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15/10/2023

La disparition programmée du lac du Bagnoles-de-l’Orne, gabegie publique en temps de crise de l’eau

Un curage soi-disant impossible selon la préfecture, des travaux soi-disant obligatoires alors que la rivière n’est pas classée en zone d'intérêt pour la continuité, un projet soi-disant écologique de déconnexion d’un lac qui va entraîner à terme sa pollution et sa disparition, une dépense publique de plusieurs millions d'euros nuisible au cadre riverain, sans rapport aux besoins critiques de sécurisation de l'eau, l'énergie et de l'alimentation pour le pays : les ingrédients de la continuité pseudo-écologique ordinaire et absurde sont réunis à Bagnoles-de-l’Orne. 


« Approuvez-vous le projet de désenvasement du lac et de restauration de la continuité écologique de la Vée par la création d’une digue rendant indépendants le lac et la rivière? » : telle était la question qui a été soumise sous forme d’un référendum aux habitants de Bagnoles-de-l’Orne, le 8 octobre 2023. Alors que les listes électorales comptaient 2 214 inscrits, 1 060 se sont déplacés, soit 47,87 %.  Le oui a totalisé 614 voix, soit 59,15 % et le non, 424 voix, soit 40,84 % Comme cela avait été annoncé lors de la réunion publique, le taux de participation au référendum n’ayant pas atteint les 50 %, «ce résultat n’est donc qu’un avis et la décision sera soumise au conseil municipal, sans doute lors de la séance du 16 octobre prochain» a confié le maire.

Pourquoi la commune de Normandie a-t-elle été amenée à ce projet ? 

Le cas est représentatif de ce qui se passe encore dans trop d'endroits en France. La commune a été confrontée aux besoins de curer son lac, ce qui fait partie de l’entretien normal, nécessaire et régulier des plans d’eau. Aussitôt les services de l’Etat en charge de l’eau, dont certains sont acquis à une vision intégriste de destruction des patrimoines hydrauliques, ont prétendu que ce curage ne serait pas possible. Et procédé au chantage usuel exercé sur les particuliers et collectivités :  la commune, si elle voulait recevoir des aides publiques, devait faire disparaitre l’hydrosystème actuel pour donner libre cours à la rivière et transformer le lac en un plan d’eau déconnecté, appelé probablement à disparaître à terme.

Nous publions ci-dessous l’avis d'un représentant du collectif riverain



"L'argument posant que  la DCE (Directive cadre sur l'eau)  oblige à la continuité écologique est un mensonge. La DCE ne demande pas de restaurer systématiquement une continuité, elle en fait un élément d’appréciation. Ni sa transposition en droit français. La continuité en long  dns ds rivières à migrateur notion qui est apparue plus tard, dans la loi française sur l’eau de 2006, en réécriture d’une demande des pêcheurs déjà présente dans la loi de 1984.

La Vée, au niveau du lac,  n'est pas classée en enjeu de continuité, ni en liste 1 ni en liste 2 au titre de l'article L 214-17 du code de l'environnement. Il n'y a donc aucune obligation de restaurer cette fameuse continuité écologique. Cet élément a d'ailleurs été confirmé aux riverains par le conseiller en charge du projet. Donc pourquoi l'avoir évoqué à plusieurs reprises et notamment dans la réunion publique au CAB ? C'est étrange cette position de vouloir entreprendre à tout prix une chose qui n'est pas imposée par la loi mais qui coûte au bas mot 3 millions selon le porteur du projet.

Le désenvasement du lac actuel est tout à fait possible. Un décret ministériel  du 9 juin 2021 précise les modalités de sa réalisation. Prétendre que cette une action impossible est un mensonge. Un lac peut être curé. Ne pas l'avoir fait pendant plus de 20 ans est une faute de mauvaise gestion des affaires municipales. Si la préfecture ne le permet pas, sa décision est contestable devant le juridiction administrative jusqu'au conseil d'État.

Il est nécessaire aussi de savoir ce que vont devenir les boues du nouveau lac si  le projet se fait. J'ai posé cette question plusieurs fois sur qui paiera ce traitement de boues de ce nouveau" lac", jamais une réponse. Donc ce sera le contribuable qui paiera le traitement de ces boues super polluées.

Au titre de la convention de Ramsar ( ratifiée par la France) et de la plupart des documentations techniques, un lac ou un étang sont des zones humides, sans que l’origine artificielle ou naturelle soit le critère déterminant. Ceci s'applique à  toute la France, y compris dans l'Orne, contrairement à ce qu'affirme le porteur du projet qui reporte les propos de la préfecture. Et les zones humides sont protégées par la loi, faire disparaitre une zone humide est illégal, dans l'Orne aussi. Méconnaître ce point et ne pas l'avoir analyser avant c'est grave.

L'article de loi L211-1 du code de l'environnement protège également les zones humides. Prétendre unilatéralement que le lac n'est pas une zone humide et entreprendre des actions de destruction de zone humide, c'est agir illégalement. Les bureaux d'études grassement payés sur fonds publics qui n'attirent pas l'attention des porteurs de projets sur ces articles, ne sont pas fiables et professionnels. Ils mettent les élus devant des positions difficiles.

Les scénarios de crues ne sont pas du tout abordés par le bureau d'étude, ni en ce qui concerne la Vée et l'impact sur l'aval (les Thermes notamment) et encore moins en cas de débordement du bassin de rétention des eaux de pluies, pompeusement appelé Lac dans le projet. La pollution qui rejoindrait inévitablement la Vée serait catastrophique pour les organismes vivants dans la rivière.
Cette prévention des inondations est primordiale pour les populations et aurait dû être présentée dans les documents à disposition avant le référendum. L'article de loi L211-1 aborde également ce point

En faisant tomber le barrage actuel, on laisse un libre accès aux espèces invasives pour qu'elles remontent la Vée et aillent déstabiliser les milieux protégés en amont et notamment dans une portion de la Vée classée en liste 1 en amont de Bagnoles. La liste 1 se caractérisant par un bon état écologique, avec des organismes aquatiques en bon équilibre. Laisser ces zones en libre accès aux espèces invasives est contraire à la recherche et au maintien du bon état écologique de la Vée. 

Le fonctionnement du bac de rétention des eaux de pluies ( le nouveau "lac") n'est absolument pas décrit et anticipé. 

On parle d'évaporation de l'ordre de 1000 m3 , pour un apport en eau de l'ordre de 3000 M3 , mais tout phénomène d'évaporation s'accompagne d'un phénomène de concentration en minéraux et polluants. Le lac actuel s'évapore également, mais les minéraux et polluants sont dilués et évacués par le débit de la Vée. Avec la déconnexion ce sera rapidement un milieux invivable qui sera offert aux rares organismes qui tenteront de coloniser cette nouvelle retenue. Les boues devront y être traitées également, qui paiera?

Conclusion : ce projet n'est pas assez détaillé et travaillé ni dans son aspect technique ni dans son aspect légal. Dire OUI, c'est la disparition pure et simple du lac en deux étapes : 
  •  d'abord on sépare la rivière pour lui laisser son " cours naturel" celui de l'époque où l'homme ne l'avait pas domptée. C'est ce que l'on appelle chez les écolos intégristes, le désanthropisation des milieux. C'est un dogme qui dit que tout se que l'homme a fait dans la nature est mal. 
  • pour calmer les Bagnolais on crée un nouveau lac complètement déconnecté de la Vée. Ainsi on garde la carte postale , amputée de 30% , quand même.. mais ce lac ne peut pas fonctionner qu'avec les eaux de pluies, c'est impossible à gérer et dans quelques années, 8 ou 10 la seule solution sera de reboucher tout ça, encore sur argent public.
Faire disparaitre un lac ce n'est pas une vue de l'esprit, ça se fait partout en France au nom de ce dogme de désanthropisation. Le problème c'est que ce dogme est très en vogue dans les agences de l'eau et les ministères. 

Alors que tant de pays travaillent à stocker l'eau, nous en France travaillons à assécher les rivières, les nappes alluviales, les zones humides artificielles, et à envoyer le plus rapidement l'eau douce à la mer. 

D'autres solutions écologiques, et techniques existent pour le lac. Il faut avoir la volonté de les imaginer sereinement, objectivement, et surtout dans le plein respect de l'article L211-1 du code de l'environnement qui parle de tous les usages de l'eau. Ce qui n'est absolument pas le cas du projet proposé."

02/10/2023

Détruire les moulins, étangs, biefs, canaux et plans d'eau sans enquête publique ni étude d’impact, le retour du décret scélérat

Après avoir subi une annulation en conseil d’Etat à la demande de notre association et de ses consoeurs, le décret du gouvernement visant à empêcher les enquêtes publiques et les études d’impact des destructions d’ouvrages hydrauliques vient d’être reformulé de manière cosmétique et republié au journal officiel. Le ministère de la transition écologique veut donc s’acharner à imposer une politique décriée de destruction et assèchement des retenues, réservoirs, lacs, étangs, canaux et biefs, à contre-courant des impératifs de stockage de l’eau et de production d’énergie hydraulique. Nous appelons nos consoeurs à nous rejoindre demander une nouvelle annulation de ce décret tout aussi scélérat que le précédent. 



Rappel des faits : sous la pression de lobbies très minoritaires, la France s’est engagée depuis 20 ans dans une politique décriée et déplorable de destruction systématique du patrimoine hydraulique des rivières, sur argent public. Cette politique est parmi les plus contestées du ministère de l’écologie, comme l'a reconnu très officiellement un audit du CGEDD en 2016. D’une part, les riverains ont un attachement réel au patrimoine hydraulique, au paysage qu’il dessine et aux usages qu’il permet. D’autre part, en situation de changement climatique, les urgences du pays sont de produire de l’énergie bas carbone locale et de retenir l’eau, pas de détruire le maximum d’ouvrages pour que cette eau file plus rapidement à la mer. Cette politique dite de "continuité écologique" par destruction d'ouvrage, qui avait été théorisée au 20e siècle, est devenue contre-productive et déconnectée des besoins réels du pays. Une gabegie d'argent public doublée d'un motif de conflits sociaux évitables.

La préservation, restauration et utilisation des ouvrages hydrauliques est donc une cause d’intérêt général pour notre pays. Leur destruction, une erreur funeste, au nom d’une utopie du retour à la «nature sauvage».

Le ministère de l’écologie et ses administrations n’ont jamais voulu entendre les protestations que suscite leur politique. Au contraire, ils ont tenté de les faire taire par un premier décret de l’été 2019  qui créait un régime administratif spécial pour les destructions d’ouvrages. Sous ce régime spécial, un ouvrage peut être détruit sur simple déclaration (formalité minimale), loin des débats citoyens, sans enquête publique permettant aux citoyens de d’exprimer et aux associations de s’organiser, sans étude d’impact approfondi de la destruction.

Or, contrairement à ce que dit la doxa du ministère de l’écologie, tant les travaux scientifiques que les guides d’ingénierie écologique reconnaissent l’existence de nombreux impacts possibles lors de la destruction d’ouvrage hydraulique. Par exemple, sont documentés comme issues :
  • Baisse du niveau de la rivière et de la nappe
  • Erosion régressive
  • Remobilisation de sédiments pollués
  • Déstabilisation ou destruction des espèces (biocénoses) ayant colonisé l’écosystème artificiel d’eau douce
  • Diffusion plus aisée d’espèces invasives venant de l’aval
  • Disparition de biotopes aquatiques et humides autour des retenues et canaux
  • Fragilisation du bâti riverain, pourrissement des fondations bois, rétraction argile
  • Fragilisation des berges, érosion des propriétés riveraines
  • Accélération des ondes de crue, augmentation du risque aval
  • Aggravation des assecs, perte de zones refuges pour le vivant
  • Perte de patrimoine culturel et d’aménité paysagère
  • Perte d’usage actuel ou potentiel (énergie, pisciculture, loisir)
Imposer ces désagréments, dégradations et risques sans les étudier sérieusement et sans consulter les riverains concernés est inacceptable, totalement contraire aux principes mêmes de la démocratie environnementale posés par l'Europe et la France. 




Face à ces réalités, le gouvernement et ses administrations de l’écologie opposent le déni idéologique. Le retour à un profil de rivière sauvage est forcément meilleur (dogme), les écosystèmes aménagés par l’histoire humaine sont forcément dégradés (dogme), la priorité publique en réglementation et en subvention doit être détruire le maximum d’ouvrages et d’assécher les milieux attenants.

Le conseil d’Etat a choisi en 2022 d’annuler le décret de 2019, considérant qu’il créait un régime d’exception pour la destruction des ouvrages hydrauliques sans prendre en compte les risques afférents. Ce fut une victoire pour notre association et ses consoeurs.  Mais le gouvernement revient à la charge en se contentant de reprendre la même formulation que le décret de 2019, sauf une précision sur la nature des barrages concernés en cas de destruction. En substance, on peut tout casser sur simple déclaration, mais pour les grands barrages on va tout de même faire l'effort d'une procédure complète d'autorisation...

Le tableau annexé à l'article R. 214-1 du code de l'environnement est ainsi modifié :
Après la rubrique 3.3.4.0. est insérée une rubrique 3.3.5.0. ainsi rédigée :

« 3.3.5.0. Travaux mentionnés ci-après ayant uniquement pour objet la restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques, y compris les ouvrages nécessaires à la réalisation de cet objectif (D) :
« 1° Arasement ou dérasement d'ouvrages relevant de la présente nomenclature, notamment de son titre III, lorsque :
« a) Ils sont implantés dans le lit mineur des cours d'eau, sauf s'il s'agit de barrages classés en application de l'article R. 214-112;
« b) Il s'agit d'ouvrages latéraux aux cours d'eau, sauf s'ils sont intégrés à un système d'endiguement, au sens de l'article R. 562-13, destiné à la protection d'une zone exposée au risque d'inondation et de submersion marine;
« c) Il s'agit d'ouvrages ayant un impact sur l'écoulement de l'eau ou les milieux aquatiques autres que ceux mentionnés aux a et b, sauf s'ils sont intégrés à des aménagements hydrauliques, au sens de l'article R. 562-18, ayant pour vocation la diminution de l'exposition aux risques d'inondation et de submersion marine ;
« 2° Autres travaux :
« a) Déplacement du lit mineur pour améliorer la fonctionnalité du cours d'eau ou rétablissement de celui-ci dans son talweg;
« b) Restauration de zones humides ou de marais;
« c) Mise en dérivation ou suppression d'étangs ;
« d) Revégétalisation des berges ou reprofilage améliorant leurs fonctionnalités naturelles;
« e) Reméandrage ou restauration d'une géométrie plus fonctionnelle du lit du cours d'eau;
« f) Reconstitution du matelas alluvial du lit mineur du cours d'eau;
« g) Remise à ciel ouvert de cours d'eau artificiellement couverts;
« h) Restauration de zones naturelles d'expansion des crues.
« La présente rubrique est exclusive des autres rubriques de la nomenclature. Elle s'applique sans préjudice des obligations relatives à la remise en état du site et, s'il s'agit d'ouvrages de prévention des inondations et des submersions marines, à leur neutralisation, qui sont prévues par les articles L. 181-23, L. 214-3-1 et L. 562-8-1, ainsi que des prescriptions susceptibles d'être édictées pour leur application par l'autorité compétente.
« Ne sont pas soumis à la présente rubrique les travaux mentionnés ci-dessus n'atteignant pas les seuils rendant applicables les autres rubriques de la nomenclature. »
Notre association demandera l’annulation partielle de ce décret, non pour tout ce qui concerne la continuité latérale (zones humides, expansion de crue etc.) mais pour les dispositions relatives à la destruction des ouvrages hydrauliques accompagnée de l’assèchement de leurs milieux et de la disparition de leurs usages, soit le 1°, le 2° alinéa a) et c). 

13/07/2023

Le règlement européen de restauration de la nature voté dans la douleur, premiers commentaires du texte

Signe des temps : le règlement européen « Restaurer la nature » a été adopté à une très courte majorité par le parlement européen, et amendé de diverses limitations. Nous exposons ici ses mesures applicables dans le cas des cours d’eau. Ce règlement risque de généraliser les conflits sociaux et judiciaires déjà observés en France, en Espagne et dans les pays menant des politiques agressives de destruction du patrimoine hydraulique, du potentiel hydro-électrique et des retenues d’eau, au nom de la vision théorique d’une nature sans humain, sans histoire et sans usage. Mais il présente aussi des garde-fous qui vont obliger l'administration française à changer ses méthodes autoritaires et opaques dans la construction de ses politiques publiques.


Le Règlement de restauration de la nature a été adopté par une très courte majorité au Parlement européen, dans une version modifiée du texte initialement proposé par la Commission européenne. La phase suivante vers une adoption définitive est le trilogue entre le conseil des Etats, la Commission et le Parlement. Cette phase est encore incertaine car 6 pays vont connaître prochainement des élections (dont l'Espagne où les enjeux de l'eau ont été au coeur des élections récentes et de la crise gouvernementale). 

Notre association a exprimé ses critiques sur l’édifice intellectuel du texte Restore Nature, fondé sur une opposition théorique de la nature et de l’humanité ne correspondant pas à la réalité hybride des milieux et nourrissant une vision socialement conflictuelle de l’écologie. De plus, le texte ignore totalement la biodiversité et les services écosystémiques des milieux aquatiques anthropisés alors que ceux-ci sont largement attestés dans la littérature scientifique. Hélas, la direction générale environnement de la Commission a choisi ses experts lors de la conception du texte, ce défaut de pluralisme à la source  devant être soit corrigé soit publiquement dénoncé pour la future révision de la directive cadre sur l’eau. Et les parlementaires manquent de compréhension des réalités concernées par les projets normatifs, donc un travail de pédagogie est nécessaire pour l’avenir.

Concernant les ouvrages et les cours d’eau, voici un aperçu du texte tel qu’il est adopté par le Parlement européen, avec quelques commentaires. 

Article 1er
2 bis. Le présent règlement doit créer des synergies et être cohérent avec la législation existante et en cours, en tenant compte des compétences nationales, et garantir la consistance et la compatibilité avec la législation de l’Union concernant, entre autres, les énergies renouvelables, les produits phytopharmaceutiques, les matières premières critiques, l’agriculture et la foresterie. 
Les mesures de restauration de nature ne doivent pas s’opposer aux mesures de développement des énergies renouvelables. 

Article 4
10 bis. Lors de l’élaboration des mesures qu’ils sont tenus d’adopter au titre du présent article, les États membres prennent en considération les exigences économiques, sociales et culturelles, ainsi que les particularités régionales et locales, conformément à l’article 2, paragraphe 3, de la directive 92/43/CEE. 
Les mesures de restauration de nature doivent se plier aux exigences économiques, sociales et culturelles, ce qui dans le cas du patrimoine hydraulique limite l’intervention à des ouvrages dont il est démontré que l’intérêt dans ces trois dimensions n’existe pas.

Article 5 bis
Énergie produite à partir de sources renouvelables 
Aux fins de l’article 4, paragraphes 8 et 8 bis et de l’article 5, paragraphes 8 et 8 bis, la planification, la construction et l’exploitation d’installations de production d’énergie à partir de sources renouvelables, le raccordement de ces installations au réseau et le réseau connexe proprement dit, ainsi que les actifs de stockage, sont présumés relever d’un intérêt public supérieur. Les États membres peuvent les exempter de l’obligation de prouver qu’il n’existe pas de solution de remplacement moins préjudiciable au titre de l’article 4, paragraphes 8 et 8 bis, et de l’article 5, paragraphes 8 et 8 bis, si une évaluation environnementale stratégique a été réalisée conformément aux conditions énoncées dans la directive 2001/42/CE ou s’ils ont fait l’objet d’une évaluation des incidences sur l’environnement conformément aux conditions énoncées dans la directrice (UE) 2011/92. Les États membres peuvent, dans des circonstances dûment justifiées et spécifiques, limiter l’application des présentes dispositions à certaines parties de leur territoire ainsi qu’à certains types de technologies ou à des projets présentant certaines caractéristiques techniques conformément aux priorités énoncées dans leurs plans nationaux intégrés en matière d’énergie et de climat, conformément au règlement (UE) 2018/1999. Les États membres informent la Commission des limites appliquées et les justifient.
Cette disposition renforce l’article 1er et rappelle que les mesures de restauration de nature ne peuvent aller à l’encontre de l’intérêt public supérieur des énergies renouvelables. Elle laisse aux Etats-membres le soin de préciser les énergies ayant la primauté dans leurs plans énergie-climat. 
Article 7
Restauration de la connectivité naturelle des cours d’eau et des fonctions naturelles des plaines inondables adjacentes 
1. Les États membres réalisent un inventaire des obstacles artificiels à la connectivité des eaux de surface, en tenant compte de leurs fonctions socio-économiques, et recensent les obstacles qui doivent être supprimés pour contribuer à la réalisation des objectifs de restauration fixés à l’article 4 du présent règlement et de l’objectif consistant à rétablir au moins 25 000 km de cours d’eau à courant libre sur le territoire de l’Union d’ici à 0, sans préjudice de la directive 2000/60/CE, et notamment de son article 4, paragraphes 3, 5 et 7, ni du règlement 1315/2013, et notamment de son article 15.
2. Les États membres suppriment les obstacles artificiels à la connectivité des eaux de surface sur la base de l’inventaire visé au paragraphe 1 du présent article, conformément au plan de suppression visé à l’article 12, paragraphe 2, points e) et f). Lorsqu’ils suppriment ces obstacles, les États membres visent principalement les obstacles obsolètes, c’est-à-dire ceux qui ne sont plus nécessaires pour la production d’énergie renouvelable, pour la navigation intérieure, pour l’approvisionnement en eau, pour la protection contre les inondations ou pour d’autres usages.
3. Les États membres complètent la suppression des obstacles visés au paragraphe 2 par les mesures nécessaires à l’amélioration des fonctions naturelles des plaines inondables adjacentes.
4. Les États membres veillent à ce que la connectivité naturelle des cours d’eau et les fonctions naturelles des plaines inondables adjacentes restaurées conformément aux paragraphes 2 et 3 soient maintenues.
Notons d’abord que 25 000 km de cours d’eau libre à échelle de l’Europe représente un objectif à décliner au pro rata de chaque linéaire national. La France a en quelque sorte surtransposé l’objectif à l’avance puisqu’elle a classé en continuité écologique de liste 2 environ l’équivalent de ce linéaire total, mais pour notre seul pays. Ce qui rappelle au passage la dimension assez radicale et hors-sol de l’administration de l’eau en France, puisqu’elle prétendait en 2012 faire en 5 ans et dans un seul pays ce que l’Europe envisage en 10 ans et pour toute l’Union.

Notons ensuite que, pour les autorités européennes, une rivière qui n'aurait pas d'obstacle mais serait par ailleurs polluée ou privée d'eau la moitié de l'année par des usages excessifs serait néanmoins "restaurée". Cette focalisation obsessionnelle sur la connectivité est intellectuellement aberrante et scientifiquement infondée, les études montrant que les premiers impacts sur la biologie aquatique viennent des polluants et des usages du sol en bassin versant, pas des ouvrages transversaux.

Les notions d’ «obstacle à la connectivité» et de «suppression d’obstacle» ne sont pas définies. En revanche la notion de «cours d’eau à courant libre» est définie (article 3 du Règlement) de la sorte «un cours d’eau ou un tronçon de cours d’eau dont la connectivité longitudinale, latérale et verticale n’est pas entravée par des structures artificielles formant un obstacle et dont les fonctions naturelles ne sont quasiment pas affectées». La définition est donc quelque peu circulaire et mal spécifiée. La jurisprudence française a déjà établi qu’un ouvrage n’est pas forcément en soi un obstacle ou une entrave à la connectivité (circulation de l’eau, des sédiments, des espèces), ce point devant être démontré au cas par cas. Par ailleurs la suppression de l’entrave à la continuité n’implique pas la suppression de tout l’ouvrage si la connectivité est assurée par des dispositifs ad hoc. Si besoin, la justice devra préciser ce point.

Concernant les obstacles visés, ils doivent être «obsolètes» et ne pas avoir des «usages». Cela exclut a priori la majeure partie des ouvrages existants. 

Le règlement Restore Nature est silencieux sur la compatibilité de la notion de suppression d’obstacle (dans l’hypothèse d’une destruction physique) avec le droit de propriété, alors qu’un ouvrage est assimilable à une propriété (et crée un droit réel immobilier dans le cas des droits d’eau en France). Ce point devra lui aussi être précisé le cas échéant en justice. 

Enfin, il est demandé de compléter la suppression d’un obstacle par la restauration de la plaine inondable adjacente, ce qui ne manquera pas d’augmenter le coût de chaque chantier et, dans le cas des arasements de seuils, d’éviter des chantiers bâclés et contre-productifs ne faisant qu’inciser les lits. La connectivité des cours d'eau va coûter de plus en plus cher, ce qui justifie des objectifs assez modestes compte tenu des problèmes de financements publics de la transition en Europe. 

Article 11
Préparation des plans nationaux de restauration 
1. Les États membres élaborent des plans nationaux de restauration et effectuent la surveillance et les recherches préparatoires permettant de déterminer les mesures de restauration nécessaires pour contribuer aux objectifs de l’Union et répondre aux obligations énoncées aux articles 4 à 10, en tenant compte des données scientifiques les plus récentes, des besoins des communautés locales, y compris des communautés locales urbaines, des mesures présentant le meilleur rapport coût-efficacité et de l’incidence socio-économique desdites mesures. Il est indispensable que les parties prenantes, notamment les propriétaires fonciers et les gestionnaires de terres, participent de manière appropriée à chaque étape du processus. 
(…)
11. Les États membres veillent à ce que l’élaboration du plan de restauration soit ouverte, transparente, inclusive et efficace et à ce que le public, en particulier les propriétaires fonciers, les gestionnaires de l’occupation du sol, les acteurs du secteur maritime et d’autres acteurs pertinents, tels que les services de conseil et de vulgarisation, conformément au principe de consentement préalable et éclairé, disposent, à un stade précoce, de possibilités effectives de participer à l’élaboration du plan. Les autorités régionales et locales ainsi que les autorités de gestion concernées sont dûment associées à l’élaboration du plan. Les consultations respectent les exigences énoncées dans la directive 2001/42/CE. 
Cet article exige que chaque propriétaire soit associé au plan de restauration de la nature et cela dès la phase de son élaboration, à chaque étape du processus. Être associé ne signifie évidemment pas être informé que sa propriété est concernée sans avoir eu des échanges préalables à ce sujet. Cela implique que la France ne peut réputer son actuel plan de restauration de continuité écologique des cours d’eau comme valant réponse à ce règlement de restauration de nature, puisque de manière démontrable en justice, chaque propriétaire n’a pas participé de manière ouverte, transparente et inclusive à chaque étape du processus. 

Le monde européen des ouvrages et de leurs riverains doit se mobiliser à Bruxelles et Strasbourg
Pour la suite, nous évaluons avec nos conseillers juridiques l’opportunité de demander l’annulation partielle du texte s’il devait être promulgué en l’état, essentiellement dans ses dimensions floues et litigieuses de l’article 7. Cette démarche permettrait au juge, même s’il n’annule pas le texte, de clarifier dans quelles conditions une injonction à «suppression» d’obstacle est compatible avec le droit. 

En cas d'adoption définitive du règlement, nous demanderons au gouvernement français d'en respecter strictement les conditions d'application, notamment l'association systématique des propriétaires concernés à toutes les étapes d'élaboration ainsi que le respect des usages des ouvrages. 

Les mêmes causes produisant les mêmes effets, de nombreux pays européens devraient connaître les conflits sociaux et juridiques liés à la politique aberrante de suppression des ouvrages hydrauliques en pleine phase de changement climatique, de stress hydrique et de transition énergétique. Ce doit être l’occasion pour le mouvement des ouvrages de se structurer à échelle européenne et, surtout, de peser à Bruxelles et à Strasbourg afin d’exposer les réalités ignorées ou niées par certaines administrations et certains acteurs de l’écologie. 

Les prochaines échéances sont les nouvelles élections de 2024 au plan politique, et au plan juridique la révision déjà amorcée de la directive cadre européenne sur l'eau, qui arrive au terme de sa planification 2000-2027.

Nous devons dès à présent organiser la mise sous surveillance et si besoin sous pression de la direction générale environnement de la Commission européenne, afin de garantir une prise en compte complète des données de la science, et non plus une sélection d'analyses d'orientation naturaliste qui semblent voir dans un improbable retour à un état passé du vivant et des milieux la priorité environnementale de l'Europe au 21e siècle. En outre, ce naturalisme de vitrine sert souvent d'alibi à des logiques productivistes qui n'engagent pas une réflexion de fond sur la durabilité de nos sociétés, de leurs pratiques et de leurs milieux.

A lire pour comprendre les enjeux eau, connectivité et usages :

13/06/2023

La justice condamne et annule le programme de casse des ouvrages hydrauliques de l’agence de l’eau Seine-Normandie

Nouvelle victoire en justice ! Le tribunal administratif de Cergy-Pontoise vient de prononcer l'illégalité et l'annulation partielle conséquente du programme de casse des ouvrages hydrauliques de l'agence de l'eau Seine-Normandie. Des procédures similaires sont déjà engagées sur les autres bassins du pays. La continuité écologique avait été transformée en programme de retour dogmatique à la rivière sauvage et de négation totale de la valeur du patrimoine hydraulique : c'est une nouvelle sanction de cette aberration. L'incroyable dérive de l'administration eau & biodiversité consistant à détruire les ouvrages des rivières au lieu de les aménager écologiquement se trouve donc privée de son principal outil de financement sur argent public. 


Par décision du n° 1904387 – 2207014 du 9 juin 2023, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise saisi par Hydrauxois, la FFAM et de nombreux autres requérants associatifs vient de prononcer l’annulation partielle du programme d’aide à la destruction des ouvrages hydrauliques en rivières classées continuité écologique de l’agence de l’eau Seine-Normandie. 

Alors que la loi de 2021, faisant suite à dix années de troubles et de contentieux, avait clairement exprimé que la continuité écologique ne visait pas à détruire l’usage actuel et potentiel des ouvrages hydrauliques, l’agence de l’eau Seine-Normandie (comme ses consœurs) a continué de financer cette solution, et plus encore de la financer à un taux nettement avantageux de 80% de subvention. Soit une forte incitation à détruire au lieu d'aménager. 

Le tribunal condamne l’agence de l’eau en ces termes :
Sur les conclusions à fin d’annulation partielle de la délibération du 16 novembre 2021 :
18. Aux termes de l’article L. 214-17 du code de l'environnement tel que modifié par la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets : « I. - Après avis des conseils départementaux intéressés, des établissements publics territoriaux de bassin concernés, des comités de bassins et, en Corse, de l'Assemblée de Corse, l'autorité administrative établit, pour chaque bassin ou sous- bassin : (…) / 2° Une liste de cours d'eau, parties de cours d'eau ou canaux dans lesquels il est nécessaire d'assurer le transport suffisant des sédiments et la circulation des poissons migrateurs. Tout ouvrage doit y être géré, entretenu et équipé selon des règles définies par l'autorité administrative, en concertation avec le propriétaire ou, à défaut, l'exploitant, sans que puisse être remis en cause son usage actuel ou potentiel, en particulier aux fins de production d'énergie. S'agissant plus particulièrement des moulins à eau, l'entretien, la gestion et l'équipement des ouvrages de retenue sont les seules modalités prévues pour l'accomplissement des obligations relatives au franchissement par les poissons migrateurs et au transport suffisant des sédiments, à l'exclusion de toute autre, notamment de celles portant sur la destruction de ces ouvrages (…) ».

19. Les associations requérantes soutiennent que la délibération du 16 novembre 2021 révisant le 11ème programme pluriannuel d’intervention de l’agence de l’eau Seine- Normandie est devenue illégale du fait de la modification par la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, du 2° du I de l’article L. 214-17 du code de l'environnement.

20. Il ressort des pièces du dossier que le 2° du I de l’article L. 214-17 du code de l’environnement oblige désormais, s’agissant uniquement des ouvrages implantés sur les cours d’eau, parties de cours d’eau ou canaux, dans lesquels il est nécessaire d’assurer le transport suffisant des sédiments et la circulation des poissons migrateurs, figurant sur une liste établie par l’autorité administrative, à les entretenir, les gérer et les équiper, sans remettre en cause leur usage actuel ou potentiel, en particulier aux fins de production d'énergie, de sorte que ces mesures sont les seules modalités autorisées pour l'accomplissement des obligations relatives au transport suffisant des sédiments et à la circulation des poissons migrateurs, à l’exclusion plus particulièrement pour les moulins à eau de la destruction des ouvrages de retenue. Or, il ressort du point E.1 du programme pluriannuel d’intervention en litige qu’il prévoit la possibilité de financer de tels travaux de destruction, lorsqu’ils sont nécessaires à la restauration de la continuité écologique.

21. D’une part, si l’agence de l’eau Seine Normandie fait valoir en défense que les dispositions précitées de l’article L. 214-17 du code de l'environnement ne régissent pas directement l’attribution des aides encadrées par le 11ème programme révisé et que ce programme prévoit que les travaux financés doivent satisfaire aux obligations règlementaires, ces aides ne sauraient être attribuées en méconnaissance des dispositions législatives en vigueur à la date de l’adoption de la délibération attaquée et la seule réserve relative aux obligations règlementaires ne permet donc pas d’être interprétée comme ayant implicitement mais nécessairement exclu de son dispositif d’aides, les travaux ainsi prohibés par la loi.

22. D’autre part, l’agence de l’eau Seine-Normandie soulève en défense une exception d’inconventionnalité de la nouvelle rédaction de l’article L. 214-17 du code de l’environnement, qui serait contraire selon elle, au a) du 1 de l’article 4 de la directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau, qui fixe un objectif de prévention, de restauration et d’amélioration de l’état des masses d’eau de surface. Elle fait valoir que l’annexe V de cette directive fixe ainsi la continuité des rivières comme l’un des paramètres biologiques de la qualité de leur état écologique qui doit permettre une migration non perturbée des organismes aquatiques et le transport des sédiments. Cette nouvelle rédaction de la loi serait également, selon l’agence de l’eau, contraire, à l’article 2 du règlement (CE) n° 1100/2007 du Conseil du 18 septembre 2007 instituant des mesures de reconstitution du stock d’anguilles européennes et imposant notamment la mise en place de mesures structurelles visant à permettre le franchissement des rivières et le transport des anguilles argentées des eaux intérieures vers des eaux d’où elles peuvent migrer librement vers la mer des Sargasses. Il résulte toutefois des dispositions de l’article L. 214-17 que celles-ci limitent l’interdiction qu’elles instituent à la seule destruction des ouvrages ayant un usage actuel ou potentiel, en particulier aux fins de production d’énergie, comme modalité d’accomplissement des obligations environnementales relatives au franchissement par les poissons migrateurs et au transport suffisant des sédiments. Dans ces conditions, cette exception d’inconventionnalité, telle qu’elle est soulevée en défense, doit être écartée.

23. Dans ces conditions, le point E.1 du 11ème programme pluriannuel d’intervention, tel qu’approuvé par la délibération en litige, méconnait partiellement les dispositions du 2° du I de l’article L. 214-17 du code de l’environnement.

L’association Hydrauxois :
  • se félicite de la sanction des dérives de l’administration eau & biodiversité, qui a voulu persister dans un programme massif de destructions des ouvrages hydrauliques contraire à l’esprit et à la lettre de la loi française ;
  • observe que le mouvement des ouvrages hydrauliques et de leurs riverains avait raison de pointer ces dérives auprès des élus, des préfets, des médias, malgré les dénégations réflexes et mensongères du ministère de l'écologie quand il était interrogé à ce sujet;
  • appelle ses adhérents, les maîtres d’ouvrages, les collectifs et associations à demander immédiatement l’arrêt de toute destruction en cours d’ouvrage sur le bassin Seine-Normandie (rivières listes 2 ou listes 1- listes2), et en particulier à contester si nécessaire devant la justice son financement public ;
  • appelle les administrations de la république, et en particulier les préfets départementaux et préfets de bassin ainsi que la direction eau & biodiversité du ministère de l'écologie, à faire cesser les dérapages idéologiques internes et les prises de position des agents publics contraires aux lois du pays ;
  • appelle les élus de la république, et en particulier les parlementaires, à repenser et réviser la politique de l'eau et des rivières en incluant pleinement la valeur des ouvrages hydrauliques et leur contribution aux grands enjeux de notre temps : relocalisation économique, agrément social et paysager, gestion hydrologique des débits, production énergétique bas carbone, défense incendie, adaptation climatique, protection des biodiversités.
Des procédures similaires ont été engagées sur les 5 autres bassins hydrographiques de la France métropolitaine. 

Source : Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, décision du n° 1904387 – 2207014, 9 juin 2023

28/05/2023

Olivier Thibault, le nouveau directeur de l’OFB, trompe les parlementaires sur la continuité écologique

Auditionné par les parlementaires afin de valider sa nomination comme directeur de l’Office français de la biodiversité, Olivier Thibault a tenu des propos imprécis ou faux sur la continuité écologique. Il est manifestement impossible de concilier l’idéologie administrative du retour à la rivière sauvage avec un minimum de bonne foi dans l’analyse des réalités hydrauliques, en particulier les ouvrages anciens des moulins et étangs. 




Interrogé sur le thème de la continuité écologique et des moulins (voir la vidéo, vers 1’10), Olivier Thibault a commencé par leur attribuer la responsabilité de la disparition des poissons migrateurs. 

Ce propos est inexact. Une analyse de l’histoire des poissons migrateurs a montré que ceux-ci étaient encore présents un peu partout sur le territoire français au milieu du 18e siècle (Merg et al 2020). Or à cette époque les rivières étaient déjà couvertes de moulins et d’étangs, car l’hydraulique était la première énergie mécanique du pays et la pisciculture une activité vivrière. Une autre étude ayant analysé l’évolution des poissons migrateurs sur les 40 dernières années (1983-2017) ne trouve aucun lien significatif avec la continuité écologique (Legrand et al 2020). L’échec de la restauration fluviale s’observe aussi sur des bassins pilotes qui ont mobilisé de forts investissements à compter des années 1970, comme par exemple le saumon de l’axe Loire-Allier : malgré les efforts sur un demi-siècle, le taux de retour du saumon se situe à des niveaux historiquement très bas, outre que ces saumons relèvent désormais de souches d’élevage et non de souche sauvage. Pour ce cas du saumon atlantique, les chercheurs montrent que les baisses de recrutement depuis quelques décennies ne sont probablement pas liées aux facteurs usuellement mis en avant (pollution et continuité) car même dans des bassins très préservés, le saumon reste rare ou absent (Dadswell et al 2022). La même remarque pourrait être faite sur l'anguille : l'effondrement des stocks de ce migrateur date des années 1980, sans rapport temporel avec des ouvrages anciens présents depuis des siècles. 

Olivier Thibault a ensuite affirmé que 11% seulement des rivières françaises faisaient l’objet d’une politique de continuité écologique.

Ce propos est imprécis et trompeur. Suite à la loi de 2006, les préfectures de bassin ont classé 11% des rivières en liste 2 (obligation d’assurer la continuité au droit des ouvrages) et 30% en liste 1 (interdiction d’obstacle à la continuité écologique), voir données du CGEDD 2016. Mais surtout, les services de l’OFB que dirige Olivier Thibaut comme les services des DDT-M et des DREAL tendent désormais à exiger la continuité écologique à toute occasion de travaux sur un ouvrage. Ces services administratifs tirent argument que la continuité hydrographique figure dans les règles générales de gestion équilibrée et durable de l’eau (article L 211-1 code de l’environnement), donc qu’elle est exigible sur toute rivière, pas seulement sur celles spécifiquement classées à cette fin. Ces services tendent à donner des avis négatifs aux demandes de travaux sur des sites hydrauliques si ces travaux ne prévoient pas le poste (très coûteux) de continuité. C'est la raison pour laquelle nous demandons aux parlementaires de modifier la loi, afin d'empêcher ces attitudes de sur-administration et sur-réglementation qui bloquent l'hydraulique française depuis 20 ans.


Olivier Thibault a prétendu qu’il était « archi-faux » d’affirmer que les seuils en rivière aident à retenir l’eau et peuvent avoir des effets positifs sur les nappes ou les sécheresses.

Ce propos est « archi-faux ». D’abord, comme l’a reconnu l’expertise collective Irstea-Onema sur les effets cumulés des retenues d’eau, il existe très peu de données d’observation dans le monde sur les effets hydrologiques des petits ouvrages et de leurs plans d’eau (Carluer et 2016). Cette expertise signale que les retenues perdent de l’eau par infiltration et échange avec les aquifères, retenant une valeur médiane de 1 à 2 mm par jour pour le flux de transfert vers les aquifères. Ensuite, les règles de base de la physique (hydrostatique, hydrodynamique) comme l’observation empirique des puits et captages en bord d’ouvrages montrent que la création d’un plan d’eau et d’une lame d’eau plus haute augmente le niveau de la nappe sous-jacente. Le BRGM a rappelé cette évidence aux parlementaires dans une autre audition. De très nombreux travaux ont été menés pour étudier les barrages de castors – ce qui soit dit en passant montre une anomalie de la programmation de la recherche publique, car le même travail n’est même pas fait sur les ouvrages humains malgré leur ancienneté et omniprésence : tous ces travaux sur les castors documentent des effets positifs des petits barrages en lit mineur  pour la rétention d’eau dans les bassins (voir par exemple revue chez Larsen et al 2021). Enfin, de rares travaux ont été menés sur des rivières où l'on avait effacé des ouvrages, d'autres où l'on avait cessé de gérer les retenues de moulins : ces travaux documentent des incisions des lits et des baisses de niveau des nappes, deux phénomènes négatifs pour la retenue d'eau en sol et sous-sol (Maaß et Schüttrumpf 2019, Podgórski et Szatten 2020). On lira également avec profit la monographie de Pierre Potherat sur l'analyse des ouvrages hydrauliques et de leur gestion en lien aux recharges d'aquifères (Potherat 2021). 

Concernant l’évaporation, citée par Olivier Thibault comme un grave problème lié aux retenues d’eau, rappelons que tous les milieux de surface évaporent, qu’ils soient naturels ou artificiels. L’une des seules études menées en France pour comparer l’évaporation de retenues artificielles avec des zones humides ou des forêts a montré que les retenues humaines évaporent moins sur l’année (Al Domany et al 2020). De tels travaux doivent être répliqués, mais ils tirent déjà un signal d’alarme assez fort sur l’effet des « solutions fondées sur le nature » en ce qui concerne spécifiquement la lutte contre les sécheresses. Les parlementaires ne doivent pas suivre aveuglément des idées floues et à la mode, mais exiger des preuves scientifiques fortes avant d’engager un programme public sur des sujets importants pour la société et le vivant. Si l’OFB prétend que les ouvrages hydrauliques ont un effet négatif sur le stockage d’eau, il faut publier les travaux scientifiques qui le démontrent. Sinon, il faut arrêter de propager des fausses informations au nom d’une idéologie du retour à la rivière sauvage.  

Conclusion : l’Office français de la biodiversité (ex Onema, ex Conseil supérieur de la pêche) a largement contribué à transformer la continuité écologique en dogme et à bloquer toute analyse sérieuse des services écosystémiques rendus par les ouvrages hydrauliques. Olivier Thibault commence sa mandature à la direction de cette institution sur un très mauvais départ, avec la redite des éléments de langage relevant d’une idéologie administrative davantage que de la précision scientifique. 

06/05/2023

Où sont passés les saumons de l’Atlantique ? (Dadswell et al 2022)

Nous allons faire disparaître les obstacles des rivières (seuils, barrages), reconnecter des habitats fluviaux, et le saumon Atlantique reviendra à son abondance passée. Cette promesse majeure de la politique dite de continuité écologique est fondée sur une science du 20e siècle. Problème : cette vision est fausse. Dans un passage en revue critique de l’état des stocks de saumon Atlantique, des scientifiques montrent que si le saumon a souffert dans le passé des barrages, de la pollution et de la surexploitation de pêche continentale, ces causes n’expliquent pas le fort déclin observé depuis le milieu des années 1980, même dans des rivières sans obstacle, sans polluant et à pêche interdite ou très restreinte. L’hypothèse dominante retenue par ces chercheurs est une pression de la pêche illégale, non déclarée, non réglementée (INN), d’autant plus forte que le bassin de retour des saumons est situé loin du gyre subpolaire formant une étape de leur migration marine.


Illustration par Timothy Knepp, U.S. Fish and Wildlife Service.

La présence des saumons atlantiques adultes (Salmo salar Linnaeus, 1758), retournant dans les rivières autour de l'océan Atlantique Nord, a été étroitement surveillée depuis que les humains ont commencé à exploiter la ressource. Historiquement, les populations de saumon ont été très abondantes, même si les chroniques historiques évoquent des périodes de pénurie. L'examen des retours d'adultes au cours des 100 à 200 dernières années où nous disposons de chroniques historiques fiables et continues suggère qu'il existait un cycle naturel d'abondance annuelle, avec des quantités de saumons en rivière pouvant varier d’un facteur 10 entre les période d’abondance et les périodes de rareté. La quantité globale  de saumons a cependant décru régulièrement au fil du temps en raison de causes anthropiques connues (grands barrages, pollutions, surpêche). Mais, depuis les années 1980, une nouvelle baisse globale et mal expliquée est observée alors que les pressions anciennes se sont stabilisées ou ont régressé.

Sept spécialistes nord-américains et européens du saumon Atlantique ont publié un passage en revue critique des causes possibles de déclin récent du saumon Atlantique. Voici le résumé de leur étude :
« Les retours d'adultes dans de nombreux stocks de saumon atlantique sauvage et d'écloserie de l'Atlantique Nord ont diminué ou se sont effondrés depuis 1985. L'amélioration, les fermetures de la pêche commerciale et les restrictions de pêche à la ligne n'ont pas réussi à enrayer le déclin. Les impacts humains tels que les barrages, la pollution ou la surexploitation marine étaient responsables de certains déclins de stocks dans le passé, mais les retours d'adultes dans les stocks de rivières et d'écloseries sans impacts locaux évidents ont également diminué ou se sont effondrés depuis 1985. De nombreuses études ont postulé que la récente occurrence généralisée de faibles retours d'adultes peuvent être causés par le changement climatique, la salmoniculture, la disponibilité de nourriture en mer ou les prédateurs marins, mais ces possibilités ne sont pas soutenues par certains  stocks qui persistent près des niveaux historiques, la perte de stocks éloignés des sites d'élevage, un éventail de proies marines diversifié et la rareté des grands prédateurs du large. 

Le déclin et l'effondrement des stocks ont des caractéristiques communes : 1) les retours cycliques annuels d'adultes cessent, 2) les retours annuels d'adultes sont stables, 3) la taille moyenne des adultes diminue et 4) les effondrements de stocks se sont produits le plus tôt parmi les bassins versants éloignés du gyre subpolaire de l'Atlantique Nord (NASpG). Les montaisons annuelles cycliques d'adultes étaient communes à tous les stocks dans le passé qui n'étaient pas touchés par des changements anthropiques dans leurs cours d'eau natals. 

Une ligne plate d'abondance des adultes et une réduction de la taille moyenne des adultes sont des caractéristiques communes à de nombreux stocks de poissons surexploités et suggèrent une exploitation de la pêche illégale, non déclarée et non réglementée (INN) en mer. L'éloignement de la NASpG entraînant une mortalité plus élevée des post-saumoneaux migrateurs augmenterait le risque d'effondrement de ces stocks dû à l'exploitation INN. Les prises accessoires de post-saumoneaux et d'adultes dans les pêches au chalut en couple au large de l'Europe et les captures d'adultes interceptés au large du Groenland, dans le golfe du Saint-Laurent et au large de l'Europe ont été des sources de mortalité marine, mais il semble peu probable qu'elles soient la principale cause de la déclin. La répartition dans le temps et dans l'espace des anciennes pêcheries hauturières légales indiquait que les pêcheurs connaissaient bien le schéma migratoire océanique du saumon et, combiné au manque de surveillance depuis 1985 en dehors des zones économiques exclusives ou dans les régions nordiques éloignées, cela pourrait signifier une mortalité élevée en mer à cause de la pêche INN. Le problème des pêcheries océaniques INN est aigu, a entraîné l'effondrement de nombreux stocks d'espèces recherchées dans le monde entier et est probablement lié au déclin et à l'effondrement imminent de la population de saumons de l'Atlantique Nord. »

Estimation de l'abondance avant la pêche (lignes pleines) et retours d'adultes (lignes pointillées ou tirets) de saumons atlantiques sauvages unibermarins (gris) et bibermarins (noir) en millions provenant du stock d'Amérique du Nord (AN), d'Europe du Nord (NE) et d'Europe du Sud (SE) dans l'Atlantique Nord entre 1971 et 2019. Extrait de Dadswell et al, art cit.

Le cas emblématique de deux rivières à bonnes conditions où le saumon décline malgré tout
Un exemple de ce qui est arrivé aux stocks de saumon dans certaines parties de l'Atlantique Nord est illustré par l'histoire récente de deux rivières tributaires de la baie de Fundy, au Canada. Il est utile de s’attarder sur le récit des chercheurs, car la description des actions menées sur ces bassins rappelle ce qui est fait en France depuis 50 ans de plans grands migrateurs, avec la même absence de résultat probant.

Voici ce qu’expliquent les chercheurs : 
« La rivière Upper Salmon (USR) et la rivière Point Wolfe (PWR) sont de petits bassins hydrographiques situés dans le parc national Fundy avec respectivement 10 et 23,3 km d'habitat du saumon accessible. Les rivières ont été endiguées à la tête de la marée dans les années 1800 à des fins d'exploitation forestière et leurs populations ont disparu. Après la création du parc en 1948, l'exploitation forestière a été interdite, les barrages sont tombés en désuétude et se sont finalement effondrés ou ont été enlevés.

Le cours supérieur de la rivière Upper Salmon est devenu accessible au saumon en 1954 et, en 1963, la population de la rivière était estimée à 100 adultes par les gardes du parc. La rivière a une eau extrêmement claire et les poissons sont visibles même dans les bassins les plus profonds depuis les hautes berges rocheuses. La réintroduction s'est probablement produite par divagation naturelle ou à partir d'une petite population survivante dans les affluents en aval de l'ancien barrage. Lorsque les premiers relevés scientifiques ont été menés de 1965 à 1968, on estimait que la montaison annuelle variait de 312 à 1 363 poissons. Pendant la période d'augmentation de la population, une pêche commerciale au saumon au filet dérivant existait encore dans la baie de Fundy et la pêche à la ligne dans la rivière était autorisée après 1965. Les prises à la ligne variaient de 4 à 113 poissons/an ou un taux d'exploitation de 1,1 à 27,5 %.

La rivière Point Wolfe n'était pas accessible au saumon jusqu'en 1984, lorsque les installations de franchissement du poisson ont été achevées au barrage à marée. L'ensemencement annuel de 42 000 alevins d'automne a été réalisé de 1982 à 1985 (Gibson et al. 2003).

Les montaisons annuelles d'adultes dans l’USR ont persisté à des niveaux durables jusqu'en 1985, mais la pêche à la ligne a été fermée en 1991, après que les montaisons annuelles eurent diminué rapidement. En 1998, des enquêtes sur les retours d'adultes ont révélé que la montaison de frai s'était effondrée avec peu ou pas de poissons. De petits nombres de retours d'adultes provenant de l'empoissonnement des REP ont été observés (peu de comptages disponibles) mais la montaison annuelle n'a jamais établi un niveau durable.

À partir de 2006, Canada Parks a lancé un effort concerté pour rétablir le saumon atlantique dans les deux rivières. Entre 2006 et 2017, un total de 968 670 tacons et 1 679 adultes élevés en écloserie ont été stockés dans les rivières et des pièges à vis, la surveillance des montaisons de smolts a capturé jusqu'à ∼ 2 000 smolts quittant les rivières chaque année. De 2011 à 2019, un total de 4 534 adultes de smolts capturés dans l’USR  ont été élevés jusqu'à maturité dans une ferme salmonicole marine et, une fois mûrs, relâchés dans la rivière pour frayer (∼400–900/an). (...) Bien que la production de juvéniles ait augmenté en raison de cet effort, en 2019, les retours d'adultes sauvages (3 en USR) n'avaient toujours pas augmenté de manière substantielle dans les deux rivières. »
Discussion
Les causes alléguées de déclin des saumons et d’autres grands migrateurs comme l’anguille (qui a connu le même effondrement dans les années 1980) sont nombreuses : surpêche en haute mer dans le cadre légal, acidification des océans, changement climatique, polluants émergents, salmoniculture, retour de prédateurs en conséquence de protection (phoques et cétacés par exemple). Mais aucune n’est convaincante pour Michael Dadswell et ses collègues, d’où l’hypothèse privilégiée par eux de la pêche illégale, non déclarée  et non réglementée. 

Nous ne savons pas si cette hypothèse se confirmera et il faudrait déjà mettre des moyens pour contrôler les effets de ces pêches océaniques dans la zone Atlantique nord. En revanche, le travail des chercheurs montre combien la politique publique des migrateurs en France est éloignée de l’état actuel de la réflexion scientifique. 

La guerre des seuils et des barrages lancée au nom de la continuité écologique est une représentation du 20e siècle, qui ne correspond plus à la réalité. Elle est en fait une redite des politiques halieutiques commencée au 19e siècle, comme nous l'avions exposé, sans réflexion de fond sur les nouvelles conditions à l'Anthropocène et en particulier la bifurcation sensible après le milieu du 20e siècle. Sans surprise, même sur les rivières ayant fait l’objet de politique saumon depuis longtemps, on n’assite pas au retour en masse du migrateur malgré des ouvertures de nouveaux habitats (voir nos articles sur la Loire, sur la Vire).  Cela signifie que l’argent public est mal dépensé à deux titres : d’une part, on se trompe sur les problèmes du saumon et on investit sur de mauvais chantiers, en particulier quand ils concernent des seuils anciens n’ayant jamais entravé historiquement le saumon (voir Merg et al 2020) ; d’autre part, en détruisant les ouvrages, on se prive de leurs services écosystémiques rendus à la société, en particulier leurs possibles usages pour la transition énergétique comme l’adaptation climatique et la régulation des niveaux d'eau.

Référence : Dadswell M et al (2022), The decline and impending collapse of the Atlantic Salmon (Salmo salar) population in the North Atlantic Ocean: A review of possible causes, Reviews in Fisheries Science & Aquaculture, 30,2, 215-258.

20/04/2023

Pas d'impact sédimentaire notable d'un seuil en rivière (Rollet el al 2022)

Des chercheurs ont étudié le seuil le plus important du fleuve côtier Gapeau, dans le sud de la France. A l'occasion de trois crues, ils montrent que la retenue de 700 m créée par cette chaussée ancienne ne sédimente pas la charge grossière et évacue les charges plus fines de sables et graviers. Les scientifiques concluent que se focaliser sur les seuils dans ce contexte ne sera pas de nature à recharger en sédiment les côtes et les plages à l'aval, car le déficit sédimentaire a d'autres causes. Leur travail rappelle aussi que la plupart des recherches menées sur la sédimentation dans les ouvrages modestes (seuils, chaussées, petits barrages et déversoirs) ne montrent pas d'effet notable. Soit le contraire de ce qui est affirmé dans le discours du gestionnaire public.



Le seuil de Sainte-Eulalie, étudié par les chercheurs. DR.

Anne-Julia Rollet, Simon Dufour, Romain Capanni et Mireille Lippmann Provansal ont analysé l'impact sédimentaire d'un seuil sur une petite rivière du Sud de la France. Le Gapeau est un fleuve côtier de 47,5 km de long (pente : 0,7 m.m-1) qui draine un bassin versant de 564 km² entre les crêtes montagneuses de la Sainte Baume et de Morières au nord et à l'ouest et la crête montagneuse des Maures à l'est. La rivière s'ouvre au sud sur la plaine et se jette dans la rade d'Hyères. Le bassin versant du Gapeau contient deux sous-bassins aux caractéristiques géologiques contrastées : le sous-bassin versant ouest, où la rivière Gapeau coule sur un substrat calcaire, perméable et favorable à l'infiltration, et  le sous-bassin versant est de la rivière Réal-Martin (principal affluent de la rivière Gapeau), qui coule sur des substrats métamorphiques imperméables. La rivière Gapeau présente un chenal étroit et profond sur la majeure partie de sa longueur ainsi que des berges élevées. Cette morphologie est particulièrement adaptée au transit des flux d'eau et de sédiments. 

Dans la partie aval du Gapeau, le seul ouvrage pouvant piéger les sédiments en transit est le seuil de Sainte Eulalie. Cette chaussée est un ouvrage en maçonnerie de 3,75 m de haut et génère en amont un plan d'eau d'environ 700 mètres de long en régime d'étiage. Sa date exacte de construction est inconnue, mais elle est indiquée sur des cartes de 1896. 

Pour déterminer l'influence du seuil sur la continuité sédimentaire de la rivière, les chercheurs ont suivi l'évolution du stock sédimentaire en amont du seuil de Sainte Eulalie, qui est la principale zone de piégeage. La capacité de piégeage des sédiments du déversoir a été évaluée en analysant les différentiels bathymétriques avant vs après les crues, avec quatre mesures par point pour assurer une marge d'erreur verticale de ± 0,10 m après post-traitement. Trois relevés bathymétriques ont été réalisés pour décrire la mobilité sédimentaire générée lors de crues de trois intensités différentes : débit d'eau instantané de 42 m3.s-1, 57 m3.s-1 et 67 m3.s-1.

Voici le résumé de leur travail :
"Dans les systèmes littoraux et fluviaux en déficit sédimentaire la restauration du transport solide fait aujourd’hui l’objet d’une attention particulière. La suppression d’ouvrages transversaux (seuils, barrages) est parfois préconisée même si l’effet réel   des petits seuils sur le transport de la charge de fond n’est pas démontré dans tous types de contexte. Dans ce cadre, notre étude a pour objectif d’apporter des éléments quantifiés pour (i) documenter l’interruption des transferts sédimentaires grossiers (> sables fins) par un petit seuil sur un système fluvial côtier méditerranéen (le Gapeau), et (ii) discuter la pertinence de sa suppression pour la restauration de la continuité sédimentaire. Ces éléments sont produits partir d’approches croisées de suivis de la dynamique sédimentaire du fond du lit (bathymétrie, traçages sédimentaires, chaines d’érosion et suivis topographiques) et de modélisation de capacités de transport. Nos résultats nous permettent de conclure que le seuil étudié ne semble pas constituer d’entrave physique au transfert de la charge de fond dans la mesure où aucune accrétion nette n’a été observée en amont de l’ouvrage malgré des crues importantes enregistrées durant le suivi. Néanmoins, la mesure indirecte du transport solide montre qu’il n’existe pas ou plus de charriage sur ce cours d’eau qui connait un fort déficit sédimentaire. Ainsi, la suppression de seuil sur le Gapeau serait insuffisante pour atténuer le déficit sédimentaire fluvial et/ou littoral. Il conviendrait plutôt de concentrer la réflexion sur la réalité des entrées sédimentaires et l’efficacité des connexions entre les versants et le chenal."
Les auteurs précisent encore :
"La mesure indirecte du transport sédimentaire a montré que la charge de fond n'est pas (ou plus) transportée le long de la rivière Gapeau (à l'exception d'un peu de transport résiduel de sable et de gravier que nous n'avons pas réussi à quantifier). Le transport sédimentaire mesuré, même lors d'une crue de 5 ans, avait un volume extrêmement faible (456 m3) et était très inférieur à la capacité de transport (20 200 m3). Cette différence indique que la rivière Gapeau présente un important déficit sédimentaire. Nous avons également observé un pavage important du lit de la rivière qui variait de 2,1 à 10,5 en aval de la zone d'étude. Le lit de la rivière Gapeau est ainsi quasi stable lors des crues les plus courantes, et il ne reste qu'une faible coulée sédimentaire composée de sable et de gravier. Ce débit est trop faible pour être détecté par des mesures indirectes de transport sédimentaire, mais nous l'avons détecté lors du suivi de la retenue de Sainte Eulalie.

Des mesures bathymétriques supplémentaires effectuées à l'embouchure de la rivière Gapeau avant et après la crue de décembre 2008 ont indiqué que 1 300 à 1 400 m3 de sédiments (sable moyen à grossier) ont été apportés aux plages (Brunel, 2010; Capanni, 2011). Cependant, ces apports en conditions hydrologiques actives (Q5) ne compensent pas les 2 700 m3.an-1 estimés d'érosion côtière (Capanni, 2011). Ainsi, les apports fluviaux de la rivière Gapeau semblent peu contribuer au trait de côte. Les volumes actuels de sédiments grossiers fluviaux ne sont pas suffisants pour maintenir la rivière en bon état, et le système fluvial du Gapeau présente un déficit sédimentaire sévère malgré la présence du seuil de Sainte Eulalie. Ces éléments soulèvent ainsi des questions sur l'utilité de retirer le seuil pour rétablir la continuité sédimentaire et entretenir le trait de côte. Le déversoir n'entrave pas l'écoulement du sable, dont le volume est beaucoup trop faible pour contrebalancer les déficits côtiers en sable. Sur la base de nos observations du seuil de Sainte Eulalie, nous émettons l'hypothèse que la plupart des autres ouvrages du bassin versant ne gênent pas le transfert sédimentaire soit parce qu'ils sont déjà engorgés soit parce qu'ils n'ont jamais complètement interrompu le transfert sédimentaire. Le seuil de Sainte Eulalie, comme tous les seuils de la rivière Gapeau, était déjà présent dans le « profil des grands efforts hydrauliques » en 1954 (et probablement bien avant). Avant les années 1970, cependant, les données topographiques indiquent qu'aucune incision ou rétraction n'a eu lieu (Capanni, 2011). Les autres ouvrages sont situés en amont dans la zone du bassin versant, dans des contextes aux pentes souvent plus fortes que ceux de Sainte Eulalie, qui est aussi l'ouvrage le plus haut (3,5 m, contre 2,0 m pour les autres). Ainsi, si le seuil de Sainte Eulalie ne stocke pas de charriage, les autres seuils ne le sont probablement pas non plus. Ces observations sont cohérentes avec les résultats de la plupart des études sur l'influence des petites structures sur le transport du charriage dans des contextes géomorphologiquement dynamiques."

Discussion
Le faible effet sédimentaire des petits ouvrages hydrauliques est un trait récurrent des recherches menées sur ce sujet. Dans leur travail, les chercheurs le rappellent : "De nombreuses études ont mis en évidence l'influence des petites structures sur la morphologie des chenaux (Fencl et al., 2015), mais seules quelques études morphologiques se sont concentrées sur l'influence des déversoirs sur la continuité des sédiments grossiers. Les modifications morphologiques qu'entraînent les seuils couvrent souvent une superficie relativement réduite et sont liées soit à un engorgement de l'ouvrage en amont (ex. : sédimentation), soit à une poussée hydraulique en aval (ex. : incision en aval de l'ouvrage, apparition de berges médianes). A ce jour, aucun changement morphologique en aval des seuils n'a été explicitement corrélé au déficit sédimentaire qu'ils ont généré. Les quelques études portant sur l'influence des déversoirs sur la continuité sédimentaire suggèrent qu'ils ne l'influencent pas fortement (Csiki et Rhoad, 2010 ; Pearson et Pizzuto, 2015 ; Peeters et al., 2020 ; Casserly et al., 2021). Les sédiments de charriage peuvent quitter un réservoir lors d'épisodes de débit élevé (Pearson et al., 2011; Casserly et al., 2021) ou après avoir dépassé la capacité de stockage du réservoir (Major et al., 2012). Pearson et Pizzuto (2015) ont suggéré que toutes les fractions granulométriques dans le matériau du lit fourni en amont auraient pu être transportées à travers le réservoir qu'ils ont étudié, le long de la rampe en pente et au-dessus du barrage de 2,5 m, tandis que Peeters et al. (2020) ont observé un transfert sélectif de particules autour de la médiane. Cependant, la réponse des rivières à l'existence à long terme de déversoirs varie considérablement (Csiki et Rhoad, 2010) et dépend principalement des caractéristiques des ouvrages (c'est-à-dire la forme, la hauteur de la crête, la présence ou l'absence de systèmes de vannage), la rivière (c.-à-d. occurrence de grandes crues, taille des sédiments, capacité de l'hydraulique fluviale à transporter les sédiments au-dessus de la crête du déversoir) et les caractéristiques générales du bassin versant (p. ex. densité du déversoir en amont, apport de sédiments disponible) (Pearson et Pizzuto, 2015) . Par conséquent, comprendre l'influence des déversoirs sur les flux de sédiments (et donc la pertinence de les enlever) nécessite une approche de recherche et de gestion différente et plus intégrée que l'approche individualiste qui a été appliquée aux grands barrages (Fencl et al., 2015)."

A rebours du discours public tenu depuis 15 ans pour justifier la destruction des petits ouvrages, ceux-ci ne représentent donc pas a priori un problème grave de transfert sédimentaire. Le même discours public avait déjà menti sur la soi-disant "auto-épuration" des rivières, que les barrages entraveraient alors que l'inverse est vrai (toutes choses égales par ailleurs, une retenue tend à éliminer divers intrants et polluants). La rhétorique est désormais connue : on ne met en avant que des aspects négatifs des ouvrages hydrauliques, quitte à les exagérer voire les inventer dans certains cas, alors que l'on passe sous silence leurs aspects positifs. Cette politique publique partisane et nuisible aux patrimoines des rivières doit cesser.

Référence : Anne-Julia Rollet et al (2022), Is removing weirs always effective at countering the sediment deficit? Case study in a Mediterranean context: the Gapeau River, Géomorphologie : relief, processus, environnement, 28,3, 187-200

08/04/2023

Le gouvernement reconnaît la nécessité de mieux stocker l'eau dans les ouvrages hydrauliques déjà en place

Confronté aux sécheresses, le gouvernement français vient d'annoncer un "plan eau". On y observe la timide reconnaissance de la nécessité de stocker l'eau avec, parmi les mesures citées, l'aide à l'entretien des ouvrages existants. Pour le moment, cette mesure est limitée à l'hydraulique "agricole". Mais il faut bien évidement l'étendre aux centaines de milliers de retenues, plans d'eau, canaux issus de l'hydraulique ancienne et permettant de stocker l'eau un peu partout sur le territoire. 


Après avoir financé pendant une décennie la destruction à marche forcée des seuils, digues, barrages, avec en conséquence l'assèchement des retenues et canaux dérivés de ces ouvrages hydrauliques, le ministère de l'écologie entame une timide marche arrière. Il faut dire que là où cette politique a été appliquée, le retour à la rivière dite "naturelle" n'a nullement tenu les promesses naïves de paradis retrouvé: on a observé partout en 2022 des rivières et ruisseaux à sec ou réduits à un filet d'eau chaude. Ceux des riverains qui jouissaient auparavant de retenues y ont vu à juste titre une catastrophe locale pour l'eau, le vivant, l'agrément. La délégation à la prospective du Sénat avait déjà publié quelques mois plus tôt un rapport appelant à cesser la disqualification du stockage

Le plan eau, révélé au début de ce mois par le président de la république et porté par le ministère de l'écologie, reconnait la nécessité d'améliorer le stockage de l'eau dans les ouvrages, et d'investir à cette fin afin déjà d'améliorer les ouvrages existants. 

Dont acte. Mais que les préfets fassent immédiatement cesser les programmes de syndicats de rivière et financements des agences de l'eau qui persistent à dilapider l'argent public dans ces destructions et assèchements, alors que cette nouvelle politique exige l'aménagement et la gestion des ouvrages. Ce que demandait déjà la loi de 2006, non appliquée par une administration eau & biodiversité ayant préféré un programme douteux de retour aux rivières sauvages. Nous le payons aujourd'hui par le retard dans l'adaptation hydroclimatique comme dans la transition énergétique

Extraits :

AMÉLIORER LE STOCKAGE DANS LES SOLS, LES NAPPES, LES OUVRAGES

OBJECTIF : Remobiliser les ressources existantes et répondre au besoin de développer l’hydraulique agricole, dans le respect de la réglementation

• La préservation des zones humides sera renforcée avec 50 M€/an supplémentaires de paiements pour services écosystémiques et le Conservatoire du littoral consolidera sa stratégie d’acquisition foncière. Dès 2024

• Un fonds d’investissement hydraulique agricole sera abondé à hauteur de 30M€/ an pour remobiliser et moderniser les ouvrages existants (curages de retenues, entretien de canaux…) et développer de nouveaux projets dans le respect des équilibres des usages et des écosystèmes. Dès 2024

• Une stratégie nationale et un guide technique relatifs à la mise en place de systèmes de recharge maîtrisé des aquifères seront élaborés. 2024

16/02/2023

Le ministère de l’écologie prépare un nouveau décret sur les chantiers de renaturation des cours d’eau

Certains voudraient «renaturer» les cours d’eau à la pelleteuse et sur argent public sans être ennuyés par des détails comme l’étude d’impact réel du chantier, l’analyse de son coût-bénéfice ou l’avis des citoyens en enquête : le conseil d’Etat avait douché leurs espoirs en annulant un décret de 2020 permettant de faire n’importe quoi sur un cours d’eau sous ce prétexte de «renaturation». Le ministère vient d'annoncer qu'il remettrait en mars un projet de nouveau décret au comité  national de l'eau. Mais les mêmes causes produiraient les mêmes effets : si les services eau & biodiversité du ministère de l’écologie préparent à nouveau un décret d’exception permettant de modifier de larges pans de l’environnement des riverains sans leur permettre une bonne information et une participation à la décision, nous irons en justice pour faire annuler le décret (et pour attaquer des chantiers problématiques). La gestion écologique doit être démocratique, et non pas un dogme d’expert imposé : c’est le fond du problème sur certains chantiers engagés contre l’avis des citoyens et contre la vision de la nature défendue par ces citoyens.  


Le Sénat a vu un échange intéressant entre le Sénateur Jean-Raymond Hugonet (Essonne) et le Ministre Christophe Béchu (transition écologique), au sujet du décret du 30 juin 2020  relatif aux travaux de renaturation des cours d'eau - et de son annulation partielle par l'arrêt du Conseil d'Etat de 2022, suite à une requête co-portée par notre association. Le ministre promet un nouveau décret : on va le suivre de près, car s'il reprend la simplification bâclée de la casse des ouvrages hydrauliques et des assèchements de milieux sans étude d'impact et sans enquête publique, nous irons de nouveau en justice.

Rappelons les faits. Par décret scélérat du 30 juin 2020, le gouvernement avait tenté de faire passer tout chantier de restauration de la nature sous le régime ultra-simplifié de la simple déclaration administrative, sans étude d'impact ni enquête publique, sans aucune limitation sur la surface concernée. Un blanc-seing à n'importe quelle dépense publique et n'importe quelle altération de l'environnement local par les syndicats de rivière ou autres instances pouvant intervenir sur cours d'eau et zones humides. Ce décret a été annulé à notre demande par le conseil d'Etat.

Pourquoi ce sujet est-il polémique ? Car sous couvert de "renaturation" ou de "restauration",  le gestionnaire public de l'eau a également détruit et asséché des milliers de moulins, étangs, barrages, retenues, plans d'eau, canaux, biefs depuis des années. Ce qui soulève tant la protestation locale des citoyens que l'opposition nationale des associations, fédérations, syndicats concernés par les usages, paysages et patrimoines de l'eau. 

Plusieurs syndicats de rivière de l'Essonne avaient écrit en début d'année au ministre de l'écologie pour se plaindre de cette annulation du décret de 2020, qui bloque leurs chantiers. Leur sénateur a interpellé le ministre à ce sujet, échange que l'on peut suivre dans cette vidéo :




De son côté, le sénateur demande un nouveau décret, en prenant soin de préciser que celui-ci doit exclure des travaux qui posent problème comme la destruction de moulins, l'augmentation du risque inondation, la nuisance à la mobilisation hydro-électrique pour la transition énergétique. 

Le ministre affirme qu'un nouveau projet de décret sera soumis mi-mars au comité national de l'eau, pour publication dès cette année.

Nous verrons ce qu'il en est. Mais nous rappelons ce que nous avons rappelé aux conseillers d'Etat :
  • l'écologie n'est pas un sujet mystique qui doit étouffer toute analyse critique, un chantier écologique est un chantier comme un autre, il peut très bien avoir des effets secondaires indésirables pour les populations, la vigilance est donc de mise ;
  • certains risques sont oubliés par le sénateur, par exemple l'asséchement (et non l'inondation), la fragilisation du bâti riverain (rétraction argile, pourrissement fondation bois), la remontée d'espèces invasives, la perte de réserve incendie... c'est tout cela qu'une étude d'impact et une enquête publique visent justement à prévenir, à partir du moment où les effets du chantier sont conséquents (cela vise aussi à prévenir le risque de plaintes pénales si un chantier mal préparé nuit aux tiers ou aux milieux, donc à sécuriser le projet);
  • la question n'est pas de faire telle ou telle exception pour tel ou tel ouvrage particulier comme le moulin, la question est de reconnaître que tout ouvrage hydraulique est susceptible de rendre des services écosystémiques, d'avoir des avantages environnementaux / sociaux, donc que le gestionnaire public doit désormais l'étudier avant de prendre la moindre décision, cesser de suivre un dogme naturaliste idiot ("c'est artificiel donc c'est mal, même pas la peine d'analyser la réalité") ;
  • Il y a en outre un problème d’égalité devant la loi, puisque modifier des centaines de mètres voire des kilomètres de linéaire de rivière serait simplement déclaratif pour certains chantiers (par exemple restaurer un habitat, ce qui est dans le code de l’environnement) mais pas pour d’autres (par exemple produire de l’énergie bas-carbone, ce qui est aussi une injonction du code de l’environnement) ; or si la puissance publique simplifie, elle doit le faire pour tous et de manière cohérente au droit, non pas créer des exceptions parce que c'est l'idéologie d'une sous-direction ministérielle.
Les hauts fonctionnaires du ministère de l’écologie nous lisent : ils savent donc que s’ils tentent encore une rédaction aberrante et ad hoc pour passer en force, ce sera la reprise des hostilités et l’incertitude juridique pour les chantiers. Une bonne gestion écologique de l’eau stoppe les dogmes et permet aux acteurs locaux de débattre librement des rivières, plans d’eau et zones humides qu’ils désirent, sans diktat du ministère, des agences de l’eau et des préfectures en faveur d’ une seule solution financée au détriment de toutes celles qui sont négligées.