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02/06/2017

07/04/2017

Sommes-nous continuo-sceptiques? Réponse au CGEDD

Le rapport intégral du CGEDD sur la continuité écologique contient deux pages de critiques de notre association et de l'OCE. Nous en rappelons ici la teneur et nous y répondons.  La question est assez mineure: le CGEDD a validé nombre des reproches que nous portions à la mise en oeuvre française de la continuité écologique, ce qui est l'essentiel pour poser les termes des réformes nécessaires. En ce qui concerne notre critique des bases scientifiques des choix de continuité en France, le CGEDD n'y répond pas (c'est en dehors de l'objet de son rapport) et fait observer que les principaux concernés n'y répondent pas non plus (ce qui pose question). Sur la soi-disant auto-épuration en lien à la suppression des ouvrages transversaux, nos interlocuteurs commencent à reconnaître très timidement que nous avions raison d'être sceptiques. Sur le reste, nous verrons bien les conclusions de l'expertise scientifique multidisciplinaire faisant partie des recommandations du CGEDD. Nous avons pour notre part entière confiance dans l'avis des chercheurs, à condition que cet avis résulte d'un collège représentatif de la diversité de la recherche et qu'il réponde aux questions essentielles pour les choix publics, sans se contenter de généralités: quel niveau de robustesse de nos résultats actuels de recherche en écologie des milieux aquatiques? Quelle connaissance de la biodiversité au-delà des poissons et des espèces suivies en bio-indication? Quelle importance relative de la continuité longitudinale pour la qualité de l'eau et des milieux par rapport à d'autres impacts sur d'autres compartiments? Quelle place en particulier de la petite hydraulique (non de la grande) dans les impacts? Quelles méthodes de priorisation des interventions? Quelles dimensions non-écologiques à intégrer dans l'approche du sujet? Quelles chances d'atteindre le bon état écologique et chimique 2027 au regard des tendances lourdes observées depuis 30 ans par la recherche? Quelle compatibilité épistémologique entre la démarche DCE par état de référence et le constat de l'évolution dynamique des milieux? Quelles limites observées en Europe et dans le monde sur les chantiers de restauration de rivière? Comment objectiver des services rendus par les écosystèmes avant d'engager l'argent public dans ces restaurations? Nous sommes confiants car aucune expertise digne de ce nom n'ignorera la centaine de travaux que nous avons déjà recensés sur ces sujets et ne passera sous silence les débats bien réels qui animent aujourd'hui la communauté scientifique. N'en déplaise à ceux qui voudraient nourrir les citoyens de certitudes, de slogans ou de mots d'ordre.


Le rapport CGEDD écrit à propos de notre association (pp 59-60 du rapport complet):

Le récent développement d'une interprétation de la littérature scientifique sur la continuité écologique par les opposants eux-mêmes, sans réaction sur le fond par les institutions officielles qui en ont la charge − autres que locales ‒ contribue à accroître la défiance envers la politique conduite. Elle parait à la mission le signe inquiétant d'une nouvelle escalade dans la rupture du dialogue qui caractérise ce dossier.

Cette analyse scientifique est organisée en ligne par les associations de propriétaires de moulins (OCE, Hydrauxois). Celles-ci semblent avoir toute confiance dans leur lecture de ces analyses et en reprennent les messages délivrés auprès de leurs mandants ainsi qu'auprès des élus qui les utilisent à leur tour.

Ce n'est pas la capacité d'analyse des auteurs de ces sites qui est en cause. Mais l'absence de confrontation directe avec les chercheurs et auteurs auxquels sont attribués les résultats et analyses commentés, ainsi que le mode d'expression utilisé, ne permettent ni que soit donnée à ces analyses une forte crédibilité, qu'elle n'acquiert que dans le cercle de leurs mandants, ni que les autorités puissent adhérer aux thèses qu'elles défendent.

En effet, les informations diffusées par ces sites se révèlent à la fois :
sectorielles, vu l'angle restreint sous lequel est abordé la politique de l'eau : celle-ci ne se limite pas à la continuité écologique ni à la problématique des seuils en rivière ;
• partielles, compte tenu de la sélectivité dans le choix des études analysées qui concernent la restauration de la continuité écologique, sans garantie pour le lecteur de leur caractère exhaustif ;
• partiale : l'épisode du commentaire d'une étude de Van Looy (IRSTEA) en 2011 par Hydrauxois et qui s'est renouvelé depuis, est significatif d'un commentaire sorti de son contexte qui a ensuite été repris par les propriétaires puis les élus, faisant finalement dire à une étude ce qu'elle ne démontrait pas et entretenant une idée fausse dans l'opinion ;
• polémique : le ton employé, le mélange sans distinction entre analyse scientifique et commentaire politique au sein des mêmes articles, l'agressivité envers l'État, souvent personnalisée en citant des fonctionnaires qui font pourtant de leur mieux pour exercer la mission assignée à leur structure, ne servent pas nécessairement la cause de ces deux entreprises.

Cette stratégie de controverse permanente contribue à :
• développer une sorte de "continuo-scepticisme", contre lequel l'administration a du mal à s'organiser pour répondre ou pour traiter les questions exprimées qui sont pourtant de véritables sujets de fond,
• affaiblir la légitimité de l'ONEMA auprès des propriétaires de moulins, alors que le rôle d'assurer une véritable veille scientifique sur ces questions revient pleinement à cet établissement public.

Nous apportons ci-dessous quelques réponses de fond. A signaler préalablement : Hydrauxois est née comme un collectif riverain pour défendre un barrage communal et n'est pas, stricto sensu, une association dédiée à la seule défense des propriétaires de moulin (même si cela fait partie de nos activités). Ce point n'échappe à personne en lisant notre site et en suivant nos interventions.

La science, le dialogue et la société
Si les mots ont encore un sens, examiner la littérature scientifique sur la restauration physique de rivière, et en particulier l'impact des ouvrages hydrauliques, relève difficilement d'une "rupture de dialogue" ou d'une "escalade". Il nous arrive de discuter avec des chercheurs et ingénieurs de l'eau (ce que nous ne sommes pas), certains d'entre eux ont rencontré les parlementaires voici quelques mois pour exposer leur propre scepticisme sur divers aspects de la continuité (voir cet article). Nous regrettons que les "institutions officielles" ne précisent pas les points que nous relevons à partir de notre lecture des publications scientifiques ou qu'elles ne souhaitent pas en discuter davantage avec nous. Il ne tient qu'à elles de le faire.

Nous n'étudions pas ces travaux écologiques ou de sciences sociales en vue d'acquérir une "légitimité" (laquelle revient en dernier ressort aux seuls chercheurs pour ce qui est des savoirs positifs, pas aux associations) ni pour faire adopter des conclusions monolithiques à des autorités (auxquelles nous reprochons précisément d'être monolithiques). Nous le faisons plus simplement pour construire et partager nos connaissances sur le sujet, pour informer nos lecteurs et les décideurs de la pluralité de ces travaux, pour nourrir des débats publics sur l'écologie à partir de la seule source que nous considérons comme réellement fiable. Le fait est que les chercheurs ont souvent l'honnêteté de reconnaître, quand ils s'expriment devant leurs pairs et dans les publications légitimes (c'est-à-dire en revues à comité de lecture), que l'écologie de la restauration reste encore aujourd'hui incertaine dans ses attendus et ses méthodes, que l'impact des petits ouvrages hydrauliques est à ce jour peu étudié, que les analyses empiriques et statistiques faites rigoureusement sont rares et donnent des résultats variables, parfois contradictoires, etc. Nous donnons toujours l'ensemble des sources que nous évoquons, nous tenons à disposition les pdf à ceux qui les demandent (dans la limite des droits protégés) : 95 articles parus depuis 2010 ont ainsi été recensés individuellement, près de 130 dans des synthèses sur divers sujets, ainsi que plusieurs thèses doctorales.

Malgré cette activité éditoriale soutenue, nous ne prétendons pas faire un travail d'expertise, ce qui revient aux instances scientifiques compétentes pour cela. En revanche, nous attendons des travaux publiés par des institutions ayant autorité publique (Onema et aujourd'hui AFB, agences de l'eau) qu'ils cessent de passer sous silence certains aspects de cette recherche, ou de considérer que le discours scientifique sur la rivière pourrait naturellement se limiter au monologue des hydrobiologistes d'inspiration conservationniste...

Les chercheurs de l'environnement, tout comme ceux de la santé, du climat, de l'énergie et d'autres sujets importants, ont une responsabilité vis-à-vis de la société qui paie leurs travaux et qui attend leur avis informé. Dans l'exemple du GIEC et de la question climatique, les scientifiques ont réalisé un énorme travail collectif de synthèse pluridisciplinaire des connaissances disponibles, de modélisation, d'estimation rigoureuse des incertitudes, d'avis aux décideurs et aux opinions sur ce que l'on sait mais aussi sur ce que l'on ne sait pas (ce qui est important, car la science sait poser les limites de ses connaissances, donc aussi des actions qui devraient découler des connaissances). Nous trouverions normal que les chercheurs de l'eau, dans les limites d'un budget hélas très contraint, procèdent sinon de la même manière, du moins dans le même esprit. Une première avancée en ce sens a été réalisée avec l'expertise collective sur l'effet cumulé des retenues (Irstea-Inra-Onema 2016): chacun a pu constater combien le ton prudent des conclusions contraste avec un certain discours à l'emporte-pièce, y compris le discours des représentants du ministère de l'Ecologie quand ils parlent de ces retenues à leur administration. Le CGEDD ne devrait-il pas s'émouvoir de ce fossé inquiétant entre la prudence de la science et la certitude de l'administration?

Plus largement, nous souhaitons que le budget dédié à la connaissance (incluant des projets de recherche de laboratoires scientifiques) soit développé au sein des programmes des agences de l'eau et des autres financeurs publics, car l'intervention sur les rivières ne gagne rien à se précipiter dans des chantiers mal préparés, mal conçus, mal suivis. Notre site comporte de nombreux exemples de dépenses publiques aux enjeux tout à fait dérisoires, qui auraient été mieux employées à déjà approfondir nos connaissances (savoir théorique ou expertise approfondie des bassins versants).

Quoiqu'il pense de notre lecture de la continuité écologique, le CGEDD reconnaît la carence des institutions qui auraient dû inviter les scientifiques s'exprimer à son sujet : "Face aux critiques formulées par les détracteurs de cette politique sur "son manque de fondements scientifiques" (voir point 3.5.4 du rapport détaillé), la mission a constaté avec étonnement que la question de la restauration de la continuité écologique n'avait pas fait l'objet de débats au sein des différents conseils scientifiques des comités de bassin lorsqu'ils existent, ni de prises de position spontanées, ni encore de sollicitations par les institutions qui auraient pu les saisir. Il en est de même au niveau national avec le conseil scientifique de l'ONEMA ou le conseil scientifique du patrimoine naturel et de la biodiversité (CSPNB)." C'est donc un aveu : en dehors de quelques monographies de "revue" rédigées par un nombre très limité d'auteurs, ou de rapports Onema qui ne sont pas des analyses critiques de la littérature ni des diagnostics complets des bassins versants, les enjeux de continuité écologique n'ont pas été réellement étudiés par la communauté des chercheurs avant la programmation massive par l'Etat.

Partial et partiel ?
Le CGEDD nous accuse d'être partial et partiel. Mais... comment ne le serions-nous pas à un certain degré, comme le sont la plupart des associations s'exprimant sur le sujet toujours passionné de la rivière, à commencer par les ONG environnementalistes et les acteurs de la pêche, par exemple? Il ne faut pas confondre les registres: une association engagée (dans la promotion du patrimoine, de l'énergie et de l'environnement des rivières pour ce qui nous concerne) n'est pas un laboratoire de recherche, ni un établissement public ni un bureau d'étude. Au moins sommes-nous parmi les premières associations publiantes en France sur ces enjeux, et ceux qui parlent sans cesse de la nécessité d'une "pédagogie" des questions écologiques devraient nous en remercier. D'autant que, contrairement à d'autres, nous sommes entièrement bénévoles et nous ne coûtons pas un centime d'argent public dans cet exercice incitant les citoyens à approfondir ces questions importantes et à se familiariser avec leur vocabulaire spécialisé.

De toute évidence, nous ne prétendons pas commenter l'ensemble des publications scientifiques : nous y sélectionnons en priorité des articles montrant que la communauté des chercheurs semble loin de cautionner le caractère définitif de certaines assertions que l'on peut lire dans les publications des instances officielles de l'eau, à commencer par le niveau de robustesse des connaissances en écologie de la restauration et le niveau de certitude sur les effets de cette restauration. N'est-il pas autrement plus grave de lire des assertions fausses, incomplètes ou exagérées dans un discours public? Comment le CGEDD pourrait-il justifier des manipulations grossières, comme celle de la soi-disant auto-épuration des pollutions par suppression des ouvrages transversaux, quand elle émane de la communication d'établissements publics envers lesquels on nous demande aujourd'hui d'avoir une pleine confiance?

Concernant le cas particulier de Van Looy 2014, il y a quelque partialité à nous accuser d'être partiaux :
  • nous avons répondu en détail à la critique faite par l'Onema et la Dreal (voir les fichiers téléchargeables dans cet article), 
  • nous avons montré que d'autres chercheurs (comme Radinger et Wolter 2015) considèrent (tout comme nous l'avons fait) l'absence d'impact piscicole marqué des barrages comme l'une des informations notables apportées par le travail de Van Looy et al 2014 (quand bien même ce n'est pas l'objet principal de leur étude), 
  • nous avons surtout publié plusieurs autres recensions de travaux récents dont l'examen montre des impacts relatifs plutôt modestes des ouvrages sur les répartitions de poissons ou la biodiversité pisciaire. 
Vu la rareté des données scientifiques sur l'effet des ouvrages en France, rareté reconnue par les chercheurs eux-mêmes, que la première étude rigoureuse d'hydro-écologie quantitative observe une variation mineure (de l'ordre de 10%) de l'indice de qualité piscicole (IPR) par rapport au paramètre de la densité de barrages en rivière (ainsi qu'une corrélation légèrement positive avec la richesse spécifique) est une information que nous jugeons de première importance pour le débat public. Elle souligne selon nous l'urgente nécessité de poursuivre les travaux en ce domaine, mais aussi de sortir des généralités et d'informer les citoyens sur la nature exacte des impacts des ouvrages, pour vérifier s'il y a consentement à agir en vue de gains écologiques parfois très limités par rapport au coût et à la nuisance des chantiers.

Polémique? 
Nous n'avons pas de plaisir à la dimension indéniablement polémique, conflictuelle même, de notre exercice associatif. C'est plutôt fatigant. Mais n'inversons pas la charge de la pacification : nous n'avons pas de plaisir non plus à recevoir chaque jour ou presque un nouvel appel à l'aide d'un propriétaire ou d'un riverain victime de bureaucraties autoritaires qui propagent des idées fausses, exercent des pressions inacceptables, pinaillent des enjeux sans réelle priorité environnementale (en se montrant laxistes envers tant d'autres) et promeuvent des solutions ruineuses.

Si le CGEDD n'a pas saisi le niveau d'exaspération et de détresse des gens sur ce dossier des ouvrages en rivière, alors il n'a pas saisi la profondeur du problème ni la raison réelle de notre attitude "polémique".

Quand un certain nombre de personnes auront compris que le jeu pervers consistant à chercher à tout prix des barrages et plans d'eau à détruire sur leur bassin versant doit faire une pause, alors la polémique cessera. Quand les propriétaires d'ouvrages auront d'autres rapports à leur administration que des menaces de casser leur droit d'eau et des lettres de mise en demeure pour des chantiers à coût exorbitant, alors la polémique cessera. Quand les signataires du moratoire seront reçus dans l'ensemble des instances de concertation et délibération pour exprimer leur point de vue et concourir à des décisions plus équilibrées, alors la polémique cessera. Quand la politique publique de la rivière reconnaîtra que la volonté de principe d'effacer la grande majorité des ouvrages afin d'assurer la disparition des retenues (véritable objectif de la renaturation si elle est intellectuellement honnête dans ses convictions) a été une erreur et que cet objectif doit céder place à une approche plus complexe, décidée au cas par cas, démocratiquement construite à échelle de chaque bassin comme de chaque site, alors la polémique cessera.

Bref : que cessent d'abord le procès en suspicion, stigmatisation et destruction des ouvrages, ainsi que le mécanisme de chantage réglementaire et financier pesant aujourd'hui encore sur des milliers de sites orphelins de solution, et l'on reviendra très vite à des conditions normales et décentes de débat.

Sommes-nous continuo-sceptiques ?
Le CGEDD reconnaît que nous abordons de "véritables sujets de fond", mais nous reproche de le faire sous l'angle d'un "continuo-scepticisme". Le CGEDD se montrerait sans doute moins partial et partiel lui-même s'il admettait en symétrie qu'il existe en France un "continuo-catastrophisme" ayant laissé penser que les ouvrages de l'hydraulique ancienne ont un impact majeur sur la qualité de l'eau et des milieux. Ce qui est faux par rapport à l'amplitude des autres pressions et ce qui relève bien souvent d'un discours de récrimination et de ressentiment émanant de certains usagers à l'encontre des moulins ou de l'hydro-électricité (milieux pêcheurs spécialisés et militants d'un environnementalisme très idéologisé, assez peu représentatifs des préoccupations majoritaires des riverains d'après notre expérience).

Après, serions-nous "continuo-sceptiques" sur le fond?

Dans notre première publication importante du début 2013, un rapport d'une quarantaine de pages sur la continuité écologique en Côte d'Or paru au moment du classement des rivières, nous exprimions notre souhait d'une "double modernisation écologique et énergétique" des moulins. Nous signalions au passage que certains ouvrages pouvaient être effacés et, ironiquement, notre recommandation finale était très proche de celles formulées aujourd'hui par le CGEDD  ("détermination des ouvrages à effacement prioritaire correspondant à une quadruple condition : absence d’intérêt patrimonial, absence d’intérêt énergétique, absence de risques induits, preuve d’un gain écologique"). Cela n'a rien de très "continuo-sceptique" si l'on entend par cette expression la négation totale de l'intérêt ou du sens de la continuité. (Un silence de plomb a accueilli ce rapport envoyé aux administratifs et gestionnaires, qui se sont bien gardés de répondre à notre demande de réunions de concertation collective, ouverte, avec les riverains, les propriétaires et l'ensemble des acteurs… Notre ton "polémique" ne vient pas de nulle part, mais de ce genre de mépris pour ceux qui ne sont pas du sérail ou qui ne contresignent pas la doxa dominante).

Depuis cette date, nous avons régulièrement rappelé que les ouvrages hydrauliques ont effectivement des impacts biologiques, physiques, chimiques (mais montré aussi qu'ils sont souvent faibles, et parfois positifs), que la continuité est un concept intéressant de l'hydro-écologie et un outil légitime de gestion des bassins versants (cet exemple). Là encore, ce n'est pas spécialement "sceptique", sauf dans le sens général et sain de ce terme, à savoir une approche critique face à ce que nous tenons pour des certitudes (ou que l'on veut nous faire tenir pour telles).

Veut-on affaiblir la légitimité de l'Onema?
Dernier point soulevé par le CGEDD, l'Onema dont Hydrauxois ou OCE pourrait "affaiblir la légitimité". Cette institution n'existe plus et a été remplacée par l'Agence française pour la biodiversité au 1er janvier 2017. L'Onema avait plusieurs problèmes en ce qui concerne sa légitimité, a priori plus graves que les critiques émanant de notre part. Le ressenti de certains usagers, parfois très négatif, n'a pas grand chose à voir avec que nous pouvons écrire. Et la réputation de l'Onema a davantage été ternie ces dernières années par des rapports de la Cour des comptes que même un grand journal de référence mentionnait en une...

D'abord, l'Onema était à la fois un service de la police de l'environnement sur le terrain, un service d'expertise technique en assistance des DDT-M, un service de gestion des données nationales sur l'eau et pour une plus modeste part un service de recherche par des travaux communs avec l'Université ou l'Irstea. Il était assez confus (et trop ambitieux) à notre sens de réunir sous un même logo des missions aussi diverses (donc des perceptions également diverses). On observera cependant que notre association a conseillé à ses lecteurs de lire certaines publications de l'Office sur le protocole ICE, sur le débit minimum biologique, sur l'auto-épuration, etc. Mais bien sûr, nous avons exprimé des désaccords sur des vulgarisations grand public que nous trouvions très orientées, sur un certain double discours entre l'expression aux parlementaires et la réalité de terrain, sur le caractère biaisé, incomplet et en deçà des canons de la littérature scientifique de restauration du recueil d'expériences en hydromorphologie, sur le laxisme du contrôle écologique des destructions d'ouvrage, etc. Cet exercice ne relève pas d'un procès en sorcellerie contre l'Office, mais de critiques à chaque fois motivées et argumentées. Nous espérons que le CGEDD nous reconnaît ce droit de contestation...

Ensuite, nul n'ignore que l'Onema a remplacé le Conseil supérieur de la pêche dissous en 2006, ce qui pose deux types de problème. D'une part, la pêche a en France le statut ambigu de juge et partie dans la politique de l'eau (à la fois usager de la rivière et prescripteur de recommandations à des tiers ayant des effets sur l'usage en question), ce que la continuité écologique en particulier a rendu visible et problématique. L'héritage halieutique de l'Onema ne le prédisposait pas a priori à faire de la recherche en écologie en toute généralité (en tout cas pas aisément ni rapidement par rapport aux formations de son personnel) et cet héritage l'exposait à une suspicion de proximité excessive avec un usage très particulier de la rivière. D'autre part, l'Onema souffrait d'une certaine spécialisation ichtyologique: la grande majorité de ses publications et travaux parlent de poissons ne représentant pourtant que 2% de la biodiversité aquatique (et encore moins si l'on songe aux salmonidés, rhéophiles et migrateurs mobilisant toute l'attention de l'Office, mais ne formant pas la majorité des espèces pisciaires). En ce domaine, l'Onema a souvent développé une approche conservationniste assez stricte (par exemple l'utilisation de "biotypologies théoriques" précisément datées et situées dans l'histoire récente des sciences), qui est une approche parmi d'autres de l'écologie, pas forcément celle dont les attendus nous paraissent les plus recevables (ni les conclusions les plus exploitables quand l'Onema comme service de terrain en vient à donner des avis sur des chantiers exigeant un certain réalisme économique et juridique).

Enfin, la "légitimité" d'un discours technique et scientifique ne réside jamais dans le rapport d'autorité, qui est l'attitude des croyances et des idéologies, ni dans le refus de l'échange argumenté. Le CGEDD aurait gagné à rappeler cela au lieu d'une défense indistincte de telle ou telle institution sous prétexte qu'elle est "officielle", car la critique rationnelle est un exercice ouvert à tous les citoyens et généralement encouragé pour ses vertus, particulièrement dans le domaine de l'environnement.

Pacifier la question des ouvrages hydrauliques, travailler sur les rivières
Au final, notre association est persuadée que les moulins et riverains ont beaucoup de choses à faire dans le domaine de l'écologie des rivières, en concertation avec les autres acteurs de l'eau, les collectivités territoriales et les autorités administratives. Un grand nombre de nos adhérents propriétaires d'ouvrage ont une réelle sensibilité à la nature et ont choisi d'acheter des moulins, forges ou étangs pour cette proximité. Le fait de se retrouver du jour au lendemain traités comme des délinquants écologiques pour des ouvrages légalement autorisés et souvent présents depuis des siècles en a effaré plus d'un...

Il n'échappe à personne qu'il est impossible de parvenir à cette intégration des propriétaires et riverains d'ouvrages si le discours public officiel (du ministère aux syndicats) continue de stigmatiser l'existence même des seuils, digues et barrages, de poser la destruction de ces ouvrages comme un enjeu majeur ou un objectif idéal, d'exclure les premiers concernés des débats préparatoires aux décisions, de pratiquer l'écologie sur des bases incomplètes et fragmentées d'information (notamment en séparant la question morphologique et la question chimique dans la gestion et la discussion, sous prétexte que certains impacts – l'assainissement et l'agriculture en particulier – sont confiés à des canaux spécifiques de décision).

Il ne fait aucun doute pour nous que la question des ouvrages hydrauliques finira par être amendée et pacifiée. S'il nous critique, le CGEDD reprend dans son rapport une bonne part de nos observations et admet finalement que l'on doit concilier toutes les représentations de la rivière. Essayons d'y parvenir rapidement pour nous concentrer sur ce qui devrait mobiliser l'énergie commune, à savoir travailler à des rivières de meilleure qualité, des rivières qui ne correspondent peut-être pas à l'idéal de chacun, mais qui sont néanmoins accueillantes et agréables pour tous.

Illustration : la zone humide attenante à l'étang de flottage du bois de la Maison du Parc du Morvan (Saint-Brisson). Les patrimoines naturels et culturels semblent pouvoir co-exister, même au bord des plans d'eau artificiels. Ce qui nous rend effectivement sceptiques sur un certain discours de diabolisation des ouvrages hydrauliques au nom d'une comptabilité un peu restrictive et obsessionnelle de tel ou tel poisson...

05/01/2017

Destruction des moulins de l'Armançon: rétropédalage de la Préfecture

Le Préfet de l'Yonne vient de retirer et annuler les arrêtés autorisant les destructions des ouvrages de Tonnerre et de Perrigny-sur-Armançon, demandant dans chaque cas un non-lieu à statuer dans les procédures contentieuses ouvertes par Hydrauxois. C'est pour notre association une première reconnaissance du caractère irrégulier des procédures ayant mené à ces arrêtés et, hélas, à la destruction sans retour des sites dans le cas de Tonnerre. Mais le procédé est justement stupéfiant dans ce dernier cas: on casse d'abord dans l'irrespect des conclusions de l'enquête publique, puis on retire a posteriori l'arrêté pour ne pas en répondre devant le tribunal. Un pas de plus dans l'âge post-démocratique de la continuité écologique?



Le Préfet de l'Yonne, par arrêté du 19 décembre 2016, a procédé au retrait de l'arrêté du 3 octobre 2016 qui portait autorisation unique et déclaration d'intérêt général de la destruction de l'ouvrage de Perrigny-sur-Armançon. Demande a été faite par le Préfet de procéder à un non-lieu pour la requête de l'association Hydrauxois en annulation de l'arrêté du 30 octobre 2016.

C'est donc une première victoire: un effacement de l'ouvrage de Perrigny-sur-Armançon demanderait un nouvel arrêté d'autorisation.

Pourquoi la Préfecture en est-elle arrivée à retirer elle-même l'arrêté en contentieux d'octobre 2016? Une hypothèse est que cet arrêté n'était pas légal au plan de la procédure, comme l'a soulevé l'association Hydrauxois, en raison de la méconnaissance de l’article L123-126 alinéa 3 du Code de l’environnement. Cet article exigeait que la commune délibère une nouvelle fois après l’avis défavorable du commissaire enquêteur. Cette prescription n’a pas été respectée.

Das le cas de Tonnerre, où la destruction précipitée et brutale a été engagée, la Préfecture a également procédé à une annulation post hoc de l'arrêté initial et à une demande de non-lieu. Nous demanderons néanmoins au tribunal de statuer, puisque la destruction des ouvrages a été effective dans ce cas.

Enfin, d'autres procédures restent ouvertes : plainte au procureur pour voie de fait (exclusion brutale des manifestants du seuil Saint-Nicolas), demande non satisfaite par le SMBVA de documents environnementaux relatifs au chantier.

Réunion publique:  la mairie de Perrigny-sur-Armançon organise une réunion publique sur l'avenir de la chaussée, le lundi 16 janvier 2017 à 18h30.

21/10/2016

Chaussée Saint-Nicolas de Tonnerre: toujours debout!

Le pelle mécanique n'a pu détruire qu'une partie du parement rive gauche du seuil Saint-Nicolas de Tonnerre. Désormais, les manifestants assurent une veille de nuit sur la chaussée et, jeudi matin, ils ont empêché les engins de continuer la casse. Les  gendarmes ont admis qu'avec l'accord du propriétaire rive droite, refusant que l'on détruise le site et sa berge, les citoyens pouvaient légitimement rester sur place. On attend désormais le choix du préfet et de syndicat. La solution d'apaisement consiste à arrêter les travaux pour laisser au juge l'opportunité d'analyser en toute sérénité la légalité (aujourd'hui contestée) des arrêtés préfectoraux autorisant les effacements de Tonnerre et de Perrigny-sur-Armançon. 

La pelle mécanique ne peut plus avancer, dès le petit matin les manifestants sont mobilisés.


Une partie de la chaussée a déjà été endommagée. Si le juge donne raison aux associations qui contestent la validité des arrêtés, il y aura obligation de remettre les sites en l'état. Autant s'arrêter là dans le gaspillage de l'argent public.

La belle vanne de l'ouvrage en rive gauche est encore présente. Globalement, la chaussée Saint-Nicolas de Tonnerre présentait un bon état de conservation, ce qui rend encore plus déplorable la volonté de la détruire.


Dialogue impossible? Hélas. Tant que le syndicat de l'Armançon SMBVA mènera une politique visant à casser le maximum d'ouvrages pour supprimer le maximum de linéaire de retenues – ce qui est l'objectif final de la "renaturation" si ses défenseurs sont cohérents et francs vis-à-vis de l'opinion publique –, il rencontrera une opposition résolue. Dans la grande majorité des cas, les obligations de continuité écologique peuvent être satisfaites par une simple ouverture des vannes (ou une échancrure limitée et réversible dans le seuil). Cette solution a tous les avantages : elle respecte le patrimoine et le paysage, préserve l'agrément des riverains, conserve le potentiel énergétique et la capacité de régulation des niveaux, économise l'argent public. La priorité du bassin de l'Armançon, comme de toutes les autres rivières de Bourgogne et de France, c'est de travailler sur les facteurs qui empêchent le bon état écologique et chimique des masses d'eau, au sens précis donné par la directive cadre européenne sur l'eau. Et non pas de se lancer dans une fantasmatique et ruineuse "restauration morphologique" de tronçons de rivières ayant déjà un bon état piscicole au regard de nos obligations européennes.

Pour rappel, l'indice poissons rivières mesurant la qualité biologique de l'Armançon médiane est en classe "excellente", la masse d'eau est d'ores en déjà en bon état écologique DCE (au dernier état disponible de bassin) alors qu'elle est par ailleurs en mauvais état chimique en raison des HAP. Casser des moulins centenaires n'a aucun effet contre les pollutions diffuses. C'est l'accomplissement d'un programme dicté par l'idéologie, et non pas la résultante d'une approche raisonnée et concertée des enjeux écologiques réels du bassin.

19/10/2016

La chaussée Saint-Nicolas de Tonnerre: zone à défendre!

Le collectif d'associations et de riverains engagé dans la défense des ouvrages de l'Armançon s'est mobilisé sur le terrain pour empêcher la casse de l'ouvrage Saint-Nicolas par le syndicat de l'Armançon tant que le juge ne s'est pas prononcé sur la légalité de l'arrêté préfectoral. Nous comptons sur vous pour y nous rejoindre au plus vite: plus nous serons nombreux et plus le Préfet sera enclin à suspendre le chantier! Retour en image sur cette première journée.


Arrivés tôt le matin, les membres du collectif parviennent à arrêter le brise-roche. Un camion sera également détourné, avant qu'il ne revienne accompagné de la gendarmerie et de la police municipale. La concertation et le dialogue, vantés dans toutes les bonnes brochures de la continuité écologique, trouvent vite leurs limites avec les représentants de la casse institutionnelle du patrimoine. Pour les militants comme pour les poissons, un seul mot d'ordre: circulez ! Photo Yonne républicaine, tous droits réservés.


La chaussée Saint-Nicolas en eau basse. On voit que l'ouvrage est modeste, y compris par rapport au seuil de la Cascade à Tonnerre, sans compter les plus grands obstacles à l'écoulement de l'Armançon. L'acharnement à casser des petits seuils en laissant les grands barrages caractérise la politique inepte de continuité écologique. Quant aux autres impacts, nous demandons pourquoi le contrat global Armançon 2015-2020 prévoit un budget de 76.000 euros seulement pour la pollution agricole contre 2,5 millions d'euros pour la restauration morphologique, on nous répond que le premier sujet est très difficile à traiter. Ben voyons, laissons la chambre d'agriculture décider de ce qui est bon pour la rivière et pendant ce temps-là, matraquons les moulins. Dans le même ordre d'idée, nos interlocuteurs nous disent que la ville de Tonnerre a bien sûr réfléchi à l'hydro-électricité, mais que les sites promis à la destruction ne produiraient rien. On demande à consulter l'étude : pas besoin d'étude, nous répond-on dans un grand rire... Pendant ce temps-là, Tonnerre est loin d'avoir accompli sa transition énergétique bas-carbone.


Une fois la vanne ouverte, l'ouvrage Saint-Nicolas est franchissable aux poissons bons nageurs, surtout en hautes eaux où le niveau tend à s'égaliser entre amont et aval. Une solution simple, peu coûteuse et respectueuse du patrimoine consiste donc à gérer cette vanne. Mais les employés du syndicat et sa vice-présidente nous expliquent : c'est très insuffisant, il faut restaurer la morphologie, on préfère des rivières libres. Le syndicat de l'Armançon va donc bien au-delà de ce que demande la loi française. Les citoyens du bassin vont-ils consentir à financer ces dépenses décidées sans réelle consultation ni concertation (la commission locale de l'eau, soi-disant représentative des usagers, élus et citoyens, n'a même pas daigné se réunir pour formuler un avis sur ce chantier, c'est dire le mépris complet des instances délibératives du syndicat pour la vie des gens...)? La nouvelle taxe Gemapi qui sera collectée en 2018 va-t-elle servir à modifier comme ici les graviers sur 200 mètres de rivière, au bénéfice de certaines espèces et au détriment d'autres? Le syndicat va devoir sérieusement affûter ses arguments, car ces gabegies destructrices au service des visions subjectives de quelques apprentis-sorciers sont fort peu partagées par les citoyens qui en sont correctement informés.


Voilà ce qui restera comme le grand outil de la pseudo-écologie des rivières des années 2010: la pelleteuse. Au moins la folie de la destruction du patrimoine aide-t-elle le secteur du BTP à franchir la crise de la construction... En matière de résultats pour l'environnement, on surveille avec impatience le retour en masse des anguilles, saumons, aloses et esturgeons sur l'Armançon. Basiquement, on attend déjà que le syndicat de rivière et l'Onema produisent des analyses avant-après sur chaque chantier pour exposer aux citoyens à quoi sert l'argent public et dans quelle mesure cela contribue à notre première et impérative obligation, le bon état chimique et écologique DCE. Le bla-bla généraliste du catéchisme de la continuité, on en a plus que soupé depuis 5 ans: on veut maintenant des faits et des chiffres sur les gains réels pour les milieux aquatiques et sur le progrès mesurable de nos obligations vis-à-vis de l'Europe. On demandera ces données aussi longtemps que nécessaire.



Même le chien paraît définitivement convaincu et profondément abattu : on jette l'argent dans la rivière.


Dans les propriétés voisines, tout le monde déplore le projet du syndicat de l'Armançon: le petit plan d'eau est apprécié, les berges vont souffrir de la reprise des marnages et de l'érosion, le niveau des puits baissera. Aussi l'association Arpent n'a-t-elle pas de difficulté à trouver des propriétés privées pour poser ses panneaux en défense du patrimoine menacé.

Le point de ralliement, chemin des Minimes à Tonnerre. Venez nous y trouver, de 06:00 à 18:00: nous ne sommes pas encore assez nombreux!

27/06/2016

Il faut défendre le patrimoine hydraulique de l'Ource

Avec nos amis de l'Arpohc, venez dire non à la casse du patrimoine hydraulique le 7 juillet prochain à Autricourt (21). Les syndicats de rivière et les Agences de l'eau doivent cesser de dilapider l'argent public dans des chantiers sans enjeux écologiques clairement définis. De nombreux moulins retrouvent chaque année des usages en France... à condition d'avoir encore leurs ouvrages hydrauliques. Nos territoires ne gagnent rien à détruire cet héritage précieux.


25/05/2016

4es Rencontres hydrauliques régionales, 25 juin 2016

Voici venu le temps de nos Rencontres hydrauliques annuelles, qui se tiendront cette année autour de Quarré-les-Tombes. Téléchargez le programme.

La journée principale sera le samedi 25 juin. Pour ceux qui restent une nuit ou qui habitent à proximité, d'autres activités sont prévues le dimanche 26 juin au matin. Au programme :  visites de l'Abbaye de la-Pierre-qui-Vire et de plusieurs moulins, exposition sur les moulins du Cousin-Trinquelin, conférences, échanges et débats sur l'actualité régionale et nationale des moulins en lutte (continuité écologique, cartographie des cours d'eau, lois patrimoine et biodiversité). Buffet le samedi midi (repas libre possible dans le village), barbecue le samedi soir, sur réservation.

Nous espérons vous y retrouver pour un moment convivial et combatif dans nos belles et libres vallées du Morvan.

A noter : le samedi 18 juin, l'association Hydrauxois co-animera une visite de moulins dans la ville de Semur-en-Auxois, en début d'après-midi. Voir le programme complet des journées des moulins 2016. en Bourgogne. Le matin, notre association présentera (également à Semur-en-Auxois) le moratoire sur la continuité écologique à l'occasion de l'assemblée générale de l'Association des riverains de France.

07/11/2015

Visite des chantiers de passes à poissons du Cousin

Le vendredi 6 novembre était organisée par Hydrauxois et le Parc du Morvan une visite de trois chantiers de passes à poissons sur la rivière Cousin, dans la zone classée Natura 2000 autour d'Avallon. La vallée fait aussi l'objet d'une protection au titre patrimonial (ZPPAUP). Nous remercions le Parc d'avoir accompagné cette initiative, dont voici un compte-rendu.

Moulin Léger, passe à bassins successifs
Hauteur de chute au droit de l'ouvrage : env. 1,7 m
Coût env. 80 k€ hors étude



Le moulin a une activité hydro-électrique (turbine type Francis, injection EDF-OA), la solution retenue a donc respecté la consistance légale de production. Le choix s'est porté sur une passe à bassins successifs permettant de diviser la pente en chutes modestes. La passe est calculée de telle sorte que des espèces à faible capacité de saut puissent nager dans des échancrures entre les bassins. La conception est rustique (à blocs grossiers), ce qui a un intérêt paysager et se rapproche des conditions naturelles rencontrées sur des rivières (zones à radiers et rapides). On note à l'amont des blocs en rivière : ce sont des déflecteurs pare-embâcles, pour minimiser le risque d'obstruction de la passe. Une échancrure garantit que la passe reste en eau en étiage et absorbe alors 10% du module (débit minimum biologique).

Moulin Cayenne, rivière de contournement
Hauteur de chute au droit de l'ouvrage : env. 2,1 m
Coût env. 50 k€ hors étude



Le moulin a une roue fonctionnelle de type Sagebien et une autoproduction énergétique en cours d'installation. La solution retenue a donc respecté la consistance légale. Il s'agit d'une rivière de contournement, dispositif considéré comme le plus proche des conditions naturelles et le moins sélectif sur les espèces piscicoles en montaison. La rive gauche a été creusée jusqu'au lit (socle de la roche-mère) et des enrochements ont été posés sur les extrados pour limiter l'érosion. Des plantations sur géotextiles sont en cours, notamment pour garantir la stabilité des berges à terme.

Moulin Cadoux, rampe en enrochement
Hauteur de chute au droit de l'ouvrage : environ 1,8 m
Coût env. 90 k€ hors étude



Le moulin n'a pas d'usage énergétique, mais jouit d'une protection comme "patrimoine pittoresque de l'Yonne" en raison du caractère exceptionnel du site, de son ancienneté historique et de son reflet dans le miroir d'eau. La proximité des populations de moules perlières (espèce protégée de la vallée) a conduit à un projet plus ambitieux, avec une arase en pente sur la crête en rive gauche du seuil, baissant légèrement le niveau légal et limitant la longueur du remous liquide/solide amont. La surverse préférentielle à cet endroit doit aussi casser la vitesse du flot dévalant par la passe, qui est constituée d'une rampe en enrochement de fond (blocs grossiers cassant la puissance de l'eau et offrant des zones de repos).

Les observations faites lors de la visite
Tous les propriétaire présents (venant des quatre départements bourguignons) ont des problématiques d'aménagement de continuité écologique sur des rivières classées. Les trois chantiers leur ont été utiles pour comprendre les enjeux constructifs. Mais ils ont soulevé aussi bien des objections et des interrogations.
Coût des dispositifs : c'est évidemment le point noir. Les trois aménagements du Cousin bénéficient d'un financement exceptionnel à 100% (Life+ et Agence de l'eau Seine-Normandie). Or, la position de l'Agence en situation normale est un financement public nul si le moulin n'a pas d'usage structurant, et de 20 à 50% en cas d'usage. Les coûts des passes sont élevés, d'autant que s'y ajoute une conception par bureau d'étude de l'ordre de 20 k€ pour chaque ouvrage. Une analyse menée sur le tronçon classé de rivière Armançon a montré que le consentement à payer des propriétaires (comme des élus et parties prenantes) est nul dans ce domaine, c'est-à-dire que l'attente est un financement public intégral.
Dispositions constructives : des doutes ont été émis sur la capacité des ouvrages soit à résister à de fortes crues (cas de la passe à enrochements) soit à préserver leur profil (cas de la rivière de contournement). Un participant expert d'origine néerlandaise a fait observer que les bétons utilisés en France sont interdits en rivière aux Pays-Bas, en Allemagne et dans d'autres pays européens. Une autre visite sera sans doute organisée après la mise en eau, en 2016.
Efficacité écologique : au regard des coûts engagés, et du fait que les ouvrages sont assez modestes au départ (faibles hauteurs, versants aval en pente modérée), c'est une question centrale puisque l'objectif des aménagements est une amélioration de la qualité écologique, particulièrement du compartiment biologique. Le Parc du Morvan devra procéder à des mesures de qualité piscicole pour analyser l'évolution des populations de poisson et de moules.
L'Yonne républicaine a publié un compte-rendu intéressant de la visite (cliquer l'image ci-contre pour agrandir)

Et pour la suite sur la rivière Cousin ?
Le Cousin-Trinquelin (la rivière change localement de nom au niveau de Quarré-les-Tombes) compte 43 ouvrages. Certains sont équipés de passes, d'autres ne sont pas considérés comme des obstacles à la continuité écologique en raison des ruines de seuils ou de leurs très faibles hauteurs, d'autres encore ont accepté le principe d'un effacement.

Il n'en reste pas moins que la majorité des ouvrages doit encore faire l'objet d'une concertation en vue de l'application de la continuité écologique, puisque la rivière a été classée en liste 2 avec l'horizon 2017 comme délai légal d'aménagement. Au cours de l'année 2016, l'association Hydrauxois définira avec ses adhérents une stratégie sur chaque rivière, en particulier sur le Cousin où elle est déjà fortement implantée. Cette stratégie consistera notamment en :
  • une analyse du cours d'eau et de l'impact de ses moulins, notamment au regard des données historiques disponibles sur les peuplements halieutiques,
  • un point technique et scientifique sur les connaissances actuelles en continuité écologique appliquée aux petits ouvrages,
  • un rappel aux services instructeurs des exigences légales, notamment la limitation des aménagements aux migrateurs (non pas restauration des habitats pour toutes espèces y compris non migratrices) et l'obligation explicite faite à l'administration de proposer sur chaque ouvrage des règles de gestion ou d'équipement,
  • une demande à l'Agence de l'eau d'information exacte sur le niveau de subvention des dispositifs simples de franchissement et, si ce niveau est jugé insuffisant, une démarche en reconnaissance du caractère "spécial et exorbitant" de la dépense demandée, appelant indemnité compensatoire (comme le prévoit la loi).

22/07/2015

Pour une politique de l'eau fondée sur la preuve

Nous publions ci-dessous deux documents de l'association relatifs à son analyse des enjeux en rivière. Le premier document est une réponse de fond à la critique qui nous a été faite (par la DREAL de Loire-Bretagne et par la Direction de l'action scientifique et technique de l'Onema) à propos de la recension de Van Looy 2014. Dans ce texte substantiel, nous maintenons notre analyse du texte concerné, nous répondons point à point aux observations de nos interlocuteurs et, plus largement, nous en appelons à une prise en compte plus équilibrée du niveau réel de robustesse de nos connaissances scientifiques par les politiques publiques de l'eau.

Le second document est la version en quelque sorte (très) synthétique du premier, et reprend les diapositives de notre conférence principale lors des 3e Rencontres hydrauliques du 27 juin 2015.

N'hésitez pas à diffuser ces textes... ou à les critiquer ici (la fonction "commentaire" de notre site est toujours ouverte).

Lien 1 : Réponse Dreal / Onema / CGEDD sur la recension Van Looy 2014
Lien 2 : Conférence de Genay, 27 juin 2015

31/10/2014

Pétition pour soutenir le Moulin Maurice à Saint-Marc-sur-Seine

Après le Moulin du Boeuf à Bellenod-sur-Seine, c'est le Moulin Maurice de Saint-Marc-sur-Seine qui est en danger et qui risque de fermer son activité. Notre association participera aux côtés des élus locaux à la recherche d'une solution constructive. Pour donner du poids à notre action, soutenez massivement la pétition lancée par les derniers meuniers en activité de la Seine Amont.  A voir aussi : reportage France 3 Bourgogne. Nous comptons sur vous !

27/10/2014

Un des derniers meuniers de la Seine Amont menacé de fermeture d'activité

L'association Hydrauxois avait pourtant produit un rapport de conciliation à l'intention de M. le Sous-Préfet et des parties prenantes, mais rien n'y a fait : le Moulin Maurice (Saint-Marc-sur-Seine) est sous le coup d'une double procédure, liée à une plainte de voisinage d'une part, à une instruction DDT pour non-respect de consistance légale d'autre part. L'affaire est d'autant plus étrange que le moulin tourne à sa consistance légale actuelle (déterminée par un déversoir et une vanne bascule) depuis la fin des années 1980, période à laquelle la Commune de Saint-Marc avait financé la nouvelle vanne. A l'époque, les services instructeurs de l'Etat avaient autorisé ces travaux. Une solution constructive doit être recherchée pour éviter la fermeture du moulin, dans un Châtillonnais qui n'a pas besoin de cela en pleine crise économique et sociale. Le propriétaire est (légitimement) attaché au fonctionnement mécanique de son moulin, entraîné par une robuste turbine Ossberger (type cross-flow), présente depuis l'après-guerre, mais le niveau de la consistance légale estimé par l'administration ne permettrait pas cet usage. A suivre. Ci-dessous et à ce lien, la couverture de l'affaire par le Bien Public.  Visitez aussi le site du Moulin Maurice.


03/10/2014

Cousin : bilan rapide de la réunion de concertation d'Avallon

La réunion organisée à Avallon le 29/09/2014 fut dans l'ensemble constructive. Une trentaine de personnes y ont participé : représentants de la DDT, du Parc du Morvan, du SIVU du Cousin, de la ville d'Avallon, des associations, et bien sûr propriétaires de moulins. Qu'ils en soient ici remerciés.

Le président de l'association Hydrauxois a exprimé les principaux blocages actuels de la politique de l'eau en France, dont on observe les conséquences directes sur le Cousin comme sur l'ensemble des rivières de la région : menace sur les droits d'eau, classement des rivières impliquant des aménagements écologiques très coûteux et peu subventionnés, choix privilégié de destruction du patrimoine historique, manque d'analyse du potentiel énergétique, défaut de robustesse scientifique sur la question de la morphologie et de son influence sur le bon état chimique / écologique au sens de la directive-cadre européenne sur l'eau (DCE 2000).

Parmi les points à retenir :

• la DDT a nié toute politique systématique de déchéance des droits d'eau ou d'animosité envers les moulins, et elle a rappelé qu'elle instruit les demandes de productions hydro-électriques qui lui parviennent. Toutefois, plusieurs propriétaires ont exprimé un ressenti différent, avec une manque de concertation, une perception de décisions parfois autoritaires et une trop grande complexité des évolutions règlementaires. Il a été convenu qu'il est nécessaire de poursuivre des réunions de travail avec les services instructeurs de l'Etat,  pour trouver des solutions d'ici 2018, date d'échéance de l'obligation d'aménagement des seuils du Cousin. A signaler que l'Onema SD 89 n'avait pu envoyer de représentants.

• le Parc naturel régional du Morvan a tenu à rappeler qu'il n'a aucune responsabilité dans les lois actuelles sur l'eau et dans l'évolution des règlementations, son rôle étant d'assister quand il le peut les maîtres d'ouvrages. Par ailleurs, le Parc a précisé que le budget réel de 800 k€ pour le Cousin (au sein des 3 M€ de dotation globale) interdira d'aménager les 24 moulins du linéaire Natura 2000. Toutefois, le Parc a reconnu qu'une seule solution de passe à poissons sans arasement a été retenue (Moulin Léger), avec deux autres passes associées à une baisse conséquente du niveau de la retenue (remettant en question le droit d'eau des sites concernés). Les choix s'orientent plutôt vers les propriétaires qui acceptent l'arasement ou le dérasement de leur seuil, comme le moulin des Templiers. Il y a donc de facto une prime à l'effacement plutôt qu'à la solution de modernisation passe à poissons + vanne fonctionnelle.

Pour la suite, les propriétaires de moulins vont continuer de discuter avec le PNR du Morvan des aménagements possibles dans le cadre du programme LIFE+, qui arrive à échéance en 2015.

L'association Hydrauxois prépare déjà la prochaine étape, qui sera une concertation élargie à l'ensemble du Cousin et de ses affluents, avec cette fois tous les représentants publics : Agence de l'eau Seine-Normandie, DDT, Onema, Dreal, Ademe, élus des communes riveraines et syndicat de rivière. La situation actuelle liée au classement de la rivière sera très difficile à gérer, et comme la plupart des propriétaires sont prêts à se battre pour éviter la destruction de leurs ouvrages hydrauliques, le laisser-faire ne peut aboutir qu'à un pourrissement de la situation, avec des querelles procédurières et des contentieux. On observe déjà certains de ces conflits en Côte d'Or, hélas. Il est donc indispensable de chercher des issues constructives pour la patrimoine hydraulique, la continuité écologique et, pourquoi pas, la restauration énergétique d'un certain nombre de sites. Il est aussi urgent de trouver des solutions techniques de franchissement piscicole / sédimentaire à coût moindre que les budgets actuellement observés, hors de portée du financement public comme privé.

Les moulins du Cousin, Hydrauxois et le Parc du Morvan dans l'Yonne républicaine




08/09/2014

Notre énergie pour la France

L'association Hydrauxois a exposé sur le site participatif "Votre énergie pour la France" son action pour le développement de la petite hydro-électricité en Bourgogne (restauration du site du Foulon de la Laume à Semur-en-Auxois, conseils aux communes et particuliers qui souhaitent se lancer dans la production d'électricité d'origine hydraulique). La petite hydro, avec près de 80.000 sites de production en France dont plus de 3500 en Bourgogne, doit prendre toute sa place dans la transition énergétique ! C'est en effet une énergie propre, locale, à très faible bilan carbone et matières premières, possédant un bon facteur de charge, appréciée des riverains, susceptible d'apporter des revenus et des emplois dans les territoires ruraux.

09/07/2014

Moulin du Boeuf en lutte !

Le dimanche 28 juin, une bannière a été posée sur le Moulin du Boeuf à Bellenod-sur-Seine. Cette propriété de M. Bouqueton est le symbole de l'acharnement actuel des autorités en charge de l'eau en vue de détruire les ouvrages hydrauliques et les droits d'eau qui leur sont attachés. Le cas est désormais en contentieux au tribunal administratif. Le nombre croissant de propriétaires qui rejoignent les associations de la Coordination Hydro 21 et leurs consoeurs de Bourgogne suggère la nécessité d'une vraie concertation collective sur les rivières, pour le moment absente. Nous avions déposé un dossier de travail au cabinet de la préfecture de Dijon, en copie à la DDT : aucune suite n'a été donnée à nos demandes d'information. De la même manière, les nombreuses réflexions contenues dans notre dossier complet sur la continuité écologique n'ont fait l'objet d'aucun retour de la part de la DDT, de l'Onema, ni des syndicats de rivières, des agences de l'eau ou des autorités politiques en charge de l'environnement. Nos documents sont publics : chacun peut donc juger sur pièce, et constater que les associations sont force de proposition, mais qu'elles rencontrent un silence hostile. L'absence volontaire de concertation est donc largement caractérisée, et si elle devait persister, les tribunaux seront saisis pour la sanctionner.


06/07/2014

Les Rencontres hydrauliques dans le Bien Public

Compte-rendu très fidèle de nos Rencontres dans le Bien Public (édition du 6 juillet 2014). Un grand merci à tous les participants, à la Commune de Semur-en-Auxois et aux exposants professionnels : Green City Energy, Watec Hydro / Ercisol, Turbiwatt, Hydreo Engineering. La date des prochaines Rencontres est déjà connue, dernier week-end de juin comme chaque année, soit les 27-28 juin 2015. Nous comptons sur vous tous qui nous lisez pour nous rejoindre et pour renforcer la belle dynamique créée depuis 2 ans.

14/09/2013

Rendez-vous de rentrée

Samedi 14 septembre 2013, 14-17 h : participation au forum des associations de la ville de Semur-en-Auxois

Dimanche 22 septembre 2013, 9-18 h : participation à la Foire écologique de Semur-en-Auxois (sur le thème de l'eau)

Vendredi 27 septembre 2013, 9-16 h : participation à la journée micro-hydro BER-ADEME. L'Association Bourgogne Energies Renouvelables, avec le soutien de l'ADEME Bourgogne et du Conseil régional de Bourgogne, souhaite réunir les acteurs (institutionnels, porteurs de projets, bureaux d'études, ...) du territoire impliqués dans la filière hydroélectrique. En effet, l'ADEME Bourgogne et du Conseil régional de Bourgogne sont porteurs d’initiatives en faveur du développement de l'hydroélectricité en Bourgogne. Cette journée thématique se déroulera le vendredi 27 septembre sur le secteur de Genlis et sera composée : d'une matinée de 2 tables-rondes axées sur les démarches d'un projet de réhabilitation d'une centrale hydroélectrique et sur le financement et l'investissement d'un projet de centrale hydroélectrique ; d'un après-midi de visite de site hydroélectrique de petite puissance. Nous vous invitons dès à présent à vous inscrire pour participer à cette journée en renseignant le questionnaire, jusqu'au 20 septembre inclus, sur ce lien.

Samedi 5 octobre 2013, 19-21 h : débat sur le thème Continuité écologique : quel avenir pour nos rivières ? Salle des conférences de la mairie de Châtillon-sur-Seine. En présence du syndicat de rivières SICEC et de l’ARPOHC. La continuité écologique, instaurée par la loi sur l'eau de 2006 ainsi que la Trame bleue du Grenelle, désigne la libre circulation des sédiments et des poissons dans les rivières. Décidée à la fin de restaurer la biodiversité des milieux aquatiques et la qualité de l'eau de rivière, elle se traduit notamment par des opérations d'effacement des seuils et barrages, ainsi que par le blocage des projets hydro-électriques ou de restauration patrimoniale de moulin. Tout le monde ne possède donc pas la même interprétation de la continuité écologique, ni des priorités à mettre en oeuvre pour l'avenir des rivières du Châtillonnais. Cette réunion sera l'occasion de confronter les points de vue de manière constructive et informative.