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23/02/2016

Questions sur la politique des ouvrages hydrauliques du Sicec

Outre les problèmes réglementaires d'effacement d'ouvrages sur simple déclaration et sans abrogation préalable du droit d'eau, la politique du Sicec (Seine amont en région châtillonnaise) sur les ouvrages hydrauliques a besoin de quelques clarifications. Nous le montrons ici encore à travers trois chantiers mis en avant sur le site du syndicat. De nombreuses questions se posent. Quels sont les bénéfices réels (mesurés, objectivés, quantifiés) de ces chantiers sur les milieux? Le Sicec peut-il montrer qu'il propose au moins autant d'aménagements que d'effacements, c'est-à-dire qu'il n'obéit pas sans réflexion au dogme de la destruction des seuils et barrages notoirement promu par l'Agence de l'eau Seine-Normandie et l'Onema? Des missions essentielles comme la prévention des crues, et inondations, la protection des berges et ripisylves, la lutte contre les pollutions, la valorisation des territoires par leur rivières et plans d'eau sont-elles déjà assurées avec un tel degré de satisfaction que l'on peut se permettre de dépenser pour démanteler jusqu'à la dernière pierre le petit patrimoine rural? Ces questions, nous les posons aux animateurs du syndicat comme aux élus de son Comité syndical. Tout le monde vante la "démocratie de l'eau" : alors créons de vrais débats démocratiques, et publions d'abord les faits et chiffres qui permettent la tenue correcte de ces débats.

Sur le site du Contrat Sequana géré par le Sicec (syndicat intercommunal des cours d'eau du Châtillonais), nous lisons les assertions suivantes : "Le programme de travaux du SICEC continue, dans les semaines à venir, 3 seuils en état de dégradation avancée seront démontés et les sites réaménagés. Le seuil des Ecuyers sur la commune de Chatillon sur Seine ; le seuil de la scierie de Cosne ; le seuil du « vieux moulin » de Beaunotte". Le site donne trois photos des ouvrages, voir capture d'écran ci-dessous. Cette attitude du Sicec continue de poser problème.

Si les ouvrages sont en "dégradation avancée", voire en "état de ruine" (titre), dénués de leurs vannes, de taille modeste, ils ne représentent pas d'impact majeur en terme de continuité écologique puisqu'ils n'entravent ni le transit sédimentaire ni le franchissement piscicole de manière significative. De même, ils ne posent pas de problème de sécurité. Dans ce cas, l'intervention sur ces seuils est une dépense d'argent public à peu près inutile, qui relève le cas échéant de l'acharnement à faire disparaître complètement les traces des ouvrages (y compris pertuis, radier ou culée, pas seulement les vannes). Vu la dimension modeste des trois ouvrages, on ne comprend pas l'obsession qu'il y a à les démanteler ainsi jusqu'à la dernière pierre, ni à mettre en valeur cette opération (c'est un des quatre articles de l'année 2015 sur le site du Contrat Sequana, on suppose donc qu'il n'est pas anodin pour le syndicat d'informer les citoyens sur ce chantier).

Si les ouvrages représentent en revanche un obstacle à l'écoulement au sens administratif, s'il est démontré que les espèces d'intérêt de la Seine ne peuvent les franchir, la situation est différente et leur mise aux normes dans le cadre du classement des rivières L 214-17 CE est exigible. Mais dans ce cas, les chantiers n'ont rien d'anodin et ne sauraient être bâclés. Le Sicec doit déposer un dossier complet d'autorisation (et non une déclaration) car les travaux de destruction de ces seuils modifient selon toute probabilité le profil de la rivière sur plus de 100 m de longueur (sinon, ils ne seraient pas des obstacles à l'écoulement), et peuvent occasionner divers troubles aux tiers et aux milieux propres à ce genre de chantiers (par exemple, pollution des eaux et colmatage des substrats dont frayères, par les sédiments remobilisés).

En d'autres termes, on ne peut pas jouer sur les 2 tableaux : prétendre d'un côté que ce sont des seuils présentant un impact important sur les milieux et justifiant une dépense, prétendre d'un autre côté qu'une simple déclaration suffit car les ouvrages ruinés sont quasi-inexistants. Enfin, "dégradation avancée" ou pas, le Préfet  doit publier des arrêtés de déchéance du droit d'eau ou du règlement d'eau de ces ouvrages, puisqu'ils sont légalement autorisés et que les droits des tiers doivent être préservés dans le cadre de leur consistance légale.

Plus globalement, il existe des centaines de seuils en zones classées au titre de la continuité écologique sur la Seine, l'Ource et leurs nombreux petits affluents de tête de bassin. Certains de ces seuils ont des dimensions autrement plus importantes que les 3 ouvrages offerts à la destruction par le Sicec. Cela pose de nombreuses questions.
  • Pourquoi dépenser l'argent public sur des seuils manifestement modestes et sans grand effet hydrodynamique ou hydrobiologique, alors même qu'il y a tant de besoins d'aménagement sur des barrages plus conséquents, et que nous savons tous que ni les propriétaires ni les communes ne sont solvables à hauteur des coûts exorbitants des mises aux normes de la continuité écologique?
  • Si le Sicec, les financeurs de l'Agence de l'eau Seine-Normandie et les ingénieurs de l'Onema ont réellement la qualité des milieux en tête, où sont consultables leurs études de modélisation du bassin versant sequanien montrant qu'ils agissent réellement sur les sites prioritaires pour ces milieux, avec des gains mesurés sur des linéaires d'intérêt, et non pas dans un saupoudrage obscur de petites opérations superficielles, discontinues et sans grand effet?
  • Si ces opérations sont vraiment importantes pour les milieux, où sont les relevés de qualité biologique des eaux avant / après et les analyses coûts-avantages montrant que la dépense publique s'est traduite par des gains justifiés au regard de l'intérêt général des riverains comme du respect des obligations réelles de la France vis-à-vis des  différentes directives européennes? Le seul exemple d'Essarois n'était pas vraiment convaincant sur le bénéfice halieutique issu d'une dépense publique conséquente, pas plus au demeurant que l'effacement de Nod-sur-Seine sur un tronçon à la qualité piscicole déjà bonne, voire excellente au regard des critères européens de contrôle DCE 2000…
Enfin, un syndicat de rivière a de nombreuses missions car les rivières ont de nombreux enjeux : prévention des crues et inondations, protection des berges et des ouvrages d'art, gestion des embâcles et atterrissements, entretien des ripisylves, lutte contre les pollutions diffuses en eau courante et en nappe, agrément paysager au service des communes adhérentes…
  • Ces missions, et tant d'autres sont-elles correctement assumées pour toutes les communes adhérentes du syndicat ? 
  • Y a-t-il un budget à ce point confortable que l'on peut se permettre de dépenser de l'argent à détruire le petit patrimoine technique et rural du Châtillonnais, ce qui suppose au préalable que les besoins essentiels pour la rivière et les riverains sont déjà tous satisfaits? 
Nous souhaitons que les élus portent nos interrogations au syndicat.

PS : le Sicec a été créé le 29 décembre 2010 par arrêté préfectoral. Nous avons demandé par courrier électronique (et nous demandons publiquement ici) à l'équipe dirigeante de nous donner les statistiques des travaux supervisés ou organisés par le syndicat dans le domaine précis de la continuité écologique appliquée aux ouvrages hydrauliques, pour les années 2011-2015. A savoir, dans les 5 ans écoulés:
  • nombre total de chantiers réalisés sur ouvrages; 
  • répartition des solutions choisies (dérasement, arasement, dispositif de franchissement, gestion des vannes, statu quo); 
  • hauteur de chaque ouvrage et coût total du chantier (y compris coût de l'étude préalable et du suivi post-intervention si pertinent). 
Sans cette élémentaire transparence qui doit caractériser toute action publique, il sera impossible d'avoir une vision d'ensemble de la stratégie du syndicat en continuité écologique et gestion des ouvrages, du caractère équilibré de ses choix et de leurs coûts pour la collectivité. Nous nous engageons bien sûr à publier les chiffres qui nous seront communiqués.

A lire sur le même thème

21/02/2016

La continuité écologique comme voie de fait? Le scandale de l'effacement de Nod-sur-Seine continue

L'effacement de l'ouvrage Floriet à Nod-sur-Seine n'avait aucun intérêt écologique. Il a en revanche un certain intérêt juridique : effectué sur simple déclaration, sans aucune protection particulière pour les milieux, sans que le droit d'eau ait été préalablement annulé par arrêté préfectoral, il témoigne de la grande légèreté procédurale du syndicat et de l'administration dès lors que l'on détruit le patrimoine hydraulique. Interpellée en novembre dernier, la DDT 21 nous a répondu trois mois plus tard. Nous sommes en désaccord complet avec les termes de cette réponse.  Quand on sait comment les maîtres d'ouvrage sont actuellement assommés par les moindres détails dès qu'ils veulent entretenir ou rénover leur bien, on ne peut qu'être indigné par le double standard de l'administration : aucune mesure, aucune preuve, aucune démonstration ne nous est opposée, alors que plusieurs témoins ont constaté les centaines de mètres de profil en long modifié sur la Seine et que nous avons pris le temps de formaliser un rapport détaillé. Nous portons donc l'affaire au Préfet et à la Ministre, en attendant de la porter devant juridiction s'il y a matière contentieuse. 

Nous avions exposé au service de Police de l'eau de la DDT 21 les problèmes entourant l'effacement de l'ouvrage Floriet à Nod-sur-Seine, opération par ailleurs inutile au plan des milieux (impact faible,  IPR de la rivière indiquant une qualité bonne ou excellente, vannes déjà retirées par le syndicat Sicec). En particulier, nous avions devant témoins pris un certain nombre de mesures sur site montrant que, de toute évidence, le chantier de destruction avait entraîné une modification du profil de la rivière sur environ 500 m, ce qui aurait dû impliquer une autorisation, une étude d'impact et une enquête publique. Mais le syndicat Sicec a agi sur simple déclaration.

Nous avons reçu la réponse de la DDT 21, que l'on peut consulter sur ce lien.

Il est fait état d'une visite sur site le 20 janvier 2016 constatant un "processus d'érosion latérale sur une centaine de mètre à l'amont", sans aucun élément de preuve (ni photographie, ni relevé, ni mesure). Ce constat est rapporté à l'article L 211-1 CE, qui n'est pas le texte réglementaire que nous avons invoqué dans notre requête (mais bien le R 214-1 CE sur les dossiers IOTA et le R 214-6 CE sur les autorisations). Ce constat ne répond pas non plus à nos observations ni basiquement à notre demande, qui concerne la méthode choisie par la Sicec et la police de l'eau pour définir le profil en long au droit de l'ouvrage à effacer.

De la même manière, le courrier affirme que "la remobilisation des sédiments s'est opérée de manière naturelle et dans des volumes peu importants". Là encore, ce sont de simples affirmations sans quantifications, qui ne répondent pas à notre demande sur une éventuelle analyse chimique de ces sédiments remobilisés (ni de leur volumétrie).

Enfin, le courrier admet que l'arrêté préfectoral d'abrogation du droit d'eau de l'ouvrage n'est toujours pas paru : en d'autres termes, on a détruit un ouvrage légalement installé (au sens du L 214-6 CE). Sauf erreur, cela s'appelle une voie de fait.

Donc pour résumer, la DDT 21 admet que le Sicec a :
  • effacé un ouvrage ayant encore une existence légale au moment de sa destruction;
  • modifié le profil en long et en travers de la rivière sans document exposant la mesure de cette modification,
  • remobilisé des sédiments en quantité inconnue sans analyse chimique de leur contenu ni analyse biologique de leurs effets sur les milieux,
  • le tout sur une rivière dont l'IPR (point de mesure adjacent au chantier) était de bonne qualité au sens de la DCE 2000. 
Connaissez-vous un seul propriétaire d'ouvrage hydraulique qui pourrait se permettre une telle légèreté dans ses travaux en lit mineur? Nous, non.

Bien entendu, cette réponse n'est pas acceptable. La DDT ne règle aucune question de fond lié à cet effacement (évaluation du profil, des sédiments, des frayères, des risques pour les milieux), pas plus qu'elle nous ne transmet le dossier de demande du Sicec (lequel refuse de son côté de nous répondre, montrant le peu d'estime qu'il a pour les riverains dès lors qu'ils interrogent ses pratiques). Dans toute cette affaire, il n'y a pas le commencement du début d'une démonstration sur l'un des points essentiels pour l'interprétation de la règlementation, à savoir la zone d'influence de l'ouvrage et de son effacement, qui définit soit une déclaration (moins de 100 m de linéaire) soit une autorisation (plus de 100 m).

En conséquence :
  • nous allons saisir M. le Préfet et Mme la Ministre de l'Ecologie, ainsi que nos élus locaux, de cette affaire qui témoigne de notre point de vue de la partialité et de la subjectivité du contrôle administratif, du caractère bâclé des effacements d'ouvrage et du mépris dans lequel on tient la concertation avec les associations de riverains et propriétaires;
  • nous allons demander de recevoir l'ensemble des déclarations administratives du Sicec relatives aux projets d'effacements votés en réunion syndicale ou inscrits dans la DIG du 11 juin 2015 (ainsi que les relevés des mesures prévues à l'article 17 de cette DIG) ;
  • nous confions bien entendu l'ensemble des éléments de cette procédure à notre avocat qui, selon les réponses de Mme la Minitsre, de M. le Préfet et du syndicat, décidera des suites à donner.


Rappelons pour conclure ce qui est le lot quotidien de notre action associative :
  • les propriétaires d'ouvrages hydrauliques font l'objet de demandes extrêmement méticuleuses et parfois exorbitantes dès qu'ils veulent curer leur bief ou leur retenue, entretenir leurs vannes, restaurer leurs seuils ou modifier leurs turbines, mais à côté de cela, le syndicat Sicec détruit un ouvrage ayant encore son droit d'eau et modifie 500 m de profil sur une simple déclaration. Et M. le Sous-Préfet de Montbard osait nous parler de "l'impartialité de l'Etat" sur ces questions : cette impartialité n'existe plus sur les questions environnementales liées aux rivières, et cette dérive de l'Etat de droit ne prépare certainement pas des rapports pacifiés entre les riverains, l'administration et les syndicats  ;
  • quand on demande des documents aux fédérations de pêche (exemple du rapport sur l'Ource de la fédé 21), aux syndicats (exemple des documents afférents à Nod-sur-Seine au Sicec), aux Agences de l'eau (exemple des relevés DCE 2000 sur le bassin), il faut dans beaucoup de cas plusieurs courriers, parfois des menaces d'aller à la CADA pour obtenir ces pièces publiques relatives à l'environnement auxquelles tout citoyen devrait avoir accès sur simple demande;
  • nous avons réclamé à la DDT 21 dès février 2013, à l'occasion de la parution de notre premier rapport sur la continuité écologique en Côte d'Or,  la tenue d'une vraie concertation sur la continuité (avec tout le monde autour de la table – DDT, Onema, Dreal, Agences, propriétaires, associations), mais elle n'est jamais venue, malgré plusieurs relances à la Préfecture ;
  • nous n'avons pas plus été conviés aux réunions de concertation sur la nouvelle cartographie des cours d'eau lancée en 2015, de sorte que si les biefs y sont inclus par l'administration, c'est encore par le contentieux qu'il faudra agir, faute d'une concertation digne de ce nom.
Cette attitude vis-à-vis des citoyens engagés dans l'action associative est antidémocratique, hautaine, insupportable. Un certain "petit monde de l'eau" n'a aucune envie d'être bousculé dans le confort de ses pratiques opaques en cercle fermé partageant les mêmes croyances et les mêmes intérêts. Ces personnes et ces structures relèvent pourtant de services publics ou assimilés, payés par l'impôt pour leurs salaires, dotations ou subventions. Aussi longtemps que leur comportement de déni et de mépris continuera, nous le dénoncerons publiquement. Quant à la politique de continuité écologique et de gestion des ouvrages hydrauliques, elle court à l'échec tant que ces mauvaises pratiques ne seront pas rectifiées. Nos associations ne peuvent certainement pas appeler leurs adhérents et sympathisants à valider une politique publique qui légitime des manipulations d'opinion comme des interprétations à géométrie variable des règles et des faits.

Post scriptum : quelques exemples de demandes administratives observées sur nos rivières. Un propriétaire veut curer les rejets venant des travaux de la commune dans son bief, on lui oppose la nécessité de procéder à des analyses chimiques à ses frais (et de prendre la responsabilité des sédiments s'ils sont pollués) ; un propriétaire veut mettre une roue décorative dans son bief sans aucun changement du lit ni de la consistance légale, on lui demande un dossier détaillé aux cotes ; un propriétaire veut changer les pelles en bois de ses vannes, on lui dit qu'il faudra envisager une pêche électrique de sauvegarde dans son bief ; un propriétaire a un chantier de passes à poissons, la police de l'eau vient demander à l'entreprise de changer de quelques centimètres des plots de fond en béton déjà posés. Des exemples comme ceux-là, il y en a des centaines en France, et de plus aberrants encore tant l'administration est devenue pointilleuse pour le moindre chantier sur un moulin ou sur ses organes hydrauliques. Quand la même administration laisse un syndicat bâcler un effacement, opération autrement traumatique pour l'équilibre en place des milieux, c'est tout simplement insupportable. Il en va de même lorsque des riverains de l'Ource constatent sur plusieurs biefs une forte mortalité piscicole liée à l'ouverture forcée des vannes pour débit minimum biologique, et que l'administration ne procède à aucune enquête sérieuse et nie l'existence d'un problème écologique. Le respect de l'Etat de droit découle de la garantie qu'ont les citoyens de sa neutralité, de son équité et de son impartialité. Si ces conditions ne sont plus remplies, s'il faut engager des procès longs et coûteux pour faire reconnaître un arbitraire local, si la règlementation atteint de tels niveaux de complexité que son interprétation devient totalement incertaine et variable d'un endroit l'autre,  la porte est ouverte à toutes les dérives.

17/01/2016

Effacement de Nod-sur-Seine: simple déclaration et pas d'enquête publique malgré 500 m de rivière modifiés

L'effacement du barrage de Nod-sur-Seine (voir ici et ici) fait partie des opérations à peu près inutiles dont sont friands les syndicats de rivière (ici le Sicec) et l'administration (DDT, Onema, Agence de l'eau). La qualité piscicole de la Seine au droit du tronçon (mesurée par IPR) est bonne ou excellente dans les relevés disponibles, ce qui ne montrait pas d'urgence particulière à intervenir au motif d'améliorer ce compartiment. Et l'ouvrage offrait des profils intéressants, notamment une profonde fosse de dissipation aujourd'hui recouverte des sédiments remobilisés. A notre grande surprise, le syndicat a procédé à une simple déclaration pour cette opération, alors que plus de 500 m de profil de rivière sont changés. Nous attendons de l'administration une explication. Le syndicat n'a quant à lui jamais répondu à nos courriers...

A l'occasion d'une réunion de concertation chez un adhérent ayant des problèmes de niveau légal de retenue, M. le Sous-Préfet de Montbard nous avait garanti la totale impartialité de l'Etat sur le dossier des ouvrages hydrauliques. Nous lui avions alors signalé que nous ne doutions pas de cette impartialité, mais que nous nous permettrions de la mettre à l'épreuve prochainement. C'est chose faite avec une demande d'information envoyée le 17 novembre 2015, et à ce jour sans réponse.

Nous avons exposé les faits comme il est reporté ci-dessous. Le principal problème : cette destruction d'ouvrage ayant modifié le biotope local et le profil de la rivière sur plus de 100 m (ainsi que les frayères) n'a fait l'objet que d'une déclaration simple, pas d'une autorisation. Donc pas d'enquête publique. Petite destruction de complaisance entre amis qui partagent la même idéologie?  Nous attendons que la Préfecture se positionne clairement sur ce dossier, d'autant que plusieurs autres effacements sont programmés en 2016 par le Sicec, avec dans certains cas de fortes interrogations de riverains sur l'avenir des écoulements.

Dans ce cas de Nod-sur-Seine, nous n'avons pas non plus trouvé trace de l'arrêté préfectoral abrogeant le droit d'eau ou le règlement d'eau, d'analyse chimique des sédiments renvoyés à l'aval de la rivière, d'estimation des espèces invasives, de bilan des nutriments avant/après ni bien sûr d'objectifs de résultat. Les mêmes gestionnaires et fonctionnaires affirmant que les ouvrages ont des impacts font comme si les effacements des ouvrages n'en avaient pas, alors que ces opérations sur lit mineur modifient un équilibre local établi de longue date. Le cas de Nod-sur-Seine a tout d'un chantier à la sauvette qui permet de baisser artificiellement les charges des opérations d'effacement pour prétendre ensuite qu'elles sont en moyenne moins coûteuses à la collectivité que les aménagements (ou le statu quo quand l'ouvrage n'est manifestement pas un problème grave pour les milieux.)

Les faits
A l’automne 2014 a été envoyée à la DDT 21 par le SICEC une déclaration relative aux travaux d’effacement de l’ouvrage Floriet à Nod-sur-Seine : cf récépissé dossier n° 21-2014-00110.

Il est fait état d’un régime de « déclaration » au titre de l’article R 214-1 C Env. 3.1.2.0 : « Installations, ouvrages, travaux ou activités conduisant à modifier le profil en long ou le profil en travers du lit mineur d'un cours d'eau, à l'exclusion de ceux visés à la rubrique 3,1,4,0 ou conduisant à la dérivation d'un cours d'eau sur une longueur de cours d'eau inférieure à 100 m. Le lit mineur d'un cours d'eau est l'espace recouvert par les eaux coulant à pleins bords avant débordement. »

Nous contestons que l’effacement de l’ouvrage Floriet à Nod-sur-Seine implique une modification du lit mineur sur moins de 100 m, tant au regard des résultats visibles du chantier survenu depuis qu’au regard des mécanismes de l’hydrodynamique fluviale appliqués au cas analysé.

Notre demande
Nous demandons au SICEC une copie du dossier de déclaration (pour comprendre le calcul et la modélisation effectués) et le cas échéant une copie du contrôle DDT ou Onema ayant validé l’instruction.

Nous souhaitons si besoin (pour ce cas, pour les effacements programmés et pour nos adhérents) que la DDT précise la notion de « profil en long » et les méthodes de calcul de ce profil dans un dossier loi sur l’eau.

Nos observations
L’influence d’un ouvrage sur le profil en long concerne aussi bien la ligne d’eau et d’énergie que le substrat de la rivière. Cette influence regarde la zone amont et la zone aval. La suppression d’un ouvrage provoque un abaissement de la ligne d’eau,  un phénomène d’érosion régressive avec réactivation de l’érosion latérale amont et un phénomène de sur-alluvionnement aval, associé à la reprise du transport de charge solide (JR Malavoi et D Salgues, Arasement et dérasement de seuil, Onema et Cemagref 2011).

Une influence de moins de 100 mètres sur le profil en long (fond, berge, ligne d’eau) est rarissime pour un ouvrage hydraulique sur les rivières du Châtillonais, dont les pentes sont relativement faibles (le plus souvent entre 0,2 et 0,8%, cf profil IGN et données in SICEC – FDAAPPMA 21, Etude des peuplements macrobenthique et piscicoles de la Seine et de ses affluents au regard de la qualité physique et chimique de l'hydrosystème, 2011).

A titre d’exemple, un ouvrage de seulement 40 cm sur une rivière de pente 0,5% a une influence de l’ordre de 100 m sur le linéaire de la rivière (env. 80 m amont en remous liquide et solide, env. 20 m aval en déficit sédimentaire).


Illustration n°1 : ouvrage avant effacement
L’examen de l’ouvrage Floriet avant effacement (ci-dessus) montre que les vannes de l’ouvrage avaient été retirées, mais que le seuil et radier résiduels représentaient une hauteur que l’on peut estimer visuellement supérieure à 1 m par rapport à la ligne d’eau. Le seuil était de type poids avec une face aval en pente, la chute visible sur l’image étant la partie basse du seuil (on voit la partie haute sous le bajoyer).

Il a été rapporté en réunion du comité syndical (octobre 2015) que la chute résiduelle avait suffi à creuser une fosse de 5 m à l’aval, ce qui indique la persistance d’une activité érosive au niveau du site (pas de comblement de la fosse). Il a été projeté à l’occasion de la même réunion un profil en long, mais nous n’en disposons pas.


Illustration n°2 : berge exondée à l’amont de l’ancien ouvrage, estimation de la hauteur de ligne d’eau due au seuil
Après effacement de l’ouvrage et visite sur site, les strates exondées de la berge sont interprétables en raison de l’absence de crue depuis les travaux. Au niveau de l’ancien seuil, env. 20 m à l’amont, on observe une hauteur d’env. 1,43 m en eau au-dessus du niveau du lit exhaussé (env 1,95 m au-dessus de la ligne d’eau actuelle en étiage, au moment de la photographie, ligne d’eau non représentée sur l’illustration).

Cette observation est cohérente avec l’illustration n°1 et confirme que l’ouvrage résiduel n’était pas une chaussée de quelques centimètres ou dizaines de centimètres.

Au regard de la pente de la Seine en sortie de Nod-sur-Seine, on peut estimer que l’ouvrage avait une influence amont de l’ordre de 500 m et une influence aval de l’ordre de 100 m.


Illustration n°3 : persistance des exondations de berge et atterrissements de remous solide à plus de 300 m de l’ouvrage
Cette image montre les bords de la rivière à une distance d’environ 330 m de l’ancien ouvrage, au niveau du méandre le plus marqué de la rivière sur la zone, cf localisation sur carte IGN. On observe sur chacune des rives des anciens niveaux exondés sans reprise végétative et des systèmes racinaires à nu. On observe également en substrat des atterrissements en amas à granulométrie grossière (sables, graviers) caractéristiques du remous solide des ouvrages hydrauliques.

Cela confirme l’estimation réalisée précédemment : la zone d’influence de l’ouvrage excède très largement les 100 m, donc l’effacement impacte le profil en long sur une distance elle aussi supérieur à 100 m. La partie aval n’est pas examinée ici.  

Conclusion
La DDT doit préciser le régime des travaux en rivière influençant le profil en long ou en travers. Il est nécessaire pour nous de comprendre comment l’estimation de moins de 100 m d’impact sur le profil en long a été calculée par le SICEC et validée par la DDT.

C’est important au regard du chantier de Nod-sur-Seine, même si celui-ci est désormais réalisé, mais aussi au regard des autres projets d’effacement inclus dans la DIG de juin 2015 ou de ceux votés en comité syndical SICEC d’octobre 2015.

En effet, un régime d’autorisation (et non de déclaration) implique une étude d’impact sur l’environnement (protection des milieux) et sur la sécurité (droit des tiers), ainsi qu’une enquête publique. Or, la plupart des ouvrages de Seine amont ont une influence qui dépasse les 100 m de linéaire et qui justifie cette procédure: au demeurant, cela explique l’intervention du syndicat sur ces sites, faute de quoi ils seraient négligeables et sans objet réel de restauration de continuité comme de recréation d’habitats.

Les associations Hydrauxois et Arpohc préparent à l’intention du SICEC, de la DDT 21, de la DR9 Onema et de l’Agence de l’eau S-N un guide juridique et technique relatif à l’ensemble des points de contrôle afférents à tous les projets d’effacement. Ces projets sont très loin d’être neutres et, au-delà de l’objectif initial de restauration de continuité longitudinale, ils peuvent présenter des effets adverses sur les milieux et sur les droits des tiers. Ces incidences sont à estimer et, si besoin, à corriger.

Nous attendons d’être davantage associés à ces projets, en conformité avec le souci de concertation et d’impartialité exprimé par les autorités préfectorales, ainsi qu’avec le niveau d’ambition du financeur (Agence de l’eau) souhaitant que les travaux subventionnés par l’argent public soient irréprochables.

Enfin, il se peut que le SICEC, les services instructeurs de l’Etat et nos associations n’aient pas la même définition de ce qu’est un profil en long. Si le malentendu provient de là, c’est tout aussi important de le savoir car nos adhérents peuvent avoir des projets modifiant la rivière et il est indispensable pour eux de comprendre précisément ce qui relève de la déclaration ou de l’autorisation.

12/11/2015

C'est ainsi que nos ouvrages meurent

Voici la Seine au niveau de l'ouvrage Floriet avant, et maintenant. Ces travaux d'effacement sont-ils ce que l'on attend d'un syndicat de rivière? Cette dépense d'argent public de l'Agence de l'eau Seine-Normandie est-elle une priorité pour nos cours d'eau? Nos députés et sénateurs ont-ils voté une seule loi qui enjoint de détruire le patrimoine hydraulique ? L'effet de ces opérations sur les milieux aquatiques fait-il l'objet de modélisations scientifiques sérieuses? La valorisation des dimensions récréatives, culturelles, énergétiques de ces sites est-elle seulement envisagée? A-t-on expliqué aux citoyens que l'indice de qualité piscicole en ce lieu était en classe bonne ou excellente avant l'effacement? A-t-on estimé le bilan nitrates (facteur dégradant reconnu du bassin Seine amont) de cette opération? Nous vivons l'âge sombre du dogmatisme de la continuité écologique, où quelques gens de passage éliminent sans état d'âme la mémoire des présences humaines en rivière. Pour que cela cesse, rejoignez les associations, faites signer le moratoire sur la continuité écologique


Hier






Aujourd'hui






A lire également cet article, d'où il ressort que la Seine au point de contrôle Onema de Nod avait un indice piscicole de qualité (IPR) bonne ou excellente dans les dernières campagnes de mesures, à l'époque où l'ouvrage Floriet était encore là.

30/10/2015

Effacement des ouvrages d'Essarois: 400.000 euros pour quels résultats?

Autorités et gestionnaires de l'eau vantent souvent les travaux de restauration morphologique comme ayant des effets "très positifs" sur la rivière et ses milieux. C'est le cas du Sicec et de l'Onema pour l'effacement des forges d'Essarois (21) sur la Digeanne. Que révèle en réalité le bilan détaillé de ces travaux ayant coûté 400 k€ (dont 90% de financement public)? Une simple variation de la densité et biomasse locales d'espèces piscicoles qui ne sont par ailleurs pas particulièrement menacées sur le bassin. A ce bilan halieutique modeste répondent en revanche des effets négatifs purement et simplement ignorés dans les politiques de l'eau : disparition du patrimoine historique et du potentiel énergétique, qui sont pourtant eux aussi des questions d'intérêt général pour le territoire. Le bilan nous paraît donc assez clair: il ne faut surtout pas généraliser de telles opérations!



En 2012 et 2013, les anciennes forges d'Essarois ont fait l'objet de travaux avec renaturation de la rivière (Digeanne, affluent de l'Ource). Trois ouvrages hydrauliques ont été effacés, le bief a été comblé sur 800 m, la rivière a été reméandrée sur 1500 m avec une buse large de passage sous un ouvrage. Le coût total de ces travaux a été de 400.000 euros, dont 90% sur financement public et 10% pour le propriétaire, un exploitant agricole. La figure ci-après indique la nature des travaux.


Un premier bilan écologique des opérations a été réalisé en 2014 par l'Onema. Ce bilan a été limité à l'état piscicole d'une partie du tronçon sans information sur l'état chimique de la rivière ni sur les autres indicateurs biologiques (invertébrés, macrophytes, diatomées). La pêche de contrôle de mai 2012 a été comparée à la pêche de juillet 2014 (décalage rendant incertain la comparaison des alevins après les éclosions de printemps). Nous publions quelques graphiques commentés, extraits de l'analyse de l'Onema.


Au total, la zone étudiée comporte 16 espèces (ci-dessus). Le peuplement piscicole est dominé par la truite, le vairon, le blageon et l'épinoche, suivi par le chabot et la loche. Ce peuplement est conforme à la typologie du cours d'eau (définie principalement par sa pente, sa température, sa distance à la source et son hydro-écorégion).


Ces deux graphiques comparent la richesse spécifique (en haut) et la densité / biomasse (en bas) des différentes stations d'étude. Sur la seule station comparable (Digeanne amont), on observe une baisse de richesse spécifique, de densité et de biomasse. Sur le principal objet des travaux (Digeanne travaux aval), on observe une richesse spécifique, une densité et une biomasse appréciables tenant à la colonisation rapide du nouveau milieu.

Dans le cas particulier de la truite, les observations convergent avec le graphique précédent : une petite baisse dans la station Digeanne amont, une hausse à l'aval. L'analyse détaillée des peuplements de truite (non représenté) montre une forte présence des alevins dans la zone des travaux aval, ce qui indique une colonisation du linéaire restauré par cette espèce.

Un bilan très positif pour l'Onema, mais très discutable selon nous
L'Onema considère que le bilan de l'effacement de la forge d'Essarois est "très positif", tout en posant la réserve d'un suivi dans la durée pour vérifier l'évolution des peuplements. Pour notre part, nous jugeons très discutable l'intérêt des travaux d'Essarois et la qualité du bilan (incomplet) qui en est fait par le Sicec. En voici les raisons :

  • le bilan chimique et physico-chimique de la rivière n'est pas réalisé, nous ne savons pas ce qu'il en est des nitrates, HAP, MES et autres facteurs connus pour dégrader l'eau du bassin Seine-amont et Ource;
  • plus généralement, l'analyse du tronçon avant / après au regard de l'éligibilité au bon état et chimique DCE 2000 n'est pas réalisée, donc nous ne savons pas si les travaux ont eu un impact sur ce qui est la seule obligation réelle de la France vis-à-vis de l'Europe;
  • aucune des espèces concernées par le tronçon n'est menacée dans le Châtillonnais ni dans le bassin de l'Ource, il n'y a donc pas d'urgence particulière à leur conservation (par rapport à d'autres espèces classées comme vulnérables ou à des grands migrateurs ayant disparu des cours d'eau);
  • il est attendu que l'ouverture d'un nouveau milieu produise un effet de colonisation (le contraire aurait été surprenant), mais l'examen des chiffres montre que le gain effectif reste faible (quelques dizaines à centaines d'individus) au regard des travaux conséquents;
  • l'argent public a servi à faire disparaître un témoin du patrimoine historique du Châtillonnais, en l'occurrence les éléments hydrauliques de ce qui fut la première forge à retour d'air chaud de Bourgogne. Sur place, rien n'a été fait pour valoriser l'intérêt patrimonial des ouvrages résiduels (qui sont invisibles et inaccessibles) ni au demeurant pour des activités récréatives ouvertes au public. La forge d'Essarois avait pourtant été reconnue pour l'"ancienneté exceptionnelle de ses vestiges" et la "continuité remarquable de son activité industrielle" (Benoit 1988)  ;
  • l'argent public a servi à faire disparaître un potentiel énergétique de production d'électricité bas-carbone, alors même que le réchauffement climatique est considéré par les chercheurs comme premier facteur de changement de peuplement piscicole dans le siècle à venir.
L'effacement des ouvrages hydrauliques de la forge d'Essarois et la renaturation de la rivière Digeanne sur 1500 m de linéaire sont représentatifs des travaux actuels de restauration de l'habitat en cours d'eau, présentés par les syndicats de rivière ou les autorités comme des initiatives de première importance pour les milieux. En réalité, si ces travaux ont certainement des effets positifs sur le milieu local et pour certains espèces inféodés aux eaux vives, leur impact reste néanmoins très limité et ne correspond à aucune urgence écologique. La dépense conséquente d'argent public ne fait pas l'objet d'une analyse coût-avantage, alors même qu'elle a des effets manifestement négatifs sur d'autres dimensions de la rivière (patrimoine, culture, énergie). S'il y a donc un enseignement d'Essarois, c'est que la généralisation de telles initiatives représenterait un coût disproportionné au résultat écologique et un choix public déséquilibré par rapport aux autres enjeux d'intérêt général liés à nos cours d'eau.

Références citées
Benoit S (1988), Patrimoine sidérurgique en Bourgogne du Nord : Guide de découverte, Association pour la sauvegarde et l'animation des forges de Buffon, 56 p.
Bouchard J et al (2014), Diagnostic piscicole de la Digeanne à Essarois suite aux travaux de restauration hydromorphologique, Onema, 27 p.
FDAAPPMA 21 (2011), Etude des peuplements macrobenthique et piscicoles de l'Ource et de ses affluents au regard de la qualité physique et chimique de l'hydrosystème, 110 p.

Illustrations : photographie par C Jacquemin / Arpohc ; graphiques issus du rapport Onema.

21/08/2015

Confiez votre ouvrage hydraulique au Sicec...

... et voilà ce qui arrivera. 19 août 2015, au petit matin : l'ouvrage Floriet a disparu de la Seine (Nod-sur-Seine, 21).


Ces travaux ont été menés en pleine alerte sécheresse sur le département, sous la direction du syndicat Sicec qui avait racheté le seuil en 2010 afin de mieux le détruire. Doivent encore disparaître sous les pelleteuses le moulin des Ecuyers à Châtillon, le moulin de la scierie de Cosne, le vannage du vieux moulin de Beaunotte sur la Coquille. On comprend sans difficulté qu'un nombre croissant d'élus locaux des bassins Seine et Ource s'inquiètent de cette politique destructive et ne souhaitent pas la voir appliquée sur les rives de leurs villages, dont le paysage est souvent dessiné par des ouvrages hydrauliques. Quant au bilan coût-bénéfice pour l'environnement de ces opérations financées sur argent public, il reste à établir. Nous y reviendrons prochainement à propos de l'effacement de la forge d'Essarois.

Edit, 27/08/2015 : suite à des échanges avec des lecteurs (voir commentaire), précisons que l'Onema a une station de mesure de qualité de la rivière à Nod-sur-Seine, notamment l'Indice poisson rivière (IPR) qui est l'indicateur piscicole retenu pour la directive européenne de qualité écologique des eaux (DCE 2000). L'IPR de 2013 signalait une qualité piscicole "bonne" de la Seine, avec score de 8,74. L'IPR de 2011 (rien en 2012) est "excellent" avec un score de 6,97. Il est donc important de comprendre que cette destruction sur argent public ne concernait pas une rivière présentant des problèmes graves pour le compartiment piscicole, puisque sur ce compartiment, la Seine à Nod est éligible au bon état écologique.

A lire sur le même sujet :
Désastre écologique à Vanvey
Rochefort-sur-Brevon se bat pour son patrimoine
Qualité de la Seine et de ses affluents en Côte d'Or

16/08/2015

Rochefort-sur-Brevon (21) se bat pour préserver son patrimoine hydraulique

Le Brevon est un petit affluent châtillonnais en rive droite de la Seine, long d'une trentaine de kilomètres. Il trouve sa source à Echalot et conflue à Aisey-sur-Seine. La rivière s'inscrit dans une superbe vallée qu'apprécient tous les amoureux de la nature, mais aussi du paysage et du patrimoine : son cours est jalonné de nombreux ouvrages hydrauliques formant des plans d'eau dans leurs retenues.

Le village de Rochefort-sur-Brevon, encaissé au pied d'un pittoresque éperon rocheux, saisit le visiteur par la beauté inactuelle de son bâti. On y trouve 3 sites classiques du patrimoine sidérurgique de la Bourgogne du Nord : la forge du Haut, au pied de la chaussée formant un étang, la forge du Bas avec sa cheminée d'affinerie caractéristique et, environ deux kilomètres à l'aval, la fenderie, elle aussi adossée à un seuil créant un étang.

Le site fait actuellement l'objet d'une étude par le bureau Artelia, commanditée par le syndicat de rivière Sicec. Enjeu : la continuité écologique. Le diagnostic dressé en 2011 par la FDAAPPMA 21 avait désigné cette succession de retenues comme un point noir (réchauffement de l'eau, rupture de continuité longitudinale). Dans ce cas de figure, les syndicats de rivière et les services instructeurs de l'Etat (DDT, Onema) tendent à favoriser les effacements totaux ou partiels des ouvrages hydrauliques et de leurs plans d'eau.

Les élus du village ont voté une délibération rappelant leur attachement profond à l'intégrité paysagère et architecturale du site. Ils rappellent que l'envasement de l'étang est dû à la dégradation assez récente du système de vannage. Les élus souhaitent que soit engagée la restauration la forge du Haut et que soit envisagée une production hydro-électrique locale.

Les associations Hydrauxois et Arpohc :
- rappellent que l'acharnement actuel à détruire la maximum d'ouvrages relève d'une écologie punitive sans proportion avec les enjeux environnementaux réels ;
- souhaitent que l'argent public soit dépensé avec discernement, tant pour restaurer la qualité des rivières que pour préserver le cadre de vie construit au fil des siècles par les riverains ;
- soutiennent pleinement le choix des élus et habitants de Rochefort-sur-Brevon en faveur de solutions non destructives ;
- se placent à leur disposition pour toute démarche qui serait jugée utile à la préservation du patrimoine hydraulique et à sa valorisation énergétique, ainsi qu'à l'amélioration environnementale par des mesures simples, proportionnées et de bon sens.

Illustrations : Christal de Saint-Marc (DR) ; Christian Jacquemin (Arpohc)

29/07/2015

Entre vocation hydraulique et renaturation écologique, les syndicats de rivière en pleine schizophrénie

Les événements de Vanvey continuent de propager leur onde de choc sur les communes riveraines de l'Ource, et par extension de la Seine car elle sont gérées par le même syndicat (Sicec). Ces deux dernières semaines, lors des réunions publiques ou des échanges de lettres ouvertes sur ces bassins, certains maires évoquent leur souhait de retirer l'adhésion de leur commune au syndicat. D'autres veulent un audit de gestion pour comprendre à quoi servent au juste les dépenses syndicales. Des remarques similaires ont été entendues ces derniers mois chez certaines communes adhérentes du Sirtava (rivière Armançon), peu satisfaites de l'insistance quelque peu obsessionnelle du syndicat à appliquer la continuité écologique au lieu d'autres travaux jugés plus importants par les élus.

Le rôle des syndicats contestés quand ils multiplient des opérations à l'intérêt douteux pour les riverains
Un motif évident d'insatisfaction, c'est que les syndicats consacrent désormais la plus grande ardeur (donc beaucoup de moyens humains et financiers) à la mise en oeuvre de certaines dispositions des SDAGE fixés par les comités de bassin des Agences de l'eau, dispositions dont beaucoup sont dérivées des décrets et circulaires de la Direction de l'eau au Ministère de l'Ecologie. Or, certaines de ces dispositions ont une portée discutable pour l'amélioration des milieux, et ne sont pas au centre des préoccupations des élus, sans parler des riverains propriétaires des parcelles qui en subissent les effets : reméandrements, créations de zones humides, interventions très pointues sur le morphologie… Rien de cela ne paraît de première importance au regard des autres enjeux vécus de façon très directe par les gens, comme la difficulté des agriculteurs ou des collectivités à respecter des normes environnementales aux contraintes de plus en plus lourdes à mesure que ces normes se font de plus en plus exigeantes et les coûts des travaux de moins en moins accessibles, le tout sur fond de croissance atone, de chômage persistant, de désertification et de vieillissement rural.

Sur le dossier de la continuité écologique longitudinale, les esprits s'échauffent encore plus facilement : au bord des rivières, c'est désormais le symbole des idées déraisonnables "venues d'ailleurs" (c'est-à-dire de quelque grande ville siège des bureaucraties de l'eau). Le choix de faire disparaître les seuils et barrages avec leur ligne d'eau, leur paysage familier, leur tenue de berge à toute saison paraît non seulement une dépense improductive et non prioritaire pour les habitants, mais elle est parfois ressentie comme une agression des idées abstraites et très éloignés des intérêts des premiers concernés, les riverains. Comme les syndicats de rivière embauchent souvent (en CDD) de jeunes chargés de mission frais émoulus de leurs écoles et portés (naturellement) à réciter ce qu'ils y ont appris, le message passe encore plus difficilement !

Mais le problème n'est pas qu'un défaut de communication. C'est un débat de fond que nous aurions dû avoir, mais n'avons jamais eu en France ni en Europe, car les questions de l'eau ont été confisquées par des experts (ou des lobbies).

Les syndicats schizophrènes entre leur mission hydraulique et l'injonction de renaturation
Revenons donc aux fondamentaux. Le syndicat de rivière est généralement un établissement public intercommunal. Sa fonction est de rendre service aux communes adhérentes en s'occupant de la gestion de la rivière, ce qui inclut par exemple la prévention des inondations, le retrait des embâcles et atterrissements, l'entretien et la restauration des berges, la lutte contre des espèces invasives. Jadis, et parfois encore sur certaines rivières, le syndicat assurait aussi la gestion des ouvrages hydrauliques (ouverture et fermeture des vannes, divers travaux de génie civil).

On a voulu convertir beaucoup trop rapidement ces syndicats de leur traditionnelle culture hydraulique vers une approche hydro-écologique, sans réel retour d'expérience ni base de connaissance très solide. Non pas que l'écologie des milieux aquatiques soit inintéressante : elle est au contraire passionnante! Mais c'est une question de mesure et de prudence dans la mise en oeuvre.

Cette évolution récente a poussé les syndicats à une certaine schizophrénie. Le discours devenu dominant de la "renaturation" des rivières comme horizon supposé émancipateur des riverains va en effet à l'encontre de leur mission fondatrice. Cette dernière consiste d'abord à mettre la rivière au service des communes et de leurs habitants, en évitant les sautes d'humeur imprévisible des cours d'eau (que ce soit les crues ou les assecs) et en produisant des paysages agréables aux riverains, aux usagers ou aux touristes. Cela suppose non pas de laisser la rivière et sa berge à elles-mêmes (faute de quoi elles deviennent vite inamicales à la présence humaine), mais au contraire d'intervenir en permanence pour réguler leur évolution.

On a pu lire dans l'Yonne républicaine (27 juillet 2015), à propos de travaux visant à supprimer deux barrages et créer une zone humide, ce discours étrange d'un technicien de rivière travaillant avec le Syndicat du bassin du Serein : "La rivière n'a pas besoin de l'homme, il intervient parce qu'il a besoin d'elle". Sans aucun doute. Et ce sont d'ailleurs les impôts de ses concitoyens qui paient ce technicien, pas la rivière...

Tandis que certains défendent une vision quelque peu idyllique et décalée du cours d'eau (la forcément sympathique rivière "sauvage"), ceux qui vivent au jour le jour cette rivière n'ont pas grande envie de la voir devenir ou redevenir "sauvage", et sont plutôt satisfaits des siècles de régulation des cours d'eau. On observe au demeurant les mêmes tensions dans le projet (GIP) de Parc naturel des forêts de Champagne et Bourgogne : certains mettent en avant des normes environnementales à ce point strictes qu'elles donnent clairement l'impression d'une volonté de supprimer des pans entiers de la ruralité pour rendre la nature à elle-même.

Sortir des tensions en commençant par sortir de la langue de bois
On ne peut pas se satisfaire de ce déséquilibre, de ces tensions. Nous sommes appelés à vivre et travailler autour des mêmes rivières, il faudra bien s'entendre. On ne saurait non plus, sous le coup de la colère, chercher des boucs émissaires, y compris chez les syndicats ne faisant généralement qu'appliquer des ordres venus de plus haut (les Agences de bassin, les services du Ministère en région soit les DDT Onema et Dreal).

Comment évoluer vers des rapports plus sereins? Voici quelque pistes :

  • les syndicats doivent retrouver le parler-vrai : on n'attend pas d'eux une enième régurgitation des textes des SDAGE, qui sont déjà eux-mêmes parfois jargonnants ou pompeux. De même, les syndicats ne sont pas seulement des machines à presser les boutons pour payer des bureaux d'études qui publieront des rapports de 200 pages peu lisibles (rapports eux aussi rédigés pour plaire à l'Agence de l'eau, à la DDT ou à l'Onema, et non pas pour réellement instruire le public et créer de la discussion);
  • les syndicats doivent produire du débat démocratique local, un débat interdit ailleurs : la "démocratie de l'eau" est quasi-inexistante à l'échelle parlementaire (les rapports critiques ne sont suivis d'aucun effet, le Ministère travaille au décret de façon autoritaire) et fort peu dynamique au niveau des comités de bassin (où la société civile est absente en dehors des usagers économiques et où l'essentiel se décide en commissions techniques). C'est sur le terrain que les débats se font et les syndicats doivent non seulement l'accepter, mais encore l'organiser;
  • les syndicats doivent défendre une vision équilibrée de la rivière, parce qu'ils sont les mieux placés pour savoir qu'entre les brillantes idées d'un aréopage de hauts fonctionnaires enfermé dans un bureau et la réalité du terrain, il y a un monde. Ce monde, c'est celui des rivières habitées par la présence humaine depuis des millénaires. L'idée de sortir brutalement de cette civilisation hydraulique n'est pas durable ;
  • les syndicats doivent rendre l'écologie positive, et non pas punitive : les dépenses en faveur de l'environnement rencontrent un consensus social plus ou moins important. Il faut favoriser les mesures les plus rassembleuses, et non s'acharner sur celles qui divisent et qui agressent. Et il faut faire remonter ce message de façon ferme aux financeurs (Agences) comme aux autorités (DDT-M, Onema, Dreal). 

Nous voulons un avenir respectueux de toutes les dimensions de la rivière, naturelles bien sûr puisqu'il faut viser son bon état chimique et écologique, mais aussi culturelles, sociales et économiques. La voie est étroite, mais cette voie existe. Ceux qui refusent les visions extrémistes ou réductionnistes de la rivière peuvent la construire ensemble.


Elus, associations, institutions, personnalités de la société civile : avec nous, demandez un moratoire sur la mise en oeuvre de la continuité écologique, afin d'éviter la destruction du patrimoine hydraulique et de permettre la recherche de solutions consensuelles, fondées sur la concertation et le retour d'expérience.

Illustration : la Bourgogne et ses rivières vues du ciel, © IGN Géoportail.

19/07/2014

Autre temps, autres mœurs: le rapport de Louis Suquet sur la Seine (1908)

On désigne par « perte » la propension d’un cours d’eau à voir disparaître son lit naturel par infiltration souterraine dans des zones calcaires (karstiques).  Lors des basses eaux (étiage), la rivière peut connaître des assecs complets sur une partie de son linéaire, qui alterne alors des pertes et résurgences.

Ce problème se pose depuis longtemps dans le bassin amont de Seine, en particulier autour de Châtillon-sur-Seine où la rivière, au débit peu soutenu en été, traverse des terrains géologiquement très perméables du Bathonien et de l’Oxfordien. La ville de Châtillon a procédé dès le début du XIXe siècle à une artificialisation du cours de la rivière (création d’un canal de dérivation), pour éviter les problèmes de salubrité liés au défaut d’eau, ainsi que le chômage complet de certaines usines et l’absence de ressource pour l’irrigation.  Mais le problème a néanmoins persisté.


Dans un rapport de 1908 (voir lien ci-dessous), Louis Suquet, ingénieur des Ponts et Chaussées, expose à M. le Maire de Châtillon-sur-Seine ses préconisations pour remédier aux pertes de la Seine.


Le document est très intéressant à lire, car il montre comment la création et la gestion des ouvrages hydrauliques concourent à un usage équilibré de l’eau. Sa lecture devrait intéresser les décideurs et techniciens du SICEC, syndicat de rivière désormais en charge du linéaire séquanien. La tendance actuelle à la « renaturation » des cours d’eau part de l’idée qu’on doit rendre aux rivières leur libre-cours. Hélas, les rivières font peu de cas des hommes, et leur libre-cours peut aussi bien signifier des crues en hiver que des sécheresses en été, toutes dommageables aux riverains et à leurs activités.

Comme le réchauffement climatique est par ailleurs appelé à modifier l’hydrologie, le Conseil scientifique de l’Agence de l’eau Seine-Normandie a récemment suggéré de réfléchir à deux fois avant d’effacer les ouvrages. Un conseil de bon sens, que M. Suquet n’aurait pas renié et que ses successeurs devraient méditer…

Référence : M. Suquet (1908), Etude sur les pertes de laSeine en amont de Châtillon-sur-Seine, 7 pages (pdf)

04/02/2014

Continuité écologique: la goutte d’eau qui fait déborder le bief…

Nous avons reçu Sur le devant de la Seine, le bulletin d’information du Sicec (Syndicat intercommunal des cours d’eau du Châtillonnais) et de Sequana, contrat de rivière Seine Amont sur les bassins de Seine, Ource, Laigne, Aube, Sarce et Arce.

En pages 2 et 3, un article sur le classement des rivières et la continuité écologique. Le bulletin étant (notamment) financé par les fonds versés par l’Agence de l’Eau Seine-Normandie, et l’Agence de l’Eau Seine-Normandie étant (notoirement) championne dans la politique aveugle de destruction des seuils et barrages, le contenu de l’article est (évidemment) un éloge de l’effacement présenté comme "solution optimum"


Information ou propagande ?
A l’appui de cet «argumentaire», le dessin ci-contre. Qui résume à lui seul la vision totalement biaisée de nos interlocuteurs. On voit la rivière «en présence d’un ouvrage», et c’est évidemment la désolation : des poissons morts, des bouteilles vides, des boites de conserve, un tas de sédiments que l’on imagine à peu près aussi pollués qu’un site Seveso. Tout cela ayant évidemment pour cause le seuil en rivière. Seconde image : la même rivière sans son barrage. Et là, miracle : les poissons nagent dans une eau limpide d’où toute pollution a disparu.

Cette image est un pur exercice de désinformation.

Et un exercice que nous jugeons extrêmement regrettable pour un syndicat de rivière ayant pour mission une information objective des citoyens et des élus.

La réalité des seuils en rivière pour les meuniers et usiniers, ce sont des monceaux de détritus qui sont retirés par eux chaque année de l’eau, car récupérés dans leurs grilles de bief. Cette pollution, c’est nous, c’est vous, c’est la France entière qui prend ses rivières pour des poubelles. Des dizaines, des centaines voire des milliers de kilos de détritus. Demandez par exemple aux petits producteurs de l’Ouche à l’aval de Dijon, qui récupèrent toutes les immondices de la Préfecture et de son si peu écologique lac Kir. (Il est vrai que les anciens biefs de la Capital de Bourgogne furent pour la plupart asséchés par des «modernisateurs» avisés,  donc leurs héritiers et «décideurs» de nos rivières n’ont sans doute plus tellement la culture hydraulique des Navier, Bazin et Darcy).


Même dans les rivières les plus modestes, même à proximité de leurs sources, on trouve de tels déchets. Voilà ci-dessus la vérité des rivières, la vérité que ne veulent apparemment voir ni les syndicats, ni les agences de bassin ni les autorités en charge de l’eau. (Merci à Pascal qui a photographié ces ordures retirées de sa grille).

La réalité est donc à l'opposé du discours du Sicec : des seuils et biefs bien gérés contribuent à la qualité de l'eau.

Répéter 100 fois un mensonge n’en fait jamais une vérité…
Sur le fond, il est inacceptable de continuer à laisser croire que le seuils et barrages forment la première cause de dégradation des rivières. Répéter 100 fois un mensonge n’en fera jamais une vérité.

Il n’existe aucune base scientifique robuste à la désignation des seuils et barrages comme cause principale ou même importante d’altération de la qualité de l’eau. Si les 50.000 à 70.000 moulins de France détérioraient gravement la faune piscicole, il n’y aurait plus un seul poisson dans nos cours d’eau depuis longtemps. Si les 50.000 à 70.000 moulins de France empêchaient le jeu de l’érosion, du transport et de l’alluvion, leurs retenues seraient comblées depuis belle lurette. Car des moulins, il y en avait plus encore voici 150 ans, et ni les truites ni les écrevisses ne manquaient à l’appel.  Quand des impacts existent – et ils peuvent très bien exister –, ce sont des aménagements simples et de bon sens qui doivent les corriger, pas des destructions pseudo-écologiques à la pelleteuse financées par le contribuable sans lui demander son avis.

Le pire est que le Sicec est bien placé pour le savoir : il a réalisé en 2011-2012 un état zéro du bassin de Seine Amont qui concluait que les premiers facteurs d'impact restent les pollutions. Mais alors, pourquoi ce premier numéro de Sur le devant de la Seine n'est-il pas justement consacré à ce problème prioritaire? Pourquoi encore et encore rabâcher le catéchisme de la destruction du patrimoine hydraulique?

L'échec de la politique de l'eau se cherche des boucs émissaires et des écrans de fumée
Mais peu à peu, on commence à comprendre la vérité des rivières et des aquifères : la France a 20 ans de retard sur le traitement des pollutions d’origine agricole, industrielle, ménagère, pharmaceutique. Les seuils et barrages paient l’échec des politiques de l’eau, échec acté par la Cour des Comptes, et encore l’année dernière par le rapport Lesage et par le rapport Levraut, échec qui vaut déjà à la France une nouvelle condamnation pour non-respect de la directive Nitrates de 1991, échec qui lui vaudra soyons-en sûr sa condamnation future pour non-respect de la Directive cadre sur l’eau 2000, de la Directive Pollutions de 2008 et de la Directive Pesticides de 2009.

Ceux-là mêmes qui sont les premiers responsables de ce désastre – les Agences de l’eau créées en 1964, les responsables successifs du Ministère de l’Ecologie et de sa Direction de l’eau, les lobbies ayant l’écoute de Matignon ou de l’Elysée et ayant construit un Grenelle bancal qui ne traite aucun problème de fond mais saupoudre de l'illusion d'action efficace – et qui devraient en rendre des comptes aux citoyens et aux élus essaient depuis quelques années de travestir leur inaction passée par un surcroît stérile d’agitation sur la question des seuils et barrages.

Au fond, ce dessin caricatural promu par le Sicec nous dit une vérité sans bien s’en rendre compte. On ne lutte pas contre la pollution, on se contente de la faire disparaître du regard. De la faire filer au plus vite vers les estuaires et vers les océans. Là où elle ne se voit plus, et permet à chacun de dormir tranquille. Face à cette bonne conscience retrouvée à bon compte, que valent quelques vieilles pierres de nos biefs?

Source : Sicec Sequana (2014), Sur le devant de la Seine, n°1, 8 p.

Pour en savoir plus sur Hydrauxois :
Sur les truites qui ne meurent pas des seuils et barrages
Sur les écrevisses qui ne meurent pas des seuils et barrages
Sur l’Armançon qui n’est pas dégradé au premier chef par les seuils
Sur le Serein qui n’est pas dégradé au premier chef par les seuils
Sur la Seine qui n’est pas dégradée au premier chef par les seuils
Sur les nitrates qui ne reculent guère depuis 20 ans
Sur les mesures de pollution qui sont incomplètes ou inexistantes

Pour en savoir plus sur OCE :
Dossier complet de la Continuité écologique en Côte d'Or
Absence de liens entre seuils et indice de qualité piscicole
Absence de liens entre moulins et qualité de l’eau au XIXe siècle
Corrélation douteuse entre taux d’étagement et qualité piscicole