28/09/2019

La loi encourage désormais la petite hydro-électricité et elle devra être respectée... même par l'administration!

Avec l'adoption définitive par le Sénat de la loi "énergie et climat", le parlement vient de décréter "l'urgence écologique et climatique", en appelant le pays à l'accélération de sa politique bas-carbone. En particulier, députés et sénateurs ont tenu à inscrire dans le marbre de la loi que la politique nationale de l'énergie encourage la petite hydro-électricité. Les termes sont donc clairs désormais : non seulement les lois sur la continuité ne demandent pas de détruire les ouvrages hydrauliques, mais les lois sur l'énergie demandent d'aider à leur équipement électrique. Tel est l'intérêt général exprimé par nos représentants élus. Compte-tenu de l'opposition manifestée l'été dernier par le ministère de l'écologie à ce choix parlementaire, nous appelons chacun à la plus grande vigilance dans la mise en oeuvre de la loi. On sait en effet que certaines administrations de l'eau s'entendent à interpréter à leur convenance les textes: l'opacité en ce domaine est leur alliée, la transparence leur adversaire. Toute entrave à des projets hydro-électriques ou toute ignorance volontaire de l'hydro-électricité dans une programmation publique pertinente pour le climat devra donc faire l'objet d'un signalement au préfet, d'une saisine des parlementaires et d'une communication aux médias, le cas échéant de recours contentieux. Il s'agit désormais de libérer les freins pour que les moulins, forges et petits barrages s'engagent pleinement dans la transition bas-carbone.


Le beau projet Provence Energie Citoyenne, voir ce film. DR

Le jour de la mort du président Jacques Chirac - qui avait prononcé en 2002 les mots célèbres "notre maison brûle et nous regardons ailleurs" -, le Parlement a définitivement adopté, jeudi 26 septembre la loi dite "énergie et climat" qui transpose la programmation énergétique pluri-annuelle de la France.

Parmi les mesures générales de cette loi :

  • l'"urgence écologique et climatique" est décrétée,
  • la "neutralité carbone" est l'objectif de la France à l’horizon 2050,
  • une baisse de 40 % de la consommation d’énergies fossiles est attendue d’ici à 2030,
  • la fermeture des dernières centrales à charbon sera actée avant 2022,
  • la réduction à 50 % de la part du nucléaire dans la production électrique est reportée de 2025 à 2035,
  • le soutien à la rénovation thermique du bâtiment par des primes sous condition de revenu remplace le crédit d'impôt,
  • le Haut Conseil pour le climat est installée comme instance d'évaluation et orientation des politiques publiques.

Mais cette loi a aussi été l'occasion pour les parlementaires de rappeler - contre l'avis du ministère de l'écologie - le soutien de la France à l'énergie hydraulique, et en particulier à la petite hydro-électricité.

Ainsi, l’article L. 100-4 du code de l’énergie comportera après parution au JO la disposition suivante
"I. – Pour répondre à l’urgence écologique et climatique, la politique énergétique nationale a pour objectifs (..)
4° D’encourager la production d’énergie hydraulique, notamment la petite hydroélectricité"
La petite hydro-électricté est donc de nouveau soutenue par la loi, comme elle l'était déjà dans l'article L 211-1 code de l'environnement définissant la "gestion équilibrée et durable de l'eau", ce que le Conseil d'Etat a encore rappelé en 2019 en condamnant le ministère de l'écologie dans une affaire de refus de relance de moulins : ce n'est pas rien, et il importe désormais de rappeler cette orientation majeure à certains acteurs qui font tout pour freiner cette énergie, voire pour la combattre.

En France, nous savons combien les lois tiennent à la bonne ou à la mauvaise volonté de l'administration d'en assurer l'exécution. Le fait que le ministère de l'écologie, par la voix de M. de Rugy puis celle de Mme Wargon, ait donné un avis négatif à cet amendement en juin et en juillet suggère que nous allons encore devoir affronter le conservatisme de certains fonctionnaires de l'eau et de la biodiversité, quand ce n'est pas l'abus de pouvoir visant à interpréter la loi à la convenance de quelques bureaucraties non élues.

Pour prévenir ce risque de déni démocratique, nous appelons dès à présent tous les acteurs - particuliers, professionnels, communes, leurs associations et syndicats - à organiser la transparence complète sur les difficultés qu'ils rencontrent dans la menée des projets hydro-électriques, et en particulier la petite hydro-électricité. Chaque comportement de l'administration visant à entraver un projet (soit en l'interdisant, cas rare, soit en multipliant à dessein des complications incessantes, ruineuses et disproportionnées à l'impact, cas fréquent) devra faire l'objet d'un signalement au préfet doublé d'une saisine du député et du sénateur de la circonscription, afin de faire constater le trouble dans l'exécution de la loi.

Outre les projets portés dans tous les territoires, ce sont aussi les programmations politico-administratives fixant les financements et les orientations qui devront refléter la loi : SDAGE, SRADDET (ex SRCE et SRCAE), SAGE. C'est aux associations et aux syndicats de rappeler ici aux responsables de l'élaboration de ces programmations la nécessité de développer l'hydro-électricité, et de le faire sur la base des travaux de la recherche : par exemple, Punys et al 2019 ont montré l'existence de près de 25 000 moulins français pouvant être relancés dans la métropole, donc nul ne peut prétendre qu'il n'existe pas de potentiel (voir ce dossier à diffuser).

Enfin, certaines associations à agrément et financement public - nous pensons précisément aux fédérations de pêche - sont tenues à un devoir de réserve dans l'exercice de missions d'intérêt général qui leur sont confiées et, bien sûr, à une obligation de respecter les lois. Comme certaines fédérations se permettent des propos militants sur un domaine qui n'est pas de leur compétence (l'énergie), une semblable vigilance devra s'exercer à leur endroit, avec si besoin une demande au préfet de rappel à l'ordre des acteurs qui outrepassent leurs missions.

Pour tous ces sujets, n'hésitez pas à signaler des cas problématiques à notre association.

Qu'il s'agisse de la continuité ou de l'énergie, la politique des ouvrages hydrauliques sera "apaisée" en France quand la loi sera enfin admise et reconnue par tous. La loi française n'a jamais demandé la destruction des ouvrages hydrauliques au nom de la continuité, la loi française a demandé à l'Etat d'assumer le coût des "charges spéciales" que ses politiques environnementales de continuité engagent, la loi française encourage l'équipement hydro-électrique des ouvrages: c'est donc sur cette base démocratique et sur elle seule que les échanges doivent se tenir désormais sur le terrain.

A lire et diffuser :
Les moulins à eau au service de la transition énergétique, dossier 2019

6 commentaires:

  1. Prendre le prétexte énergétique pour la sauvegarde de nos moulins est de bonne guerre .. mais montre que vous ignorez que la petite hydraulique n'a pratiquement rien à voir avec les anciens moulins. Par ailleurs la petite hydraulique (la vraie et pas l'équipement des moulins pour la production hydroélectrique) est malheureusement en plein boum : plus de 100 projets sont actuellement en cours d'instruction rien que dans les Alpes et on ne voit pas comment on pourrait accélérer en la matière ... par ailleurs la petite hydraulique comme les autres sources d'énergies renouvelables électrogènes n'a aucun effet sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre mais n'a pour objet que de réduire la part du nucléaire dans notre mix énergétique... enfin quand vous fustigez les fédérations de pêche dans leur prétention à s'engager sur un terrain qui serait situé en dehors de leur compétence... je pense que vous feriez mieux de vous interroger sur votre propre compétence et celles des propriétaires de moulins dans le domaine énergétique.

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    1. Les membres de notre association ont déjà aidé de nombreuses relances de moulins. La production d'un moulin remplace tout ou partie d'anciens chauffages fioul ou injecte sur le réseau. Donc nous vous remercions de vos grandes "leçons" sur l'énergie, mais en fait, nous allons simplement continuer notre travail bénévole, en espérant qu'il soit désormais aidé et non combattu par l'administration. Voyez, on ne demande pas la lune, juste la possibilité de produire bas carbone chez soi.

      Concernant l'électricité, il ne vous a pas échappé que l'on parle de remplacer dès aujourd'hui et d'ici 2040 des dizaines de millions de moteurs thermiques pétrole par des moteurs électricité ou hydrogène (impliquant électrolyse), que les nouveaux usages comme le numérique sont très gourmands en électricité, qu'en tout état de cause la loi française demande la réduction de la part nucléaire, choix déjà opéré par beaucoup de pays dans le monde. L'illusion selon laquelle nous aurions foison de choix pour la transition énergétique est dramatiquement fausse : même avec les économies d'énergie, aucune société moderne n'existe sans une consommation par habitant assez élevée, et les choix ne sont pas si nombreux vu la remarquable densité énergétique massique et facilité d'usage du pétrole (du fossile en général). La France est déjà en retard sur ces objectifs carbone, et elle accumule ces retards. Des millions de gens manifestent et pétitionnent là-dessus. Il est vrai que la France dépense de l'argent public pour casser des barrages hydro-électriques et des moulins, ce qui ne l'aide pas à atteindre ses objectifs bas-carbone. Mais quand les dirigeants vont se retrouver devant les tribunaux, ce sera moins drôle. D'autant que les dépenses sur l'eau ne parviennent pas elles non plus à atteindre les objectifs DCE, notamment à faire reculer les polluants émergents qui inquiètent les citoyens bien plus que les moulins ou étangs.

      Nous vous laissons le soin d'expliquer tout cela à vos amis pêcheurs de saumons, qui font vroum vroum pour aller de spot en spot traquer des espèces protégées, voire qui se flattent d'aller taquiner la bête fort loin de la France...

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  2. Magnifique film sur le projet "Provence Energie Citoyenne"... encore plus beau que les films de l'agence de l'eau Seine-Normandie sur l'arasement des barrages, avec la petite musique entraînante, la liste complète des mots-clés à citer, les beaux sourires qui vont bien... Les agences de communication ont de belles années devant elles!

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    1. Vous avez raison, c'est beaucoup plus beau que ce que fait l'agence de l'eau.

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  3. Bonjour, j'aimerais connaître le fond de votre pensée quand vous dites : "Par ailleurs la petite hydraulique est MALHEUREUSEMENT en plein boum" pourquoi malheureusement ? Vous trouvez que vous n'avez pas assez de cours d'eau pour vous amuser ? que vous ne tuez pas assez de poissons ? sachant qu'en période de sécheresse les canaux des petites centrales hydrauliques servent de réserve sans quoi il y aurait encore moins de poissons et je parle en connaissance de cause. Et les bourdes des fédérations de pêche lors de pêche électrique (quand vidange de canaux)qui ne prennent pas de cuves oxygénées et qui laisse mourir des poissons sur le sol car ils ne sont pas dans la bonne rivière....
    Et de toute façon les anciens le disaient, avant les rivières étaient asséchées quand les centrales tournaient et il y toujours eu du poisson, sauf que maintenant la pollution est là et les poissons ne le sont plus.
    Et l'hydraulique, le photovoltaïque, l'éolien ont pour but de rendre le particulier plus autonome en énergie et la finalité est d'arrêter le nucléaire avec l'uranium qui produit des déchets radioactifs.
    Alors la critique constructive c'est bien mais la votre est plutôt inutile.

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  4. Bonjour messieurs
    Je lis avec intérêt vos articles mais je trouve que vous avez dee la difficulté à vous conformer aux textes de lois
    Vous avez raison dans tous vos articles mais je constate que la France possede dans ses codes plusiers textes qui vous permettrez de vous défendre avec plus de moyen juridique
    Le code de l'environnement fait état de la prhase suivant :
    II. - Leur connaissance, leur protection, leur mise en valeur, leur restauration, leur remise en état, leur gestion, la préservation de leur capacité à évoluer et la sauvegarde des services qu'ils fournissent sont d'intérêt général et concourent à l'objectif de développement durable qui vise à satisfaire les besoins de développement et la santé des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Elles s'inspirent, dans le cadre des lois qui en définissent la portée, des principes suivants, il me semble que cet article a été confirmé par un arrêt du Conseil d'Etat, le même CE nous informe: De prime lecture la DCE n'impose pas ll maintien ou le rétablissement de la continuité écologique
    il nous explique également que seul les ouvrages a construire devrons comporter ces dispositifs. Partant de ce constat j'ai recherché avec l'aide de juristes que le CE avait raison puisque la cour Européenne des droits de l'homme a condamnée la France pour la rétroactivité des lois civiles,j'ai cherché sur la toile et j'ai trouvé que la cour de cassation était la gardienne de la non rétroactivité de la loi que le Conseil d'Etat avait également confirmé par un arrêt en 1948 le journal l'Aurore qu'il ne pouvait y avoir de rétroactivité de la loi
    Il ne peut y avoir de rétroactivité que pour les lois pénales si elles sont plus douce
    Par ailleurs je vous précise que les textes européens transposés en droit national sot supérieur au droit national, alors si l'Europe demande le développement de hydroélectricité pourquoi la France refuse de l'appliquer?
    Si vous êtes les assos, vous n'arriverez jamais à vous défendre vous n'aurez jamais raison
    Cordialement

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