26/08/2020

Députés et sénateurs attendent de Barbara Pompili une clarification sur les ouvrages hydrauliques

Les parlementaires ne comprennent toujours pas : alors qu'ils votent des lois demandant d'aménager sans les détruire les moulins et étangs, mais aussi de favoriser l'équipement hydro-électrique de ces sites, les administrations et les syndicats en charge des rivières semblent avoir comme principale ambition d'en supprimer le plus grand nombre et de compliquer les projets. Qui fait la loi dans notre pays, sinon la volonté du parlement élu? Combien de temps l'administration va-t-elle essayer de déroger à ce que lui disent sans relâche les élus de la République, législature après législature? Cet été, les députés Borowczyk et Perrot, les sénateurs Gabouty et Bonne ont encore interpellé le ministère de l'écologie à propos de cette anomalie. La continuité "apaisée" dont se prévaut fort hypothétiquement le gouvernement, cela consiste à revenir à la loi : valoriser les ouvrages hydrauliques et leurs milieux en améliorant les conditions des poissons migrateurs, mais aussi en respectant les autres usages de l'eau et les autres formes de biodiversité. Tant que tous les fonctionnaires des services techniques des syndicats, des DDT-M, des agences de l'eau, de l'OFB et de la direction ministérielle ne seront pas sur cet horizon de gestion défini par le législateur, il y aura des problèmes de terrain. 



Cet article de la Nouvelle République montre que de nombreux gestionnaires de l'eau n'ont pas intégré les principes d'une politique apaisée de continuité et persistent dans un discours conflictuel où l'ouvrage, réduit à l'état de "verrou", doit disparaître. Que ce discours soit tenu par des militants d'associations privées ou des représentants de lobbies, pourquoi pas. Par des représentants d'administrations ou de structures à agrément public, c'est un problème, car la loi française n'a jamais donné mandat à quiconque pour détruire le patrimoine installé et ses nouveaux écosystèmes.

A l'Assemblée nationale

Question N° 30543de M. Julien Borowczyk (Loire)
M. Julien Borowczyk interroge Mme la ministre de la transition écologique et solidaire sur l'avenir des moulins. La destruction des seuils des moulins, dont 90 % ne constituent pas d'obstacles à la continuité écologique (source OFB), parce qu'ils offrent des avantages écologiques incontournables d'une part, serait inopportune. En effet, lorsque les hommes ont construit la plupart des seuils de moulins, au moyen-âge, ils n'ont rien inventé, ils se sont contentés de copier ce que les castors avaient fait. Leurs ouvrages ont les mêmes propriétés écologiques : biodiversité, amélioration de la qualité de l'eau, alimentations des zones humides. D'autre part, sur le versant économique, les moulins peuvent retrouver leur utilité par la production d'électricité qui contribue à une certaine indépendance énergétique et la production de farine, ingrédient indispensable en période de confinement. Il souhaite connaître son avis sur ce sujet.

Question N°30943 de M. Patrice Perrot (Nièvre) 
M. Patrice Perrot appelle l'attention de Mme la ministre de la transition écologique et solidaire sur la mise en œuvre des dispositions de la loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat, relatives au développement de la production d'hydroélectricité. Pour répondre à l'objectif de neutralité carbone à 2050 et de réduction de 40 % de la consommation d'énergies fossiles d'ici 2030, l'article 1er de ladite loi a ainsi modifié l'article 100-4 du code de l'énergie afin que les politiques nationales encouragent la production d'énergie hydraulique, notamment la petite hydroélectricité. Les propriétaires de moulins qui souhaitent valoriser leurs installations en développant des pico centrales, dans le respect de la continuité écologique, s'inquiètent de la traduction concrète de cette disposition. En effet, les délais d'instruction par les services compétents sont souvent très longs et les démarches administratives lourdes. Par ailleurs, les études demandées à la charge du propriétaire sont parfois excessives en termes de coûts, qui pèsent sur la rentabilité même du projet. Alors que l'optimisation des équipements existants peut constituer un élément de l'accroissement de la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique et que la loi fixe un objectif en matière de développement de la petite hydroélectricité, il lui demande quelles instructions ou mesures concrètes auraient d'ores et déjà ou seront prochainement prises pour confirmer l'ambition ainsi portée par ladite loi.

Au Sénat

Question n° 17482 de M. Jean-Marc Gabouty (Haute-Vienne) 
M. Jean-Marc Gabouty attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique sur les modalités d'application des articles L. 214-18-1 et L. 214-17 du code de l'environnement.
Le législateur, souhaitant répondre à l'urgence écologique et climatique, a posé divers objectifs et notamment la nécessaire restauration de la continuité écologique des cours d'eau tout en tenant compte d'impératifs comme la protection du patrimoine - par exemple des moulins à eaux.
En 2019, le code de l'énergie a complété son arsenal législatif en introduisant un 4° bis à l'article L. 100-4 en mentionnant parmi les énergies renouvelables « la production d'électricité hydraulique, notamment la petite électricité ».
En Haute-Vienne, ainsi que dans de nombreux départements, se situent des moulins «régulièrement» installés au sens de l'article 2 de l'article L. 214-17 du code de l'environnement - comme par exemple le moulin de Bersac sur la commune de Rancon – qui ont vocation à produire de l'électricité.
La réponse publiée le 9 août 2018 (p. 4198) à la question écrite sénatoriale n° 1 874 - mentionne une lecture et une application sensibles des articles L. 214-17 et L. 214-18-1 du code de l'environnement ; et suggère la lecture de divers documents pour en faciliter l'application et la compréhension par les propriétaires, les associations de défenseurs de moulins et de cours d'eau ainsi que par les services de l'État. Sont cités le guide réalisé par les fédérations de défense des moulins et l'association française des établissements publics territoriaux de bassin ou encore le «plan d'action pour une mise en œuvre apaisée de la continuité écologique» ainsi que le règlement européen n° 1100/2007 du conseil en date du 18 septembre 2007 instituant des mesures de reconstitution du stock d'anguilles européennes.
L'application de ces articles nourrit des contentieux avec l'administration et semble susciter encore des divergences d'interprétation entre les fédérations de défense de moulins ou de cours d'eau et les services de l'État.
En conséquence, il lui demande de clarifier les conditions d'application des articles L. 214-18-1 et L. 214 - 17 du code de l'environnement.

Question écrite n° 16736 de M. Bernard Bonne (Loire) 
M. Bernard Bonne attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique et solidaire sur la nécessaire valorisation du patrimoine hydraulique des rivières dans notre pays.
Malgré 2 milliards d'euros dépensés chaque année par les agences de l'eau, les résultats ne sont pas au rendez-vous et la fracture entre les politiques nationales et les réalités de terrain s'accentue. Or, durant la crise du Covid-19, les petites centrales hydro-électriques ont continué à produire de l'énergie bas carbone, les moulins ont repris ou augmenté leur production d'huile ou de farine afin de faire face aux difficultés d'approvisionnement.
Plus généralement, face aux risques majeurs que notre pays affronte, manque d'indépendance énergétique, retard dans la production bas carbone, sécheresses et canicules, mais aussi grandes crues, déclin de la biodiversité, les ouvrages hydrauliques sont une réponse pertinente.
Or, contrairement à l'esprit de la loi de 2006 qui prévoit explicitement de « gérer, entretenir et équiper » les ouvrages hydrauliques et d'indemniser les charges exorbitantes résultant de travaux de continuité écologique là où ils sont indispensables, l'État dépense l'argent public pour détruire et assécher les seuils de moulins dont 90 % d'entre eux ne constituent pas des obstacles à la continuité écologique.
Aussi, alors que près de 50 000 sites sont ainsi disponibles pour mener une politique locale et active pour l'eau, le climat et les paysages, la biodiversité mais aussi l'économie locale, il souhaite savoir si le Gouvernement entend préserver nos moulins et étangs et non les détruire, et mener une réelle politique de co-construction avec les acteurs de terrain.

6 commentaires:

  1. Si vous attendez des moulins d'antan la farine pour vous nourrir vous risquez de faire "des crottes fines" comme disait ma grand mère rouergate : un peu de sérieux tout de même !

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  2. Hello Anobyme du 26 Aout,
    Ici on parle d'une évolution dans l'usage, a savoir de la production d'énergie qui peut être la production d'électricité décarbonée (hydroélectrique),la production d'hydrogène, et autres solutions qui sont pertinentes et en droite ligne de l'évolution qu'on eus les moulins par le passé.
    Si on casse a tout vas ce potentiel et qu'a un moment on souhaite par exemple réduire le nucléaire,on se prive a tout jamais de cette ressource car il ne sera plus possible de reconstruire les seuils.
    Quand on parle de moulins, il ne faut pas se focaliser sur la farine, on dénombre une centaine d'usages différents sur les moulins.
    Et l'usage des moulins dans la transition énergétique est tout a fait pertinent pour une production d'énergie verte.

    Gépéto

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  3. l'ADEME chiffre à 1GW la puissance possible de ces barrages au fil de l'eau colossal

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  4. L'ADEME n'a jamais brillé pour son expertise en matière énergétique. Cette estimation est naïve : elle consiste à multiplier le nombre de moulins (Plus de 90.000 au début du XIXème siècle) par la puissance exigée pour mouvoir une meule...5CV divisé par le rendement on obtient autour de 100 kW par meule d'où le chiffre annoncé.... L'ADEME n'a rien inventé comme vous pouvez le constatez. On trouve d'autres estimations dans la littérature dont la plus sérieuse est celle d'EDF dans son inventaire de 1953 qui trouve seulement 4000 chutes possibles de moins de 2 MW dont 3300 de 10 à 300 kW, 400 de 300 kW a 1MW et 300 de 1 à 2 MW pour un productible de 8TWh. Ce que ne dit pas cet inventaire c’est le cout pour lequel ce soit-disant potentiel pourrait être mis en œuvre … Plus près de nous, on peut également citer le rapport Dambrine (Mars 2006) qui indique que « Des études montrent que 30 000 peuvent être équipés, sans changer la configuration de la rivière, à condition de mettre au point les matériels pour exploiter cette énergie à des coûts raisonnables. » sans donner aucune référence sur les études en question. Il signale par ailleurs, toujours sans aucune justification ni estimation de cout, que « Le potentiel des centrales entre 10 kW et 100 kW, serait de1TWh »….
    Aujourd’hui une grande partie du potentiel identifié par EDF en 1953 (la moins chère) a été réalisée (on devrait dire « écrémée ») grâce à la redevance (CSPE) payée par tous les consommateurs d’électricité (merci pour eux) qui a servi, sur les conseils éclairés de l’ADEME à acheter les kWh hors de prix générés par la petite hydraulique ….quant à vos chers moulins il faudrait sans doute aujourd’hui compter sur des prix rapportés au kWh trois à quatre fois supérieurs à ceux du Photovoltaïque pour les transformer en centrales hydroélectriques … en remplaçant leurs vénérables artifices (roues à aube, roudets,…) par des équipements modernes : VLH, Vis hydrodynamique et autres turbines adaptées aux faibles hauteurs de chute… au grand dam des véritables amoureux du patrimoine…et des consommateurs d’électricité.

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    1. Depuis 1953, il y a eu d'autres travaux. L'UE a financé une recherche, voyez les résultats publiés en 2019 ici :

      http://www.hydrauxois.org/2019/01/premiere-evaluation-europeenne-du.html

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  5. Comme pour l'inventaire d'EDF, les sources et les méthodes de l'estimation ne sont pas mentionnées ... mais là n'est pas l'essentiel : Il est bien certain qu’aujourd’hui la remise en route des anciens moulins n’offrirait aucune difficulté technique. Indépendamment des impacts environnementaux (Les anciens moulins ne fonctionnaient pas comme des centrales hydroélectriques, je suppose que cela ne vous aura pas échappé ?) et patrimoniaux (Quel amoureux des moulins supporterait de voir des infrastructures bétonnées défigurer l’objet de sa passion ?), la question importante auquel votre article ne répond pas (pas plus sans doute que l’article originel) est le cout auquel toutes ces belles réalisations pourraient être obtenues ? Car c’est bien ce filtrage financier qui fait que l’on passe des 24 748 ouvrages du projet Restor-Hydro (Fabrice Dambrine en avait trouvé 30.000 en 2006: les records sont faits pour être battus !) à, seulement, 3.300 pour EDF en 1953…dont la plupart ont été sagement laissés dans leur état patrimonial.

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