11/02/2021

Aux sources de la Seine, on tourne la page de la casse brutale et absurde des ouvrages en rivière

Après dix ans de harcèlement des ouvrages hydrauliques en vue de les faire disparaître, la nouvelle équipe du syndicat Sequana, dirigée par Philippe Vincent, entend tourner la page de la continuité écologique destructrice pour ouvrir celle de la continuité "apaisée". Nombre de chantiers avaient fait disparaître des chutes, retenues, étangs et biefs de ce magnifique pays en tête du bassin de la Seine. Or, les ouvrages hydrauliques, remontant aux cisterciens du Moyen Âge pour les plus anciens, présentent de formidables atouts pour le développement durable du territoire, qui vient d'être en partie intégré au parc national des forêts de Champagne et Bourgogne. 


Photo extraite du journal Le Châtillonnais et l'Auxois, droits réservés. 

Dans son édition du 4 février 2021, le journal le Châtillonais et l'Auxois publie un entretien avec Philippe Vincent, le nouveau président du syndicat (Epage) Sequana. Cet établissement regroupe 126 communes de Côte d'Or, Yonne et Haute-Marne en charge de la gestion des cours d'eau et milieux aquatiques du bassin versant amont de la Seine, qui s'étend des sources de la Seine jusqu'à la limite avec le département de l'Aube.

Les associations Hydrauxois et Arpohc, suivies de consoeurs comme l'association des riverains de Chamesson, ont eu des rapports difficiles avec Sequana comme avec d'autres syndicats en tête de bassin bourguignonne de la Seine et de l'Yonne. 

L'agence de l'eau Seine-Normandie, la DDT et l'Office français de la biodiversité (ex Onema) ont mené dès le début des années 2010 une campagne agressive visant expressément à la destruction des ouvrages hydrauliques. Loin de s'y opposer, la précédente équipe du syndicat adoptait ce discours sans esprit critique, voire avec une volonté de renaturation et ré-ensauvagement des milieux allant très au-delà des termes de la loi. La même chose fut observée avec le syndicat SMBVA sur l'Armançon, plus au sud du département de la Côte d'Or. La dimension historique et énergétique des ouvrages était négligée, leurs milieux en eau n'ont fait l'objet d'aucune étude sérieuse de biodiversité hors le seul prisme des poissons migrateurs et rhéophiles. Les propriétaires se sont vus offrir des ponts d'or public pour détruire les ouvrages et assécher les biefs (jusqu'à 100% de prise en charge, avec divers travaux d'aménagement en sus) alors qu'ils étaient l'objet d'une instruction hostile et de subventions très faibles voire nulles s'ils désiraient conserver les ouvrages hydrauliques, les retenues et les biefs en eau. Sur les bassins de la Seine et de l'Ource, de nombreux ouvrages ont été détruits à contre-coeur, car c'était la seule solution financée. Mais c'est aussi sur ce bassin que Gilles Bouqueton et sa compagne, soutenus par nos associations et par une cagnotte de citoyens donateurs, ont obtenu après 7 ans de lutte obstinée une victoire décisive au conseil d'Etat en 2019 (arrêt moulin du Boeuf). Les conseillers ont condamné sur toute la ligne des pressions illégale menées par les représentants du ministère de l'écologie. 


Cela relève aujourd'hui du passé, en tout cas pour ce qui est de la politique syndicale. La nouvelle équipe de l'Epage Sequana entend désormais prendre au mot la "continuité apaisée" telle qu'elle est officiellement promue par le ministère de l'écologie. Et l'apaisement signifie que l'on ne regarde plus les moulins, forges et étangs comme des adversaires de l'écologie, mais comme des partenaires du territoire.

Le président de Sequana précise ainsi :"Les effacements d'ouvrages sont liés à une politique environnementale. La loi qui régit ces actions n'oblige pas l'effacement mais l'aménagement pour respecter la continuité écologique et les débits minimums biologiques. Un ouvrage n'ayant plus aucun usage pourrait effectivement être supprimé. Mais il faut être très prudent. Un ouvrage quel qu'il soit a eu une utilité et aujourd'hui avec les assecs de ces dernières années, toutes les retenues d'eau auront une action sur l'écoulement de nos cours d'eau et donc une préservation de la ressource. Autre point important souvent négligé, la prise en compte des aspects patrimoniaux et sociétaux, paysager et historiques concernant ces ouvrages, mais également tous les monuments, lavoirs... au fil de l'eau qui fait que notre territoire est aujourd'hui Parc National".

Il entend également rouvrir le dossier de certaines dépenses votées par la précédente équipe, mais ne correspondant pas à l'intérêt général du Châtillonnais et à la protection de la ressource en eau : "Aujourd'hui, nous avons une problématique importante liée à l'effacement de l'étang de Rochefort-sur-Brevon. Le propriétaire vient d'accepter l'effacement, la commune semble d'accord, mais nous pensons que cet argent public serait mieux investi dans l'alimentation du réseau d'eau potable que dans ce projet sur un bien privé aux bénéfices discutables en termes de continuité écologique. Nous allons revenir très rapidement sur ce sujet".

Rappelons qu'à Rochefort-sur-Brevon, véritable petit joyau du patrimoine sidérurgique du Châtillonnais, le syndicat Sequana proposait de dépenser 80 000 euros d'argent public pour détruire des radiers de vannages et réduire considérablement la superficie de l'étang, cela alors que l'aménageur reconnaissait que la rivière Brevon présente des éperons rocheux naturels qui la rendent de toute façon infranchissable aux poissons... Pourquoi cette gabegie? Pourquoi l'administration avait-elle classée la rivière en 2012 en "liste 2" au titre de la continuité écologique? Ce sont toutes ces incohérences qui excèdent les riverains, alors que l'argent public est si rare et que l'eau renvoie à de multiples enjeux d'intérêt général. 

Les associations félicitent la nouvelle équipe du syndicat Sequana, et entendent mobiliser les propriétaires d'ouvrages hydrauliques au service des projets de territoire. Face à la sévérité croissante des assecs comme à la brutalité des crues, à la nécessité de développer l'énergie locale bas-carbone, au besoin de protéger les milieux aquatiques et les zones humides, beaucoup de travail nous attend. Les moulins, forges, étangs et plans d'eau du territoire sont des atouts à valoriser, en particulier avec le création du parc national des forêts des Champagne et Bourgogne, impliquant un tourisme de qualité et de proximité à inventer. 

4 commentaires:

  1. Pour info, l'intégralité des réponses à l'enquête publique émises par les habitants de Rochefort étaient opposées au projet de Sequana à la seule exception de celle du nouveau maire de Rochefort (qui ne l'était pas à l'époque). Le rapport du fonctionnaire en charge de recueillir les avis n'en n'a absolument pas tenu compte. Procédé fort peu démocratique!

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  2. L'ancienne présidence n'a pas soutenu que des destructions, fort peu nombreuses au demeurant et toujours avec l'accord du propriétaire. Elle à même largement financé, sur fonds publics des passes à poissons pour maintenir le barrage de Gomméville et produire une électricité propre. Mais contrairement aux propos moqués de F.Ribery :la roue tourne n'a jamais tourné et pas un microkilo, n'est sorti de cette merveille.

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    1. Gomméville c'était il y a combien, 10 ou 12 ans? Sous quelle présidence, M. Stutz ou M. Naudinot son successeur? Nul n'ignore que ce fut l'une des rares PAP construites dans la région, alors que l'ex directrice et l'ex président de Sequana ont surtout à leur actif des casses d'ouvrages, sans aucune résistance aux pressions règlementaires de la DDT 21 et chantage financier de l'agence de l'eau SN. Mais c'est du passé, avec l'ordre politique de parvenir à une continuité "apaisée" et les naufrages de la DEB au conseil d'Etat, un fonctionnaire en charge du sujet a compris qu'il récoltera un procès s'il persiste à venir avec l'idée de forcer à détruire. On attend cependant les solutions concrètes pour les PAP et autres. Sans doute le temps que cela rentre, notre administration est réputée un peu lente...

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  3. un examen général des ouvrages avait été effectué en 2005.sous l'égide du SIHHS.j'ai appris au cours de la présentation générale des résultats à châtillon le 2 juin 2005, que pour conserver le droit d'usage, des travaux de mise en conformité s'élevant à 210 000€ étaient à prévoir,sous déduction éventuelle de 107000€ correspondant à l'effacement.
    le site produisait alors l'électricité destinée au chauffage de l'habitation
    le 27 novembre 2007, j'ai alors écrit ce qui suit au Président du SIHHS(M Stutz)"l'état des vannages de décharge est celui que l'on peut attendre d'ouvrages de plus de 150 ans, qui ont toujours été (et qui sont toujours) surveillés et entretenus.Ils assurent convenablement le passage des eaux pendant les crues ainsi que leur retenue durant les étiages, ce qui ne signifie pas qu'il ne faut rien faire pour les sécuriser, les consolider, les moderniser.
    Le site présente un potentiel hydroélectrique non négligeable. A l'heure où les énergies renouvelables retrouvent droit de cité, il nous (mon frère et moi)semblerait regrettable de le supprimer.
    Nous sommes donc favorables à l'étude d'une solution correspondant au maintien de l'usage, dans le cadre d'un projet qui contribuerait au développement durable et à la consrvation du patrimoine local.
    Le Maire de Gomméville s'est déclaré d'emblée interessé.
    Pour pouvoir bénéficier de toutes les aides, il fallait que la commune soit propriétaire.Nous avons accepté la proposition qui nous a été faite sur la base du prix établi par l'Administration des Domaines et signé l'acte de vente le 22 octobre 2008.

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