01/03/2016

Armançon : on efface des seuils malgré un état piscicole excellent de la masse d'eau

Le Sirtava et la commune de Tonnerre s'apprêtent à ouvrir une enquête publique pour l'effacement de deux seuils de la ville. Nous avons déjà montré pourquoi ce projet – qui coûterait 130 k€ de chantier et plus de 200 k€ en incluant les études – n'a quasiment aucun intérêt. En analysant les données de qualité DCE 2000, on s'aperçoit que la masse d'eau concernée (Armançon intermédiaire) est en état piscicole bon ou excellent dans les 3 derniers relevés, avec des scores qui tendent à s'améliorer. Cela malgré la présence de dizaines de seuils à l'amont comme à l'aval du point de contrôle, selon le Référentiel des obstacles à l'écoulement (ROE) de l'Onema. La gabegie d'argent public au nom de la continuité écologique continue de plus belle. Il faut cesser cette dérive. 

Rappelons pour commencer les principes généraux de l'analyse de qualité des rivières. La France doit répondre à l'Union européenne de la qualité écologique et chimique de ses masses d'eau demandée par la Directive cadre européenne de 2000 (DCE), avec une soixantaine d'indicateurs à surveiller (dans 3 compartiments, biologique, physico-chimique et chimique). Une masse d'eau est une rivière ou une partie de rivière ayant une cohérence hydrologique. Le linéaire de l'Armançon est donc divisé en plusieurs masses d'eau de la source à la confluence. Celle qui intéresse Tonnerre a pour code européen FR HR65, et pour nom technique "L'Armançon du confluent du ruisseau de Baon (exclu) au confluent de l'Armance (exclu)", soit le cours intermédiaire de la rivière entre Tanlay et Saint-Florentin

Comme le savent ceux qui essaient de les consulter, les données de qualité de l'eau (gérées par les Agences en France) sont un véritable maquis. On devrait avoir une base nationale homogène avec, sur chaque masse d'eau, toutes les données détaillées et classées par année. Il n'en est rien. Certains bassins ont des interfaces assez accessibles, d'autre non. Les fichiers que l'on parvient à télécharger proviennent de toute sortes de sources publiques disséminées – on en trouve pas exemple sur data.eaufrance.fr, rapportage.eaufrance.fr, surveillance.eaufrance.fr, sans parler des agences qui ont ou non leur base… pourquoi faire simple et transparent quand on peut faire opaque et compliqué?

Dans le fichier de l'état des lieux 2013 fournis par l'Agence de l'eau Seine-Normandie, l'Armançon moyenne (FR HR65) est donnée en état biologique moyen, en état physico-chimique moyen, en état chimique "inconnu". Les causes exactes de dégradation écologique sont réputées "inconnues" (comme sur la plupart des masses d'eau de ce fichier). Dans les données disponibles cette fois sur le site du rapportage DCE à l'Union européenne, on observe une dégradation de l'état chimique de masse d'eau, due à la pollution diffuse aux hydrocarbures aromatiques polycycliques ou HAP (ici deux molécules, Benzo(g,h,i)perylene et Indeno(1,2,3-cd)pyrene).

La mesure spécifique nous intéressant est la qualité piscicole – qui, bien sûr, est encore hébergée à une autre adresse internet (ce serait trop simple), image.eaufrance.fr. Elle est disponible quant à elle de manière détaillée (score inclus) de 2001 à 2013, mais il n'y a pas un relevé chaque année sur chaque masse d'eau. Sur le tronçon concerné de l'Armançon, nous avons trouvé trois relevés de l'indicateur de qualité (indice poisson rivière IPR) pour les années 2003, 2008 et 2012. La station de contrôle de la qualité piscicole est située à Tronchoy, à l'aval de Tonnerre. Les résultats sont ci-dessous.


On observe que la qualité piscicole de la masse d'eau est considérée comme bonne (vert, entre 7 et 16) ou excellente (bleu, < 7) dans les 3 derniers relevés, avec une tendance à l'amélioration du score (plus le score est faible, meilleure est la classe de qualité). Cela signifie qu'au regard des critères européens, il n'y a aucun besoin d'effacer des ouvrages pour ce compartiment piscicole, qui est déjà dans la meilleure classe de qualité.

Ci-dessous, nous publions la carte ROE-IGN du tronçon de la masse d'eau FR HR65. Les flèches noires indiquent les ouvrages de Tonnerre (en bas) et la station de contrôle piscicole de Tronchoy (au-dessus). Surtout, les points rouges innombrables signalent les seuils en rivière.


Cela signifie que malgré la présence de nombreux ouvrages hydrauliques à l'amont comme à l'aval, la rivière parvient à un bon score pour ses peuplements piscicoles tels qu'ils sont évalués pour la directive européenne. Ces données infirment la fable selon laquelle les ouvrages supprimeraient tellement les habitats naturels que les espèces d'intérêt pour la masse d'eau auraient quasiment disparu. Ces données expliquent aussi peut-être la raison pour laquelle les bureaux d'études et le syndicat n'ont pas cru bon donner aux élus et aux citoyens une analyse complète de l'état de la masse d'eau et de ses causes exactes de dégradation.

Notons au passage que même si l'état piscicole avait été moyen ou mauvais, il aurait encore fallu démontrer un lien causal avec la continuité longitudinale, sachant que l'écart au bon état sur une rivière peut avoir de nombreuses raisons, les seuils de moulin étant l'une des moins probables si l'on en croit la faible variance associée dans les travaux scientifiques (cf par exemple Van Looy 2014 et Villeneuve 2015 sur des rivières françaises, et d'autres recherches internationales en hydro-écologie quantitative ou en histoire de l'environnement sur l'impact modéré de la morphologie pour la qualité biologique du cours d'eau). Inversement, ce n'est pas parce que l'état piscicole est bon qu'on peut en attribuer la cause aux seuils, on peut simplement constater que ceux-ci ne sont pas associés à une dégradation du linéaire sur ce compartiment.

Conclusion : le Sirtava à Tonnerre agit exactement comme le Sicec à Nod-sur-Seine, et comme tant d'autres syndicats de rivière ou fédés de pêche en France, en détruisant des seuils au prétexte de sauver des poissons qui n'en ont manifestement pas besoin au regard des mesures officielles de qualité des masses d'eau que nous envoyons à Bruxelles. Le tout avec la bénédiction de l'Agence de l'eau Seine-Normandie, qui signe généreusement des chèques avec notre argent. Combien de dizaines de millions d'euros gâche-t-on ainsi chaque année à détruire le patrimoine hydraulique de notre pays, alors que certains besoins autrement plus importants des collectivités, et des rivières, ne peuvent plus être assurés correctement? C'est absurde, et obscène.

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26 commentaires:

  1. Vos titres font vendre: Armançon : on efface des seuils malgré un état piscicole excellent de la masse d'eau.
    Je m'essaie aussi : Armançon : des pico/micro centrales hydroélectriques financées avec de l'argent public non rentables.
    ou encore: Gomméville la roue tournera t elle un jour ! ou plutôt : De l’électricité sera t elle produit un jour à Gommeville !

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    1. Excellent, vous avez du talent. Faites donc un blog et cessez de troller celui-là. Les commentaires ne concernant pas le fond des des articles ne seront plus publiés.

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  2. Quel est aujourd'hui l'usage associé à ces seuils?

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    1. surement aucun comme beaucoup d’ailleurs

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    2. Aucun à notre connaissance. Pensez-vous qu'il faut supprimer tous les ouvrages et édifices sans usage, sans avoir à motiver l'intérêt de cette charge publique?

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    3. Je pense que ce choix appartient aux propriétaires. Si l'Armançon est classé liste 2 (est ce bien le cas?) alors les seuils et autres obstacles doivent être aménagés. Par conséquent ou se situe le problème, les propriétaires saisissent l'occasion qui leur est donné à savoir aménagement de l'ouvrage ou effacement. Dans le cas d'ouvrages sans usages peut on leur reprocher de choisir cette solution?

      Je ne comprends pas bien, quel est la position de l'hydrauxois, votre volonté est elle de conserver tous les ouvrages? Ou êtes vous inquiets des dépenses publiques? Dans le fond y a t il un ouvrage ayant un intérêt patrimonial ou économique qui aujourd'hui fait partie des projets d'effacement?

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    4. A partir du moment où c'est une dépense publique (ici financement à quasiment 100%), qui concerne des écoulements ayant un effet sur le paysage, sur le patrimoine bâti, sur les milieux et sur les riverains (donc des tiers), et dans un cas sur un ouvrage communal (donc public), le choix n'appartient pas seulement aux propriétaires. Au demeurant, c'est pourquoi il y a une enquête publique et en dernier ressort un accord du Préfet. Quand vous voulez construire un barrage, il ne suffit pas de l'accord du propriétaire. Quand vous voulez le détruire, c'est pareil.

      Pour Tonnerre, nous avons étudié le cas de l'effacement à la demande de riverains qui ont contacté notre association et nous ont fait parvenir les dossiers. C'est notre rôle démocratique normal.

      Notre position a été exposée dans le précédent article et celui-ci. Nous voyons les coûts publics, nous voyons les désavantages et les risques, nous ne voyons pas en face un intérêt écologique significatif. Nous souhaitons que les porteurs du projet s'engagent vis-à-vis de la population sur des objectifs écologiques précis (l'Agence de l'eau n'est pas là pour faire du paysager, à ce qu'elle nous a dit à maintes reprises), afin que l'on sache à quoi sert l'action pour les milieux. Et nous voulons que nos élus adhérents sur tout le bassin interrogent la priorité des travaux, par rapport aux missions premières des syndicats hydrauliques (entretien des berges, gestion des embâcles, prévention des crues, etc.).

      Quant au classement actuel des rivières, vous n'êtes pas sans ignorer que nous en contestons la pertinence et que nous souhaitons sa révision, au demeurant prévue par les textes. L'art L 214-17 CE est discuté en ce moment dans divers amendements parlementaires (il y aura encore des débats à l'Assemblée sur la loi Biodiversité), en attendant la position réglementaire de la Ministre après la mission CGEDD.

      Il est évident à nos yeux qu'il faut revoir ce classement et concentrer les investissements publics sur nos obligations réelles liées à des engagements européens avec objectifs (directives européennes nitrates, eaux usées, qualité des eaux, pesticides). Depuis le vote de la continuité dans la LEMA 2006, le contexte a changé (en particulier l'état de nos finances publiques, sans lesquelles la continuité est inapplicable car les emplois d'accompagnement comme les études et les chantiers en dépendent) et les connaissances ont évolué.

      Il semble quasi-acquis qu'il y aura a minima un délai de 3 ans supplémentaires pour les projet déjà engagés (cas de Tonnerre), soit décembre 2020. Pourquoi ne pas réfléchir un peu avant de perturber l'équilibre actuel des sites concernés?

      Cela dit, nous écrirons au Préfet pour signaler certains manquements dans le dossier actuel, nous donnerons notre avis à la Commission d'enquête et nous verrons bien ce qui se conclut au terme du processus. Nous n'allons pas nous acharner par tout moyen à faire échec au Sirtava, simplement exposer notre désaccord de fond sur ce projet. Comme nous le ferons à Montbard si le BE propose l'effacement des deux ouvrages de la ville.

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  3. Note aux anonymes : nous avons déjà été obligés de rétablir une modération en raison de trolls anonymes, à notre regret. Le débat est bienvenu, mais merci de commenter le contenu précis des articles concernés et de développer des arguments les concernant. Il y a 277 articles sur ce site, donc 277 matières à faire des observations sûrement très pertinentes.

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  4. "alors que certains besoins autrement plus importants des collectivités, et des rivières, ne peuvent plus être assurés correctement? C'est absurde, et obscène." alors qu attendez vous pour les satisfaire ?

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    1. C'est absurde. Notre association n'a pas de mission de service public, contrairement aux collectivités et syndicats. Elle n'a pas non plus de subventions, contrairement à certaines qui font la claque servile du Ministère sur le dossier de la continuité.

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  5. donc pas d'assistance aux propriétaires, des conseils sur les installations à effectuer non suivis pas les propriétaires d'ouvrages, pas d'aides financières,des articles sur des sites dont vous ne consultez pas les propriétaires pour avoir leurs visions des faits, une aide humaine lors des désembaclement? Je ne crois pas...
    Dire aux propriétaires n'écouter pas les discours de l'administration et les laissés dans l'immobilisme avec l'espoir que la loi change, c'est donc ça l'assistance hydrauxois?


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    1. On parlait de besoins des collectivités et des rivières, maintenant vous parlez d'assistance aux propriétaires : mais c'est quoi ce charabia?

      Une dernière fois : si vous avez des commentaires sur l'IPR et sur l'intérêt piscicole de l'aménagement de Tonnerre (=objet de l'article où figure votre commentaire), vous écrivez. Si vous n'avez rien à dire que des généralités non informées et des insinuations à peine lisibles, abstenez-vous.

      Observation : les 3/4 des commentaires "anonymes" n'ont aucun rapport avec les arguments développés dans les articles concernés. Lassant.

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  6. Quelle est votre proposition concrète, hormis attendre et a quelle prix pour rendre ces ouvrages franchissables?

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    1. Si votre voiture n'a pas besoin de révision, vous allez chez votre garagiste pour le plaisir de dépenser quand même? Nous, non.

      Ces ouvrages sont franchissables aux migrateurs, puisqu'on trouve des anguilles plus haut sur le bassin. L'IPR de la masse d'eau est excellent au regard des critères DCE 2000. Donc il n'y a rien de particulier à faire sur le plan de la mise aux normes écologique. D'ailleurs, il y a des dizaines de seuils de l'Armançon classé L2 où l'on ne fait rien, à commencer par les 2 autres de Tonnerre.

      Donc vous dites "quel prix" : bonne nouvelle, on économise 130 k€ de dépense inutile à la collectivité. Cela permettra de mieux satisfaire les besoins des communes adhérentes du Sirtava. Rappelons qu'il y a 59 préconisations d'action dans le PAGD du SAGE. Elles sont très loin d'être satisfaites : les besoins ne manquent pas, inutile d'en inventer de toutes pièces.

      Inversement, pouvez-vous nous dire ce qui sera obtenu pour les sommes dépensées? Vous vous engagez à quel bénéfice exact (pas des généralités non vérifiables) pour quelles espèces et avec quel intérêt pour les riverains? Ces riverains ont-ils donné leur avis sur la dépense et le bénéfice en étant correctement informés? Qui prend la responsabilité formelle de réparer à ses frais les piles et culées des ponts si elles ont des problèmes de stabilité dans 5, 10 ou 15 ans, vu qu'on est censé changer les écoulements de façon significative (sinon, on ne ferait rien,n'est-ce pas)?

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    2. Concrètement que proposez vous aux propriétaires ayant l'obligation de respecter ce principe de continuité écologique?

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    3. A Tonnerre? Nous allons déjà demander au Préfet et au Commissaire enquêteur de faire respecter certains principes de la loi et de la règlementation, en copie à Mme la Ministre dont on connaît les positions (et l'irritation sur cette question en train de devenir un symbole de la mauvaise action de son Ministère). Nous verrons ensuite ce qui se passe. L'administration peut décider que vu le faible enjeu environnemental et le risque sur les fondations des ponts anciens, il y a matière à surseoir à la mise au norme de ces ouvrages en particulier.

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    4. A noter : outre l'inutilité écologique du chantier (objet de cet article), vous avez quand même un BE qui a exclu l'effacement et exprimé une alerte sur cette histoire de pont (voir précédent article sur le sujet). Le premier conseil qu'on peut donner aux propriétaires, c'est de vérifier qu'ils bénéficient bien d'une décharge de responsabilité pour tout ce qui concerne un problème lié à un changement d'écoulement et un abaissement de la ligne d'eau. S'il y avait une facture à régler sur un ouvrage d'art, elle serait très lourde. Je ne connais pas beaucoup de maître d'ouvrage, surtout privé, qui choisirait spontanément de prendre ce genre de responsabilité.

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  7. Extrait du dernier comité syndical SIRTAVA :

    "L’AESN a expliqué dans son nouveau programme la révision du programme suite aux prélèvements de l’Etat jusqu’en 2018. La politique de l’AESN est de dire que tout ce qui a été prévu ne sera pas réalisé. Par contre, ce qui est légitime, sera financé d’autant mieux (augmentation des financements de 50 à 60 %)."

    Fait : il y a de moins en moins d'argent dans les caisses du principal financeur de l'eau et il faut choisir les objectifs "légitimes".

    En quoi casser deux barrages sur vingt d'un tronçon au score piscicole déjà excellent si l'on en croit les données trouvées par Hydrausois est une opération "légitime" ? Ceux qui soutiennent ce projet peuvent-il nous le défendre, nous dire en quoi c'est formidable, nous faire un peu rêver, nous expliquer pourquoi et comment la rivière n'est pas "morte" avec tous ces barrages?

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    1. J'étais à la dernière réunion publique réalisée par le SIRTAVA sur ce projet, ce que j'en retiens c'est qu'il ne faut pas s'attendre à une amélioration immédiate de la qualité de l'eau avec l'effacement de 2 ouvrages.
      En revanche le syndicat porte des réflexions sur la quarantaine d'ouvrages de l'Armançon. Le choix de l'effacement à Tonnerre me parait justifié ( il n'y a pas plus efficace pour retrouver un écosystème de rivière) et entre nous, je préfère que mon argent soit dépensé comme cela, il y a 20 ans, le sirtava aurait dépensé 2 fois plus pour mettre des clapets et reprendre le déversoir.
      Est-ce que ça aurait amélioré le fonctionnement de la rivière?
      Il suffit de se rendre à l'amont du barrage d'Argenteuil pour se rendre compte que l'Armançon ressemble à un canal, aucune dynamique, aucune diversité, aucune forêt alluviale.
      Aujourd'hui, la restauration du cours d'eau me semble plus "légitime", plus pérenne, avec de meilleurs effets sur l'écosystème de la rivière, que les actions autrefois financées par des fonds publics : coupe des arbres qui penchent, dévegetalisation d'ouvrage, mise en place de clapets, curage d'atterrissements...

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    2. Merci de votre commentaire. Nous sommes certainement d'accord sur le fait que les dépenses d'il y a 20 ou 30 ans n'étaient pas optimales pour les milieux. Reste que la légitimité écologique de l'action à Tonnerre est douteuse: il est admis qu'il n'y aura pas d'effet immédiat (ni probablement futur) sur les milieux ; d'autres tronçons de la rivière sont en état plus dégradé, y compris au plan piscicole. Si l'argent manque réellement, c'est quand même dommage de le dépenser dans des opérations sans effet réel sur nos obligations relatives à l'état chimique / écologique des masses d'eau... non?

      Que la rivière présente des zones canalisées / banalisées, c'est un fait. A ma connaissance, aucune autorité administrative ou politique n'a donné mandat à quiconque de restaurer l'intégralité des habitats des cours d'eau. Avec 500.000 km de linéaire, cela engloutirait tout le budget des Agences pour un paquet de temps. Il faut donc établir des priorités écologiques, ce qui n'est pas fait (on a seulement des priorités politiques = agir quand on trouve un MO pas trop hostile, ce qui est rare ; mais dans ce cas il faut le dire, pas essayer de tenir la langue de bois selon laquelle le choix est rationnel pour les milieux eux-mêmes).

      Enfin, il y a les milieux et il y a le reste : les usages, le patrimoine, le paysage, le potentiel énergétique etc. Si les syndicats de rivière deviennent quasi-exclusivement des antennes d'exécution des desiderata écologiques des Agences et du Ministère, alors qu'ils cessent tout de suite la fable de la démocratie locale de l'eau. Il ne font que recevoir des ordres et des chèques, sans réelle capacité des élus, riverains associations à peser sur les choix. Au demeurant, la transformation du Sirtava en EPTB avec plus de 200 communes et sa prise en main de la GEMAPI vont vider un peu plus de leur substance les possibilités d'expression démocratique. Dans ce cas, ne pas s'attendre à des lendemains qui chantent : il y a contentieux en proportion de l'absence de débat démocratique sur des alternatives réelles, quand les gens ont le sentiment que de grosses machines lointaines les mettent devant le fait accompli au nom des croyances du moment.

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    3. On ne peut pas forcer la main des propriétaires, le syndicat aide les propriétaires qui le souhaitent, l'état écologique s'en trouve amélioré (dé-colmatage du fond du lit, apparition d'atterrissements indispensables aux cycles de vie d'oiseaux et de végétation pionnière...).
      Pour l'état chimique, le syndicat de l'Armançon agit beaucoup! Et je le sais car sur ma commune il y a de l'animation agricole et une étude de bassin d'alimentation de captage. Qui ont pour objectifs de déterminer l'origine des pollutions chimiques et de les réduire.
      J'ai appris que l'Agence de l'eau dépense bien plus d'argent dans l'assainissement, l'eau potable ou même l'animation agricole que dans des travaux de restauration de rivière. Donc il faut arrêter de dire que l'agence de l'eau ne finance que ça.

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    4. Sur l'action de l'Agence de l'eau : regardez le bilan nitrates ou pesticides entre 1964 (leur création) et aujourd'hui. Nous ne disons pas que les Agences ne financent que la restauration physique (ce serait absurde), nous disons que leur action sur la chimie est globalement inefficace (hors phosphates) et qu'en matière de restauration physique, elles financent surtout des destructions. Les députés Dubois et Vigier ont demandé une base de données sur les opérations menées sur les ouvrages (coût, choix de l'aménagement), on l'attend avec impatience. (Mais bon, pas d'illusion, on l'aura dans 3 ans peut-être ; certaines Agences ne sont déjà pas capables de faire le rapportage européen de la DCE, dérive assez grave sur laquelle nous préparons un dossier).

      "Animation agricole" : OK :-). Faites donc de "l'animation moulin", cela nous ira très bien comme action, c'est parfaitement inoffensif.

      Les mots c'est bien, les faits et chiffres c'est mieux. Si l'état chimique de l'Armançon s'améliore depuis 10 ans, donnez les mesures qui le prouvent et nous serons tous contents de cette évolution. Et s'il ne va pas mieux, en bien donnes aussi les chiffres, mais remettez en question les actions.

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    5. Moi je dis ça je dis rien (parceque je ne suis ni agriculteur ni propriétaire de moulin) mais je trouve quand même que les agriculteurs ont plus de pression sur leurs épaules que les propriétaires de moulins. Et au niveau du syndicat, franchement, je pense que les 2 groupes d'acteurs sont abordés sans faire de forcing.

      Concernant l'argent public, il me semble contrairement à ce que vous dites que l'agence de l'eau seine dépense plus en franchissement piscicole qu'en suppression d'ouvrage.

      Concernant l'état chimique, des plantes aquatiques "type scirpes", qui étaient largement présentent sur les cartes postales anciennes sont revenues dans l'Armançon. N'est-ce pas signe d'une amélioration?

      Pour l’hydroélectricité (puisque vous en parlez plus haut), j’ai vu récemment un représentant de la FFAM sur un affluent de l’Armançon. Il m’a dit que le bilan carbone pour équiper un ouvrage (turbine + réfection + passe à poisson) n’était pas bon pour l’environnement. Que d’après les retours des propriétaires qui produisent, les capacités sur l’Armançon ne sont pas viables (Brienon, retour sur investissement de 40 ans, malgré une vis pour turbiner le débit réservé et malgré les subventions).
      J’ai rencontré un hydro électricien membre de la Commission Locale de l’Eau de l’Armançon dans le cadre du projet HYCCARE (impact du changement climatique), il m’a dit : « ne me parlez pas d’hydroélectricité sur l’Armançon, il n’y a pas de potentiel qui vaille un investissement ».

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    6. Un représentant FFAM sur le bassin Armançon ? Cela m'intéresse, parce que j'en connais pas. (Une assoce adhérente, oui).

      Le représentant EAF à la CLE, je le connais, c'est un industriel. Ses propos n'engagent que lui... en tout état de cause c'est assez pifométrique ce que vous rapportez.

      Sur la rentabilité de la petite hydro, c'est le bourreau qui demande à sa victime pourquoi elle a l'air triste ! Comment voulez-vous que ce soit rentable avec des passes à poissons à 50 k€ le mètre, des grilles fines, des goulottes de dévalaison, des dossiers loi sur l'eau de plus en plus épais qui demandent des BE, etc. ?

      Et puis rentable, c'est quoi ? Vous croyez qu'un seul industriel investit en renouvelable s'il n'y a pas au préalable des garanties de tarif de rachat, des injections prioritaires réseau et des avantages fiscaux divers? Vous pensez qu'on développerait demain le solaire ou l'hydrolien ou l'éolien ou l'hydro sur des tarifs actuels de marché spot européen?

      Quant à Brienon, c'est intéressant : le BE Jacquel et Chatillon (propriétaire de l'usine) considère que ce n'est pas rentable, mais engage quand même plus d'1 million d'euros de travaux. Chapeau pour un bureau d'études.... cela ne va pas inspirer confiance à leurs clients, ce que vous rapportez là.

      Concernant l'état chimique : il y a 41 substances prioritaires à contrôler et une dizaines de paramètres physico-chimiques (DCE 2000). Sur d'autres (N et P) le suivi est plus ancien. Des plantes dont on n'a pas le suivi exact sur un siècle, c'est quand même un peu flou non ? Mais peut-être que cela s'améliore, il faut juste le vérifier et comprendre quelles actions ont produit quels effets.

      Concernant les dépenses Agences de l'eau : où sont les chiffres? Donnez-nous le rapport public AESN sur sa politique des ouvrages et nous le commentons volontiers.

      Les propriétaires de moulins abordés sans faire de forcing... de la part du syndicat, peut-être. De la part de la DDT, de l'Onema et des Agences, c'est une blague. Le Sirtava n'a pas besoin de faire de forcing, on a les autorités et financeurs qui ont prévenu avant lui qu'il fallait effacer ou se ruiner. Enfin bon, le déni, c'est beau, mais la réalité est toujours un peu plus têtue. Rendez-vous en 2018, issue légale du classement, pour faire un bilan sur les choix des propriétaires. On a 900 ouvrages classés en Bourgogne, 300 env Yonne et autant Côte d'Or, on verra bien le choix des propriétaires. S'ils sont tellement heureux de l'offre actuelle Agence et syndicats/parcs, eh bien on aura tous les ouvrages équipés ou effacés.

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  8. Rappel : le potentiel total de l'Armançon a été estimé dans le cadre du SAGE, c'est obligatoire. Selon le Sirtava, il est de 18 MW en puissance et de 85.000 MWh de productible. On peut consulter ces données sur le site du syndicat, Annexe V des documents d'accompagnement du SAGE. Après, c'est plus ou moins simple au plan juridique, économique, technologique, etc. La question est de savoir ce qui se passe quand les gens ont des projets : on les encourage ou on les décourage? on leur simplifie la vie ou on leur complique la vie ? on finance les demandes d'aménagement environnemental ou on les laisse entièrement à la charge du pétitionnaire ?

    Sur la "rentabilité", l'angle de nos interlocuteurs anonymes est assez curieux. Ils trouvent normal de dépenser 100 ou 200 k€ par projet écologique sans s'engager sur le moindre objectif concret de résultat et de progrès sur nos obligations légales, mais ils trouvent bizarre qu'on aide à développer une source de production bas-carbone si elle n'est pas "rentable". Parfois, ce sont les mêmes qui accusent les usiniers d'être des "profiteurs" ne visant que leurs "dividendes", mais apparemment, la petite hydro ne rapporte pas un kopek. Va comprendre...

    Enfin en France, tout va bien, nous avons le nucléaire tellement "rentable" (cf les excellents bilans Areva et EDF) qui fait 75% de notre électricité, les milieux aquatiques et continentaux n'ont rien à craindre.

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  9. Bonjour,
    Je ne fait que rapporter ce que j'ai entendu sur le sujet et ce que j'ai observé près de ma rivière.
    Mais je vois que l'on a pas la même vision de celle-ci.
    Je suis d'accord sur le nucléaire, c'est une énergie dangereuse et polluante...

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