21/09/2012

Un chantier pour le barrage de Semur-en-Auxois


La Commune de Semur-en-Auxois vient d'annoncer le prochain lancement d'un chantier municipal et citoyen sur le site du barrage de la ville, visant notamment à restaurer l'usage énergétique de ce dernier. Le chantier sera ouvert aux bénévoles, particuliers ou associations. Il va de soi que l'association Hydrauxois s'inscrira pour participer à cette tâche commune, et rendre ainsi au barrage de la ville tout le lustre qu'il mérite. 

Sur ce site du Foulon de la Laume, en 1461, Jehan et Jacot Ylaire dit Marmaignot obtinrent du duc de Bourgogne l'autorisation de construire un moulin foulon (dégraissage et traitement des laines). Bien plus tard, en 1890-1891, on construisit l'usine hydro-électrique qu'EDF exploita jusque dans les années 1960. Le Foulon de la Laume est donc l'héritier de cinq siècles d'usage de l'énergie hydraulique. Notre génération doit prendre soin de ce très bel héritage pour le léguer aux générations futures ! Et à l'heure où la transition énergétique s'impose en France comme partout ailleurs, l'installation d'une petite centrale hydro-électrique sera un défi passionnant pour les Semurois.

17/09/2012

Au Moulin Lallemant, le patrimoine est bien vivant!

Les amoureux de l'eau et du patrimoine connaissent probablement le Moulin du Foulon, à Arnay-sous-Vitteaux. Il est la propriété de Robert Lallemant, et présente une particularité remarquable : cette famille de meuniers transmet l'ouvrage et le savoir-faire depuis 1840. Voilà un patrimoine bien vivant ! Le mot «foulon» désigne un moulin utilisé pour battre et dégraisser les laines, ce qui était probablement le premier usage historique du moulin actuel. Mais la production de farine s'est imposée voici plus de 150 ans.

Robert Lallemant et son équipe produisent aujourd'hui des farines déposées sous la marque La Bruchon d'Auxois. Les meuniers mélangent des variétés pures des blés d'Auxois afin de produire plusieurs farines, dont les qualités sont testées dans le laboratoire du Moulin. L'équipement actuel du Moulin du Foulon permet un débit de 650 kg blé / heure. Si vous êtes habitant de l'Auxois, vous savez désormais quel fournisseur choisir : Robert Lallemant parvient à associer une production locale avec une très haute exigence de qualité.

Côté technique hydraulique, le Moulin du Foulon présente un autre atout : on peut y voir le fameux régulateur Lallemant, conçu au XIXe siècle par un ancêtre du propriétaire actuel (première photo en haut, ci-contre ; cliquez pour agrandir l'image). Ce mécanisme ingénieux avait pour fonction d'assurer un débit régulier entre le bief et les ouvrages hydrauliques, régularité indispensable pour le travail du blé mais aussi pour les turbines des installations électriques. Car roues ou turbines, les ouvrages qui transforment l'énergie cinétique de l'eau en énergie mécanique puis électrique sont très sensibles aux emballements. Le régulateur Lallemant équipait ainsi de nombreuses petites usines hydro-électriques de Côte d'Or au début du XXe siècle.

Aux Journées du Patrimoine qui se tenaient le week-end dernier, il y avait foule au Moulin du Foulon : c'est une excellente nouvelle, et cela témoigne de l'enthousiasme des amoureux du patrimoine hydraulique. Le Bien Public signale même qu'un autre moulin, situé à Athie, a eu la surprise de voir arriver des visiteurs alors que cette année, il ne participait pas aux Journées !

Plus d'information à propos du Moulin du Foulon.

16/09/2012

Accord Hydrauxois-Arpohc

Une délégation d'Hydrauxois a participé le samedi 15 septembre 2012 à l'Assemblée générale des l'Association des riverains et propriétaires d'ouvrages hydrauliquesdu Châtillonnais (Arpohc), dirigée par le dynamique Christian Jacquemin (ci-contre, photo du bureau).

Les deux associations ont conclu un accord sur plusieurs initiatives communes : veille documentaire sur l'hydraulique, co-publication du futur Guide de la continuité écologique, réflexion partagée pour mettre en place une base d'information en ligne sur le patrimoine, engagements de terrain pour la défense des ouvrages menacés d'effacement sur la Côte d'Or.

12/09/2012

Réflexion sur le référentiel des obstacles à l'écoulement (ROE)

La loi sur l'eau et les milieux aquatiques (LEMA) de 2006, modifiant le Code de l'environnement, les lois Grenelles 1 et 2 (Trame verte et bleue), le Plan de gestion de l'anguille sont autant de textes ayant introduit en droit français la notion de continuité écologique. Celle-ci implique que les rivières françaises connaissent :

  • un bon transit sédimentaire (transport des particules en suspension et des charges solides de type sables, graviers, etc.)
  • un bon franchissement piscicole (libre circulation des poissons migrateurs, évitement de l'isolement génétique des poissons non migrateurs, possibilité de fuite en cas de pollution locale, etc.).

Le ROE : une base de données produite par l'Onema
L'Office national de l'eau et des milieux aquatiques (Onema) a produit un outil de recherche et d'aide à la décision : le référentiel des obstacles à l'écoulement (ROE). Il s'agit d'un recensement systématiques des seuils de moulins, barrages, ponts, écluses, digues et autres ouvrages hydrauliques.

Au total, pour la dernière version en date de ce recensement, on compterait près de 80.000 «obstacles à l'écoulement» sur les rivières françaises (carte ci-contre). Et le recensement n'étant pas achevé, il est probable que l'on dépassera les 100.000. Rien d'étonnant à cela puisque l'homme a presque toujours développé ses cités et ses civilisations autour de la ressource en eau. En Côte d'Or, on compte par exemple 1351 obstacles recensés dans la dernière version en ligne du ROE. A l'échelle de la France, environ la moitié des obstacles sont formés par des seuils en rivières et des barrages (un barrage commence à partir d'une hauteur de 2 mètres).

Vous pouvez consulter le ROE sous forme de carte des rivières, à cette adresse. (Attention, le rafraîchissement est très lent et demande un bon débit de connexion). Ou bien sous forme de tableur Excel, à cette adresse (télécharger le ROE, en bas. Attention cette fois, comme il y a des dizaines de milliers d'entrées dans le tableur de type Excel, ce n'est pas facile de s'y retrouver).

Le ROE, une certaine vision des ouvrages hydrauliques
Les concepteurs du ROE sont généralement des chercheurs, ingénieurs ou techniciens en hydrophysique, hydrobiologie et hydro-écologie. La notion même d' « obstacle à l'écoulement » pour désigner des ouvrages hydrauliques témoigne de cette vision issue de leurs disciplines scientifiques. Mais cette vision est forcément réductrice, au sens où elle n'envisage qu'une seule dimension des ouvrages en question. Pour le comprendre, on peut dire que la ville de Paris est un obstacle à l'écoulement aérodynamique sur le Bassin Parisien ; mais personne n'aura évidemment l'idée de qualifier ainsi la capitale française (même si de fait, certains chercheurs en sciences du climat s'intéressent beaucoup aux changements de rugosité sous la couche limite!).

On ne peut donc pas réduire un barrage, un seuil ou un bief de moulin à la seule notion d'obstacle. Cette vision serait très simplificatrice si elle prétendait résumer tous les regards possibles sur les ouvrages hydrauliques. Et très inquiétante si elle devenait le « mono-langage » de l'administration en charge de l'eau.

Les lois de l'hydrodynamique impliquent de toute évidence que nos seuils et barrages modifient le régime des écoulements, donc la circulation des sédiments et celle des poissons. Ce point n'est pas en question, il relève d'une physique élémentaire désormais bien établie. Ce qui est plus douteux en revanche, c'est l'assertion selon laquelle les obstacles à l'écoulement représenteraient la principale menace pour la qualité biologique des rivières françaises.

Une présence bientôt millénaire
Les seuils et petits barrages ont connu un grand développement à partir du Moyen Âge. Aux XIe-XIIIe siècles, les ouvrages hydrauliques profitent de l'invention de l'arbre à cames, qui permettait de transmettre l'énergie à toutes sortes d'instruments mécaniques. Le moulin devient l'usine du développement agricole et industriel de cette période. Cet usage de l'eau ne fera que croître jusqu'au XIXe siècle. Si l'obstacle à l'écoulement représentait la principale pression sur les espèces piscicoles, il est douteux que nos rivières possèdent encore le moindre poisson après plusieurs siècles de cette exploitation intensive de l'énergie hydraulique.

Cela fait bientôt un millénaire que le régime de l'écoulement des rivières françaises (et européennes) est soumis à une forte influence anthropique, de même que son peuplement piscicole. Cette pression adaptative lentement mise en place a impliqué des évolutions progressives des espèces présentes dans les cours d'eau. Certaines se sont raréfiées, d'autres ont prospéré selon qu'elles étaient adaptées ou non au régime modifié de l'eau (changements de température, vitesse, minéralisation, oxygénation, etc.). Faute d'archives d'observation sur une très longue période, il est difficile de statuer sur la mesure de biodiversité et biocomplexité des biefs et retenues, a fortiori de déterminer le poids relatif de chaque facteur d'influence quand on soupçonne un appauvrissement biologique du cours d'eau.

L'influence progressive des ouvrages hydrauliques paraît moins dommageable que des pressions plus récentes et plus brutales : la surexploitation de pêche (surtout en Occident pendant la phase d'ascension démographique 1750-1950), la pollution massive par les effluents industriels, agricoles et ménagers, l'introduction d'espèces invasives et parasites au détriment des espèces patrimoniales, la multiplication des usages de l'eau en milieu urbain comme rural. Dans un des articles les plus cités de la littérature sur la question, David Dudgeon et ses collègues citent la fragmentation de l'habitat induite par la modification du flux comme l'un des facteurs de perte de la biodiversité en eau douce, mais non comme le facteur dominant (Dugeon et al. 2006).

Hiérarchiser les risques, et ne pas se tromper d'urgence
De l'avis général des chercheurs, ces questions de fragmentation de l'habitat aquatique sont sans doute importantes, mais elle sont aussi sans commune mesure avec une menace qui se profile à l'horizon et qui forme un risque de premier ordre pour la biodiversité : le changement climatique, et ses conséquences hydrologiques en particulier (modification rapide du cycle de l'eau à échelle régionale, étiages ou crues plus sévères, acidification des eaux, etc.).

Encore tout récemment, 22 chercheurs ont publié dans Nature un article montrant que la menace n°1 sur la biodiversité résidait dans des changements brutaux à seuil critique, et que parmi ces changements figure notre modification actuelle du cycle du carbone (Barnosky et al 2012). Dans cette hypothèse, on ne parle pas de la raréfaction de quelques espèces sur des cours d'eau, mais bien de pertes en biodiversité qui seraient comparables aux cinq grandes extinctions de l'histoire de la Terre.

Toute décision publique est fondée sur une hiérarchie des risques, des bénéfices et des opportunités. Concernant les ouvrages hydrauliques, il apparaît que leur capacité à limiter l'usage des énergies fossiles (donc l'effet de serre) est un avantage plus important que l'inconvénient éventuel de leur influence (déjà multiséculaire pour la plupart) sur la sédimentation ou le peuplement piscicole. C'est du moins une position que l'on peut déduire logiquement d'un très nombre d'articles scientifiques publiés ces dix dernières années.

Cela ne signifie pas qu'il faut accepter de manière conservatrice le statu quo : bien des ouvrages ne sont pas correctement entretenus (présence du propriétaire et vannage régulier, ou automatisation), certains sont laissés à l'abandon. Et dans le cas des barrages, des aménagements peuvent aisément améliorer la qualité écologique de l'eau.

Se réapproprier le ROE
Le référentiel des obstacles à l'écoulement est incontestablement un travail utile de l'Onema, et sa mise à disposition du public est une heureuse initiative, qu'il faut saluer. Il serait souhaitable que toutes les données primaires de l'Onema (campagnes de mesures) soient également accessibles, afin de pouvoir évaluer localement l'évolution récente des espèces sur les cours d'eau.

Le ROE permettra de débattre de son usage initialement prévu, à savoir l'état du transit sédimentaire et de la circulation piscicole. Et des aménagements à fin de continuité écologique seront bien sûr nécessaires sur les sites présentant des altérations manifestes du cycle de vie de certains poissons, ou des processus d'érosion-sédimentation.

Mais pour les associations, dont Hydrauxois, ce ROE servira également à deux autres usages non prévus par ses concepteurs : dresser une cartographie du patrimoine hydraulique régional ; produire un atlas hydroélectrique détaillé, notamment pour les PCH (petites centrales de puissance inférieure à 500 kW).

Si ROE signifie aujourd'hui référentiel des obstacles à l'écoulement, cette base pourrait aussi bien s'appeler « référentiel des opportunités énergétiques » ou « référentiel des ouvrages en danger ». Car ce qu'elle décrit, ce sont parfois des ouvrages qui représentent un héritage patrimonial important, sans être entretenus ni valorisés ; ou des ouvrages qui, produisant une certaine hauteur de chute et/ou un débit d'eau dévié du lit mineur, permettent une exploitation hydro-électrique locale.

Estimer le productible en petite hydroélectricité
Pour ce dernier point, on peut en effet réaliser une première estimation de puissance hydraulique en connaissant la hauteur de chute et le débit moyen au droit d'un ouvrage. La formule est :

ρ.g.H.Q

ρ (rho) représente la masse volumique de l'eau (1000 kg/m3), g la force de gravité (9,81 N/kg), H la hauteur brute (en mètre) et Q le débit moyen interannuel (en m3), le résultat étant en watt (W). On peut supprimer la masse volumique de valeur 1000, ce qui donne un résultat directement en kilowatt (kW)

Le productible final en énergie électrique est bien sûr plus complexe (il dépend des pertes en charge, des rendements de chaque élément de production, etc.), mais la puissance hydraulique brute du débit d'équipement donne déjà une bonne approximation du potentiel.

Il existe des estimations disponibles, par exemple dans les Schémas régionaux climat air énergie (SRCAE ) ou dans le travail important réalisé en 2011 par l'Union française de l'électricité (UFE 2011). Mais la méthodologie est différente et un travail de terrain mené sur la base des ouvrages hydrauliques existants sera complémentaire. Elle est aussi pour les associations l'occasion de découvrir toutes les facettes de leur territoire, certaines étant encore méconnues.

Un objectif : l'équilibre
Le Code de l'environnement (article L211-1) précise la pensée du législateur en appelant à une «gestion équilibrée» de la ressource en eau. L'équilibre sera le maître-mot d'Hydrauxois et il suppose une prise en compte multidimensionnelle de la qualité et de la valeur de l'eau : physique, chimique, biologique et écologique, bien sûr ; mais aussi historique, patrimoniale, paysagère, sociétale et énergétique.

07/09/2012

Un forum incontournable pour les passionnés

Si vous êtes passionné(e) d'ouvrages hydrauliques, et particulièrement si vous envisagez une production d'énergie, le Forum de la petit hydroélectricité deviendra vite un site indispensable. Outre des offres de matériel d'occasion, des passionnés de France et de Belgique échangent leurs expériences. Les turbines classiques (Francis, Kaplan, Pelton) sont à l'honneur, mais on discute aussi sur le forum des modèles plus anciens (Fourneyron, Jonval, Fontaine, Singrün...) que certains restaurent, ainsi que des roues hydrauliques. Dans le domaine électrotechnique, des discussions très pointues permettent de résoudre certains problèmes d'installation ou de maintenance. Et, last but not least, beaucoup de propriétaires de moulins ou de petites usines témoignent de leurs expériences actuelles avec la police de l'eau (Onema, DDT) ou les diverses administrations. Un échange de bonnes pratiques très enrichissant, et très prometteur pour le renouveau actuel du patrimoine et de l'énergie hydrauliques!