui apprécie l'existence d'une masse d'eau (l'opposition nature/humanité est un contresens), d'autre part les services écosystémiques attendus par les sociétés humaines ne se résument pas au niveau de biodiversité endémique.
Les écologistes de Montbel ont l'air d'en être persuadés, puisqu'ils défendent le barrage et sa retenue artificielle : pourquoi n'en parlent-ils pas à leurs collègues qui, partout en France, appellent à la destruction des milieux aquatiques et humides issus des ouvrages hydrauliques?
Merci,
RépondreSupprimerMerci de comparer quand cela vous arrange les retenues de seuil avec les retenues de barrage et de refuser le parallèle quand cela ne vous arrange pas. Merci beaucoup pour toutes ces contradictions. Au final, vous nous aidez quand même.
Nous parlons sur ce site de l'ensemble des ouvrages hydrauliques et de leurs usages. Le fait est que la petite hydraulique est plus souvent concernée, mais ce n'est ni le premier ni le dernier article sur les barrages.
SupprimerLa continuité dite "écologique" ne fait pas de différence dans ses principes entre les ouvrages, comme le montre le triste exemple de la destruction des barrages de la Sélune (et d'autre depuis les années 1990). Vous êtes donc assez mal venu pour pointer un supposé double langage. Mais l'honnêteté intellectuelle est la dernière chose que nous attendons des casseurs d'ouvrages, ayant déjà démontré qu'ils étaient disposés à manipuler massivement pour faire peur aux élus et citoyens sur de soi-disant catastrophes liées aux ouvrages, petits ou grands.
En réalité vous avez échafaudé la théorie de l'existence d'une demande de retour aux rivières du paléolithique que vous avez attribué à un curieux équipage formé de fonctionnaires d’extrême gauche coalisés à une pseudo élite autoproclamée des pêcheurs de salmonidés et à des adeptes de la "deep ecology". Cette construction intellectuelle improbable vous amène à des raisonnements relevant de plus en plus à une pathologie proche de la paranoïa comme le fait de croire que l'intérêt des environnement anthropisés était pas ou insuffisamment reconnus ou que la cause de l'arrêt des grands projets d'hydroélectricité était le fait de ses prétendus opposants. A présent que vous vous êtes vous même enfermé dans ce faisceau d'incohérences vous n'avez pour vous en dégager que la fuite en avant vers des anathèmes et dde diatribes de plus en plus désordonnés... alors que la seule chose qui vous anime au départ est le simple amour des moulins. Pourquoi n'en reviendrez pas là à des choses faciles à expliquer et à comprendre et surtout que vous maitrisez parfaitement plutôt que cette course en avant dans laquelle visiblement vous vous épuisez de façon maintenant pathétique... bon courage !
SupprimerUn beau moment de délire... il y a quelques milliers de travaux universitaires sur la question du naturalisme en épistémologie ou sur celle des nouveaux écosystèmes, nous vous conseillons de les lire. Il y a quelques milliers de techniciens et gestionnaires de rivières, parfois chercheurs, qui pensent effectivement que revenir à une nature "libre" et "sauvage" sans impact humain est un schéma désirable de naturalité, nous vous conseillons de les rencontrer pour écouter et comprendre leur mode de pensée et d'expression, au lieu de nier le réel.
SupprimerToutefois, nous avons cru saisir le message : faites mumuse avec votre moulin dont on va démolir l'hydraulique en prétendant que seul compte le bâtiment, laissez la nature aux technocraties de la nature et à leurs clientèles. Bah non, désolé, cela ne va pas se passer ainsi, c'est précisément la critique des mauvaises appréciations de la nature qui forme un enjeu politique publique et de redéfinition de l'écologie dans cette politique publique, bien au-delà du seul cas des moulins.